Je rigolais à la boutade de ma camarade. Gourde était en effet le mot qui décrivais le mieux Lucrèce. Cette fille était tout ce qu'il y avait de plus superficiel et il était clair que Pad sortait avec elle pour sa beauté reluisante plus que pour son intelligence. Je ne comprenait pas pourquoi certains s’entêtaient à préférer la beauté superficielle à la réelle beauté des choses et des gens... Jamais moi même je ne pourrais supporter l'idée de n'aimer qu'un corps.

Un génie des potions.... Tout s'alliait dans ma tête. Et ce rêve, qui revenait sans cesse...Je cherchais, fouillais, en quête d'une information... Quelque chose m’échappait mais quoi... Fiole, récipient, potion. Quoi ? Non... Ce ne pouvait pas être... Je devais absolument m'assurer que ma théorie avait ses chances d'être vraies. J'avais notamment lue quelques histoires de sorciers se dissimulant de leur réelle identité en buvant une potion régulièrement pour en garder l'effet constant.

- Je réitère ma question, porte-il une fiole ou un récipient auquel il boit une à plusieurs fois par jour ? C'est un maître des potions et les potions se boivent...

Je trépignais me balançant d'une jambe sur l'autre dans l'attente d'une confirmation. Je levais soudainement la tête en entendant des voix derrière nous mon cœur accélérant brutalement. Mais fausse alerte, ce n'étaient qu'un groupe de sedaigles en plein débat virulent... D'ailleurs les gryffondors n'avaient nullement chercher à me retrouver, leur vengeance devait être mon échec, cela devait leur suffire.

Je respirais lentement pour me calmer et arrêter de secouer ma tête de droite à gauche. Personne ne nous écoutait et nous ne disions rien de mal après tout. Mais malgré le pseudo-courage que je montrait j'avais moi aussi peur qu'en exposant mon visage je dusse faire face à des représailles.

Je me demandais comment expliquer à Aishani ma théorie sans passer pour une idiote qui croit en ses rêves. Dire la vérité ne mènerait à rien, je devais simplement attendre qu'elle ait avec moi ce déclic. C'était de plus en plus évident, Pad n'était pas aussi talentueux de nature. Quelque chose tenait en éveil la part formidable de lui et ce quelques chose paraissait clairement être une potion. Un bon élève qui saurait voler avec discrétion aurait en fouillant les placards de poudlard de quoi confectionner n'importe quelle potion possible d’apprentissage à Poudlard. Restait à réfléchir pour trouver laquelle il utilisait, si elle était interdite et si il en avait une dose suffisante pour encore un moment. Car après tout ce que nous voulions c'était l'arrêter... Pas par jalousie non, mais parce qu'Aishani le voulait. Moi je ne savais pas vraiment pourquoi elle tenait tant à ce qu'il arrête son cirque, mais je supposait que ces raisons étaient bonnes... Ma confiance en elle était aveugle, elle devait m'accorder la sienne à son tour.

La remarque d'Aishani sembla illuminer Jenny, qui devint soudainement très concentrée sur ce qu'elle disait. Aishani écarquilla les yeux de surprise. C'était si important que ça qu'il soit un petit génie en potion ?

La Serpentard lui reposa la question, avec une inflexion différente. L'indienne plissa les yeux, tentant de se rappeler. Non, elle ne l'avait jamais personnellement vu boire à une fiole quelconque. Elle l'avait suivi pendant une petite semaine, et avait bien remarqué qu'il avait pas mal de manies... Mais boire des potions ne semblait pas en faire partie... Il avait une drôle de manière de paraitre nonchalant ceci dit...

Hmm ?! Attends voir... Aishani regarda en coin Jenny, tout en tentant de mimer cet étrange geste. Amener sa main à sa bouche, pousser sa tête en arrière en souriant... Amener sa main à sa bouche... Non sa paume... Et pourquoi la passer autour de sa bouche ?.. Oh ! La chemise ! Il devait avoir un truc dans la manche de sa chemise !

Aishani refit le mouvement, vérifiant ses dires. Oui. Oui oui ! Une éprouvette pouvait largement tenir dans la chemise, sous la cape de sorcier. C'était discret et facile à atteindre avec un peu d'expérience en prestidigitation... Pourquoi ne l'avait elle pas vu plus tôt...

