J’aime donner l’impression de savoir ce que je veux, et moi-même, je préfère rapidement définir mes objectifs : je déteste plus que tout perdre mon temps. Alors forcément, mon projet d’artisanat pour ce semestre a été rapidement fixé, et ce dès cette première séance officielle : j’allais réaliser un ouvre-lettre. Le choix n’est pas tant déterminant de toute façon, c’est un premier essai, une première création, et bien que je compte m’appliquer avec le plus de rigueur possible - comme c’est le cas pour tout ce j’entreprends -, c’est surtout pour expérimenter que je le fais. Et si j’arrive à le rendre fonctionnel, c’est à dire s’il découpe aussi proprement que je le souhaite l’enveloppe du courrier que je reçois, je serai tout à fait gagnante et satisfaite.

Au soir, après la séance d’ouverture du club, posée sur l’une des tables de travail de ma salle commune, j’ai passé un moment pour continuer à mettre mes idées et pistes à plat, à croquer différents rendus sur des parchemins libres, avant d’en prendre un pour écrire à mon père. C’était indispensable, il me fallait un nouveau carnet dédié uniquement à ce club, et je ne me voyais aucunement attendre le troisième samedi de ce mois pour aller m'en procurer un moi-même. Et si ça pouvait m'éviter en plus un aller retour à Pré-Au-Lard, c'était tant mieux. Je n'ai pas tardé à recevoir ce que je voulais ; papa me l'a envoyé vite, et déjà mardi je l'avais en main. Je sais qu'il n'est pas sorti en acheter un ; l'objet n'a certes jamais servi, mais le papier parait vieilli et la couverture un peu fanée. Je soupçonne mon père de l'avoir tiré d'une des piles de ses innombrables livres.

Ce mardi 12 janvier, après le déjeuner, j'avais donc décidé pour la première fois de me rendre au club pour y travailler. Mes parchemins à la main, mon pas-trop-nouveau carnet dans le sac, j'avais franchi la porte pour constater, comme prévu, la présence de l'autre type préfet-en-chef. Je ne le connais pas, je ne lui ai jamais parlé, et ce n'est pas aujourd'hui que je vais commencer. Je lui lance un bref regard suivi d'un "bonjour" avant de m'installer dans mon coin, déployant mes parchemins pour avoir une vue d'ensemble de mes croquis, espérant qu'il ne vienne pas me faire la causette, ni personne d'autre d'ailleurs. J'ouvre mon carnet et j'entreprends de retranscrire les éléments que j'estime être les plus intéressants et les plus réalisables ; ce manche-ci, cette forme de lame là, cette décoration peut-être, et les assemble, faisant plusieurs dessins pour finalement ne retenir que celui qui me convient le plus.

Si je n'avais voulu faire que ça, je ne serais pas venue aujourd'hui. Mais c'est bien parce-que j'avais prévu de finaliser cette première étape que je suis ici : il y a tout d'abord cette bibliothèque dont on nous avait parlé, mais également les matériaux et outils. Et il est à présent temps de définir le comment et de préciser techniquement mon esquisse. Je pioche dans les livres ceux qui m'intéressent, ne sélectionnant que ceux dont le sujet est le bois ou en faisant au moins mention, puisque c'est bien en ce matériau que mon ouvre-lettre sera. Pas vraiment de pratique pure cette après-midi, celle-ci, jusque 16h15, heure à laquelle je devrai me rendre en cours d'Etude des moldus, se résumera à ceci : lire, me renseigner, jeter mon dévolu sur un bois, le noyer, évaluer ce dont j'aurais besoin et faire quelques tests sur des chutes. En somme, faire les choix les plus fondamentaux.

Ce n'est qu'à la fin de la semaine que je me permets de revenir, le Dimanche 17 Janvier, pour entamer le plus dur du travail : je ne le dirai encore moins que je ne le montrerai, mais je suis vraiment impatiente de commencer. Mais, je ne veux pas faire les choses à la hâte et risquer de faire n'importe quoi. Je me dirige vers l'endroit où est stocké le bois, et prends le temps d'analyser chaque morceau disponible pour choisir lequel sera le mien. Pas trop grand, pas trop petit, et évitant ceux ayant un ou des nœuds, ce qui compliquerait mon travail, ou pire, le ferait rater. L'un d'eux me semble idéal, je l'inspecte, avant de l'emmener pour le déposer sur mon espace de travail. S'en suit ensuite le choix des outils que je dépose au même endroit après les avoir étudié. Et moi qui étais si impatiente, j'ai pourtant du mal à me lancer : je doute, j'hésite. Mon regard divague un instant, j'observe discrètement mes camarades avant de me raisonner. Je m'encourage et me persuade alors moi-même : combien de fois ai-je taillé un balai pour l'entretenir ? Est-ce que j'hésite lorsqu'il s'agit de soigner mon Brossdur 7 après un match de Quidditch ? Non. Et je pense savoir le faire : il n'y a donc aucune raison.

Je m'arme alors prudemment du couteau et réalise la première entaille. Puis la deuxième. Et ainsi de suite : aujourd'hui, je passerai le reste de mon après-midi à dégrossir, afin d'obtenir une forme qui se rapproche un peu plus de l'ouvre-lettre que j'imagine.

Les cours, révisions et devoirs me prennent beaucoup de temps, et j'ai avoir du mal à trouver le temps pour avancer considérablement sur mon projet. Et puis, j'avoue que ce n'est pas non plus ma priorité absolue : je préfère largement privilégier tout ce qui concerne mes résultats scolaires... de même, les entrainements passent aussi avant. Mais je suis loin d'être en retard cependant, et avec une organisation au poil, l'ouvre-lettre avance à petits pas. Est-ce qu'aujourd'hui sera un petit pas ? Je me permets de remettre en doute cette certitude, et pour cause : Alyssa sera là. Non pas que sa présence me dérange, loin de là, mais son hyperactivité est parfois un peu troublante : dites vous que même la nuit, alors qu'elle dort, elle bouge. Heureusement, je commence à être habituer, et de la même façon que l'on apprécie avoir un bruit de fond, j'apprécie qu'elle soit avec moi.

Quoi qu'il en soit, mon ouvre-lettre prend peu à peu forme, même je suis encore bien loin du résultat final. Mais surtout, le plus délicat reste à venir : l'objet étant de plus en plus fin, notamment la lame, il devient parallèlement de plus en plus fragile. Un coup de ciseau mal placé, et aucun retour en arrière ne sera plus possible. Cet après-midi, j'ai donc décidé, en plus d'encore et toujours me référer aux livres, de faire des essais sur des chutes du même bois que le mien, avec des ciseaux forcément, mais aussi avec du papier ponce de différents grains, des gouges et d'autres outils, et de demander aux adultes ce qu'ils en pensent, et s'ils peuvent m'aiguiller.

@Áine Lydon, @Suileabhan Kohler

Vous avez gagné 1 point d'expérience, le sujet va maintenant être verrouillé !