"Je crois bien qu'il boit un truc, oui... Plusieurs fois par jour, il cache ça dans sa manche droite..."

Elle amena ses yeux à la rencontre de ceux de Jenny.

"Tu crois que c'est une potion ? Mais quel genre de potion peut rendre les gens héroïques ? Si ça existait vraiment, tout le monde en boirait !"

Aishani ne comprenait pas. Surtout, une partie d'elle même n'avait vraiment pas envie d'y penser. Qu'une potion soit la cause de la soudaine popularité du Gryffondor indiquait que quelque chose de puissamment magique était en jeu. Quelque chose de si magique, que même ici, les sorciers étaient sous son influence. Pourquoi !? Comment un tel pouvoir pouvait il exister à disposition d'enfants, pas même suffisamment matures pour se rendre compte du mal qu'ils pourraient faire avec. La seule réalisation de tout ça suffisait à sidérer l'indienne d'une terreur sourde qu'elle tentait avec vigueur de garder enfouie. Ce monde magique et tout ses outils destructeurs étaient d'un danger impossible, inconcevable pour une moldue comme elle. Comment diable pouvaient faire toute cette population pour vivre dans cet état de joie béate dont elle était témoin chaque jour de sa scolarité. Ce chateau ne cachait même plus les squelettes dans son placard...

L'indienne repoussa ses pensées, se concentrant sur Jenny. Elles devaient faire quelque chose, dans tout les cas. Les profs n'agiraient pas sur de simples suppositions. Ses camarades étaient tous sous le charme et ne l'aideraient pas... Elles étaient seules à pouvoir faire quelque chose...

Jenny avait une idée. Aishani espérait que c'en était une bonne...

Si il buvait quelque chose et qu'en plus il le cachait c'était bingo. Quand on cache quelque chose ce n'est jamais bon signe, le jeune homme était soit alcoolique soit consommateur d'un liquide dont il ne voulait pas dévoiler l'existence. Lequel était désormais la question qui se posait.

Je regardais Aishani agitée de sentir que je tenais une piste. Je fût étonnée qu'elle n'y ait pas pensé plus tôt, elle était pourtant si ingénieuse... Il était probable qu'elle fît trop concentrée sur ses pièges pour prendre le temps de réfléchir à la possibilité d'une origine magique au problème. Je lui fit un sourire contrit et sortit mon calepin de mon sac.

- Attends...

Dans ce petit calepin s'entassaient des tonnes d'informations et de remarques qui me paraissaient importantes et que je trouvais au fil du temps dans les livres, dans la bouche des autres ou encore dans des journaux. J'avais une liste de tout les sortilèges que j'avais pu découvrir jusqu'ici et une de toute les potions, je devais avouer que celle des potions était bien plus courte mais elle contenait tout de même plus d'une trentaine de potions différentes. J'avais trouvé la plupart d'entre elles dans les livres des programmes de chaque années disponibles à la bibliothèque.

Je parcourait des yeux la liste, répertoriant mentalement les possibles candidates au rôle de "potion permettant d'avoir autant de succès et de chance". Potion de force...mmh ce n'était pas de la force qu'il utilisait. Aiguise méninges, pourquoi pas...mais il n'y avait pas que de l'intelligence dans ses actes au contraire... Potion vieillissante qui lui donnerait assez de maturité pour... non il ne fallait pas de la maturité pour esquiver une bombe de peinture.

- AH !

Le cri m'avait échappé sans que je le veuille. Après avoir sourit désolée de mon eureka bruyant j'avais lu le peu d'informations que j'avais sur cette parfaite candidate que j'avais trouvé.

- Félix félisix...filicis, non Felicis est le nom d'une potion qui donne à celui qui la consomme une chance extraordinaire, sa préparation dure 6 mois... Wow, il faut vraiment être accro pour passer six mois sur une potion pour au final ne gagner qu'une estime de soi qu'on ne mérite pas et qui risquerai de s'effacer dès lors que ses réserves se finiront.

Je guettait avec attention les réactions de la gryffondor. Si j'avais visé juste cela se dessinerait sans doute immédiatement sur son visage. Quant à Pat, je n'avait aucune idée de la raison pour laquelle il pourrait prendre la peine de préparer cette potion simplement pour un peu de gloire et l'histoire d'amour la moins honnête possible. De plus si il s'en servait régulièrement il n'hésiterais pas à en prendre pour ses examens et ça c'était grave car considéré comme de la tricherie.

Aishani croisait les bras, la tête légèrement sur le côté. Sur son visage se dessinait toute l'expression de la sidération.

"Sang noir, t'es sérieuse... Une potion de chance ? Ca expliquerait beaucoup de trucs, mais de la chance en bouteille... Ce genre de choses existe vraiment..."

L'indienne frissonna perceptiblement, serrant ses bras contre son corps, rattrapée par sa phobie magique. Son esprit carburait à toutes les possibilités malsaines que ce genre de truc pouvait offrir... Cela faisait un peu moins d'un mois que Pad avait "de la chance" et était devenu la coqueluche de sa maison. Il s'en contentait pour l'instant, mais même six mois de préparation n'était pas difficile à reproduire, donné l'opportunité. Et de la chance en bouteille lui en apporterait foison...

"Oh mon dieu, nous DEVONS l'arrêter..."

La phrase était sortie toute seule de sa bouche, alors que son visage était encore tétanisée dans une expression horrifiée. Ce n'était plus une question de migraines ou d'anomalies dans la tapisserie. Il en allait de l'ordre même des choses. Aishani amena sa main à sa tempe, tentant de calmer le vertige qui la prenait soudainement. Son esprit voyait le millier de choses possibles à faire avec une telle chance. La liste ne s'arrêtait pas... Son coeur battait à tout rompre, et elle haletait. Fermant les yeux avec force, elle s'obligea à réfléchir à une solution, à une issue positive à tout ça... Oui... Il leur fallait un plan.

"... Ok... Ok... Soyons logique une seconde..."

Elle réouvrit les yeux, tentant de prendre une posture déterminée, ses mains toujours fermement ancrées dans ses bras, les jointures blanches de tension.

"Imaginons que c'est bien une potion, et pas quelque chose d'autre. Ca veut dire qu'il en a une réserve quelque part, et vu qu'il n'est pas stupide, un atelier avec une autre fournée en préparation. Cela laisse peu de places à l'improvisation. Je ne vois que deux solutions : Soit il a un espace privé en salle des potions. Ce qui m'étonnerait... Soit il possède un atelier privé quelque part. Suffisamment discret pour qu'il puisse conserver à l'intérieur ses préparations en attente... Et je sais exactement le type d'endroit en question..."

Aishani reporta son regard vers Jenny, tapotant sur sa poitrine. Elle savait que Jenny savait ce dont elle parlait... Une étincelle soudaine dans son esprit lui fit écarquiller les yeux de surprise. Si le premier était possible, alors le second aussi. Elle savait comment trouver cet atelier privé... Enfer ! L'ébauche de son plan était totalement tiré par les cheveux... Elle en souriait d'excitation... De ces sourires présageant du pire comme du meilleur... Ses yeux pétillaient lorsqu'ils revinrent vers la jeune Serpentard.

"J'ai une idée complétement stupide, Jenny... Du genre, vraiment, vraiment stupide..."

Je laissais paraître une moue intriguée devant l'empressement paniqué d'Aishani. Il n'était pas compliquer de comprendre que pour elle les choses qui se produisaient étaient graves. Moi je ne trouvais pas si grave ni si étonnant qu'un élève soit tenté d'utiliser une telle potion, après tout qui résisterai à la tentation de se voir affublé de tout ses lauriers et d'une chance presque indécente ? Ce n'était pas de la jalousie qui provoquait chez la gryffondor de tels spasmes, c'était autre chose, colère ou peur peut être, mais la jalousie ne faisait en rien réagir ainsi...

Je continuais à l'écouter, désormais elle semblait en proie à une grande réflexion. Moi ,impatiente, je laissais soupeser mon poids d'un pied sur l'autre poussée à me mouvoir par la hâte de savoir ce qui passait par la tête de ma collègue.

Enfin j'eu une explication tout à fait convenable de son avis. Si la potion était si longue à préparer et si il en avait une réserve continue c'était bien qu'en plus de la stocker il la préparait. Et pour cela il devait avoir besoin d'un lieu propice à la préparation des potions mais qui en plus soit à l'abri des regards, soit un lieu clos, abrité des intempéries, inconnu aux yeux de tous et qui puisse accueillir des feux magiques, stocker des ingrédients et des chaudrons. Soit beaucoup de facteurs, un endroit qui me parut à moi impossible à trouver. Mais quand on était chanceux on trouvait facilement ce genre d'en droit qui nous sert comme on le souhaite...

- Et quel est ce type d'endroit ? Je soupçonnerais les cachots mais...

Les cachots étaient déjà occupés par des élèves souhaitant s’entraîner à l'art des potions, soit trop peux discrets, et ne parlons pas du fait qu'il y ai à cet étage la salle de potions et la salle commune des serpentards, si il s'y tramait quelque chose quelqu’un finirait forcément pas le voir.

Enfin j'arrêtais mon continuel balancement pour prendre une posture fix à l'entente des mots "idée stupide". Je savais bien de quoi Aishani était capable... Et l'une de ses idées qu'elle trouvait elle même stupide, ce devait être réellement stupide... J'hésitait longuement avant de lui poser la question, pas si sûre de vouloir me lancer dans des aventures incontrôlables. Mais finalement la curiosité l'emporta et je m’intéressais à son idée, priant pour que celle-ci n'aille pas à l'encontre du règlement.

- Tant que ce que nous faisons n'est pas interdit, ce n'est pas stupide... Mais à ton ton je devine que c'est vraiment stupide... Dis moi toujours, je t'aiderais si je la juge convenable... Ou même je t'aiderais quoi qu'il arrive en fait, je suis trop curieuse d'avoir le fin mot de cette histoire.

Le sourire de la Gryffondor s'étira d'avantage.

"Il est bientôt midi, retrouve moi devant le portrait de la grosse dame à l'heure où tout le monde ira manger. A plus Jenny !"

Et toute mystérieuse, l'indienne partit.



[12h10 - Portrait de la Grosse Dame]

Un nombre considérable de Gryffondors passait devant la Serpentard, sans même réellement la regarder, tous sortant de derrière le portrait menant à leur salle commune. Les sortilèges étaient en place, le tableau vigilant. Ce n'était pas comme si une petite première année serait capable d'en passer les défenses.

Le flux continua et continua, Pad Buttercup passa avec une clique d'au moins une dizaine de garçons et filles, tous riants entre eux, avant de se tarir rapidement, alors que les retardataires sortaient de la salle commune en courant. L'entrée désormais vide, Jenny pu entrevoir Aishani arriver, en discussion avec un grand Gryffondor de troisième année, aux cheveux corbeaux désordonnés. Elle lui fit un signe de la main, alors qu'il hochait de la tête en silence, avant de partir dans une autre direction. L'indienne le regarda partir d'un petit air rêveur avant de tourner la tête, et de se rendre compte qu'on l'observait.

"Ah ! Tu es déjà là ! Viens, suis moi, on a que cinq minutes devant nous."

Aishani portait à sa main, une valise de taille moyenne, qui semblait vide vu la facilité avec laquelle elle la portait. Son visage était rouge d'embarras, mais elle attrapa la main de Jenny avant de l'emmener dans un couloir dérobé, devant ce qui ressemblait à un placard à balai. Elle l'ouvrit sans autre forme de procès, rentrant à l'intérieur, fermant la porte derrière elle, avant de poser sa valise sur le sol et de l'ouvrir rapidement.

"On a peu de temps devant nous... Dans cinq minutes, Audric va venir prendre la valise et la remonter dans son dortoir... Suis moi !"

Et comme si c'était la chose la plus simple du monde, l'indienne mis les pieds dans sa valise et descendit à l'intérieur. Sa tête dépassait à peine, avant qu'elle ne regarde de nouveau Jenny.

"Allez ! N’aie pas peur ! C'est juste une valise !"

Elle disparu à l'intérieur.


C'était plus grand à l'intérieur qu'à l'extérieur. Descendant une échelle en bois tout ce qu'il y avait de plus neuf, Jenny découvrit une petite salle toute simple, austère, au plancher en bois et aux murs de briques. Une fenêtre était ouverte sur ce qui semblait être une sorte de forêt humide, absolument pas britannique, propageant lumière, bruits d'oiseaux inconnus et air chaud dans la salle, faisant voler deux petits rideaux fins.

L'espace était plutôt chiche, d'à peine 15m². Un bureau simple croulant sous des livres moldus, une bibliothèque avec plus de livres encore, un petit lit de camp, quelques étagères garnies de petits objets moldus divers et variés, quelques plantes en pot sous la fenêtre qui semblaient comme bloquées à l'intérieur. Au fond de la pièce, Aishani était en train de s'asseoir sur une lourde malle, faisant face à Jenny.

"Bienvenue dans ma seconde demeure. Mon petit jardin secret. Hésite pas à t'asseoir, ça ne devrait plus tarder longtemps..."

Un petit claquement se fit entendre au dessus d'elles, alors que la valise se refermait sur ses occupantes. Aishani fouillait à l'intérieur de sa chemise. Ce fut à cet instant qu'une main attrapa l'épaule de Jenny !

L'agresseur se révéla être un étrange poisson tout en hauteur, un jouet tout en cuir et boutons noirs, semblant nager dans l'air . De sa gueule verticale, une main bronzée en sortait, pile poil exacte à celle de la Gryffondor. Aishani riait dans son dos, la main dans le poisson faisant coucou à Jenny avant de disparaitre, pile au moment où l'indienne retirait sa main de sa chemise. Le jouet continua à vivre sa vie de jouet, nageant dans l'air jusqu'à faire des ronds au plafond, sa bouche s'ouvrant parfois, ses yeux boutons étrangement inquisiteurs. Aishani souriait tout en se calant contre le mur, ses pieds hors du sol, battant l'air tranquillement.

"Maintenant tu sais comment et où je fais disparaitre mes objets... Oups !?"

Le sol se mit à trembler, comme si le monde était en train de s'incliner. Les objets tintèrent, les livres bougèrent et Aishani continuait à battre des pieds.

"Audric a du nous trouver. Si tout fonctionne comme il faut, nous serons dans quelque minutes dans le dortoir des garçons Gryffondor, pile dans le dortoir de Pad Buttercup. Et si mon intuition est bonne, je suis persuadée que nous trouverons une valise tout ce qu'il y a de similaire à la mienne, qu'il nous suffira d'ouvrir et de vérifier."

L'indienne étira ses bras devant elle, détendant son corps, alors que les tremblements continuaient.

La jeune fille était restée parfaitement mystérieuse quant au fond de sa pensée. Elle m'avait simplement donné de simples directives et était repartie ne me laissant guère le choix de négocier. Et voilà pourquoi à l'heure de la pause déjeuner quand tout le monde se précipitait dans la grande salle pour se rassasier je me retrouvais plantée avec mon uniforme tout de vert orné devant la salle des gryffondor. Je priais pour que personne ne me fasse la remarque que je n'avais rien à faire là mais fort heureusement les gryffondor étaient des gens gloutons et particulièrement concernés pas le repas.

Je vis passer nombre de rouges, notamment Pad lui-même et son escorte d'un bon nombre de personnes. Il ne me reconnut pas à mon plus grand soulagement et ne me vis sans doute même pas. Enfin je vis Aishani arriver avec un garçon qui n'avait pas l'air de manquer de sympathie. Elle le laissa là et dévisagea son dos un long moment... pourquoi fixait-elle ainsi ce jeune homme ? Il était louche lui aussi ? Je décidais de garder ces questions pour moi et d'écouter Aishani.

Grimper das une valise... elle était folle ! Comment pouvait-t-elle y renter ainsi entièrement ? Elle m'encouragea à la rejoindre, j'hésitais en comprenant son plan. Nous nous cachions dans une valise, on nous emmenait chez les gryffons et...je me retrouvais dans un dortoir qui n'était pas le mien. Je grimaçais pesant le pour et le contre mais constatant que le temps pressait et que de toute façon on ne logerait jamais à deux dans une valise je la rejoins. C'est à ce moment que je me souvins avec horreur que la magie se fichait de donner aux choses la taille qu'ils semblaient avoir. Je rentrais donc avec elle, finalement sans soucis et un peu angoissée par l'idée de rentrer chez les rouges.

Je découvris après avoir descendu une petite échelle une pièce d'envergure moyenne, relativement confortable tout de même pour une élève si jeune. Je sursautai soudainement en sentant une main se poser sur mon épaule. Je regardais Aishani me retournant avec vivacité et constatai avec horreur que ces deux mains étaient libres. Je compris ensuite ce qui me faisait cette frayeur, un immonde poisson....avec une main...

Une fois la main disparût je pût me concentrer sur les dires d'Aishani, son plan était clair et compréhensible, nous allions nous introduire non seulement chez les gryffons mais en plus dans le dortoir masculin. Le plan était ingénieux... Je m'assis par terre effrayée par le violent tremblement qui secouai toute la pièce sans ménagement avant de prendre le temps de répondre à Aishani.

- Oui je vois ou tu fourres tes objets ! Et je comprends bien mieux ce que tu entendais par une idée complètement stupide...

  Audric sortit de la salle commune des Gryffondor tout en écoutant attentivement une jeune fille à la peau mate. Aishani était venue lui demander un service, et le brun avait accepté à une condition : contre son aide elle devrait l'aider à son tour. En vérité il aurait fait ce qu'elle lui demandait sans contre-partie, car depuis quelques jours il s'ennuyait fermement. Il avait finit de s'apitoyer sur la mort de sa mère, retournant sa colère d'abord contre Esmée, avant de finalement rendre responsable tous les adultes de ses malheurs. Parce que tout avait commencé à cause d'eux, qu'il avait besoin d'un responsable et qu'il n'était pas prêt à assumer quoi que ce soit dans cette histoire. 
 Ayant perdu sa meilleure amie, il avait également perdu une complice dans ses projets aussi idiots qu'inutile. Heureusement pour lui Aishani était arrivée avec une demande aussi farfelue qu'inattendue. Pour une fois il n'avait pas demandé à en savoir plus, il ne connaissait donc ni le plan de sa camarade ni le but de tout cela. Tout ce qu'il savait était qu'il devait prendre une valise à un point A, et la reposer à un point B. En sachant que le-dit point A était un placard, et le point B le dortoir des cinquièmes années de Gryffondor. 

 Intérieurement Audric avait haussé les épaules à la demande de l'adolescente. Tant que la valise en question n'allait pas dans son propre dortoir, il s'en moquait éperdument. Il avait fait quelques suppositions, mais n'avait réussit à n'en trouver aucune possible. Surtout après avoir surprit le regard de sa camarade sur un groupe de cinquième année justement, qui faisait beaucoup parlé de lui ces derniers temps : celui de Paddock Buttercup. Est-ce qu'elle essayait de détruire la pièce ou bien faisait-elle une espèce de trafic? Non... c'était encore autre chose. 
 Aishani le salua de la main, et il s'éclipsa en silence après avoir hoché la tête, un sourire au coin des lèvres. Ouais... qu'importe ce qu'elle avait prévu de faire ce serait assurément marrant. Et puis il apprendrait bien tôt ou tard de quoi il en retournait. Mais il ne dirait rien à personne sur l'identité de la responsable.
 Sauf à son meilleur ami évidemment. Certaines filles avaient un journal intime, Audric lui avait un Jonathan. Et ça gardait les secrets à peu près aussi bien qu'un cahier.

 Le garçon aux yeux vairons fit un tour de couloir, attendit qu'il n'y ai plus personne et se faufila jusqu'au placard désigné par Aishani. Il y récupéra la valise et fit le chemin en sens inverse. Il donna le mot de passe à la Grosse Dame et prit le chemin des dortoirs. Il s'assura qu'aucun cinquième année (ni autre élève de tout âge d'ailleurs) soit dans les parages avant d'entrer dans la pièce. Les lits étaient disposés de la même manière que dans son propre dortoirs, à sa voir en cercle, chacun dos à un mur. Machinalement le brun s'approcha de celui qui était à la même place que le sien, sur la gauche, et y déposa la valise entre deux lits. Accroupit devant l'objet, il n'avait aucune idée de ce qu'il devait faire à présent. Il chassa rapidement une mèche de cheveux rebelle et tapota la valise trois fois. « Bon. Ben j'te laisses là. » 

*A table maint'nant* Il abandonna l'objet, préférant être loin s'il devait exploser ou libérer une quelconque créature, et prit la direction de la grande salle. Le reste ne dépendait plus de lui à présent.

"N'est ce pas ?♫"

Ne pu s'empêcher de chantonner, extatique, une jeune indienne bien trop fière de la situation. L'idée n'était pas si terrible, même pas vraiment révolutionnaire. Mais pour Aishani, moldue détestant profondément la culture sorcière, avoir l'occasion de faire un pied de nez au système, de briser leurs interdits simplistes et taboo douteux... Autant dire que cela valait totalement quelques minutes d'inconforts et une plongée absolument totale mais en confiance dans l'inconnu.

Elle souriait de toute ses dents, cachant bien au fond d'elle même ses sentiments particuliers par rapport au grand batteur dégingandé qui les transportaient actuellement. Elle l'avait regardé ces derniers temps, de loin, laissant trainer ses yeux et ses oreilles dans son sillage. Elle savait pour sa mère, et son deuil. Elle avait plus ou moins reconstitué le puzzle autour de son clash récent avec Esmée Petterson, la capitaine de l'équipe de Gryffondor. Elle avait éprouvé beaucoup de compassion pour le jeune homme, et cela lui avait permis enfin de lui adresser la parole. Elle ne savait pas pourquoi elle lui faisait confiance, mais il emplissait ses pensées, elle avait envie de lui parler, de le comprendre, d'être à ses côtés... Elle battait des pieds, joyeuse, sur sa malle, regardant Jenny, terrifiée, sur le sol, tentant de se tenir à tout ce qui semblait solide... C'était la première fois qu'elle promettait quelque chose sans être sûre de ce que cela impliquait. Oh là là, si ça mère le savait, elle passerait un vilain quart d'heure... L'indienne dodelinait de la tête, à peine plus rouge qu'habituellement. Elle n'allait certainement pas en parler.

Un tressaut plus fort que les autres, un étrange et subtil frémissement dans la gravité. Elles devaient être arrivées... Quelques secondes plus tard, trois petits chocs se firent entendre sur le haut de la trappe. Aishani sauta de la malle, se redressant aussitôt.

"Je crois qu'on est arrivée. Il faut qu'on fasse vite, je n'ai absolument aucune idée de ce qui peut nous attendre si on reste trop longtemps ici..."

Elle passa autour de Jenny et monta avec agilité l'échelle, s'arrêtant avec souplesse juste à la trappe. D'un mouvement fluide et silencieux, elle entrepris de l'ouvrir, juste assez pour pouvoir voir les alentours.

"On a de la chance, il n'y a absolument personne... Et, bon sang, on est au bon endroit... Ça sent le garçon à plein nez..."

Elle ouvrit en grand le capot de la valise, sortant à l'extérieur.



Le dortoir dans lequel les deux demoiselles arrivèrent était plutôt propre, malgré une forte odeur de testostérone et de chaussettes sales. De longs lits à baldaquins rouges pour une seule personne entouraient en cercle un petit poêle central, chacun entouré d'une commode, d'une armoire, de deux lampes de chevets et de deux fenêtres longues en ogives. Quelques affaires trainaient sur le sol, mais le dortoir appartenant à des sixièmes années, le désordre semblait individuellement circonscrit au dessus des commodes et à l’intérieur de certaines armoires, dont le contenu dégueulait par intermittence. Du point de vue d'Aishani, c'était un peu décevant. On lui avait vendu du rêve et du vice, elle se retrouvait dans un endroit mâle, certes, mais à peine moins sauvage que son propre dortoir... Honnêtement, ça sentait juste d'avantage la chaussette.

Faisant la moue, elle regarda rapidement à droite et à gauche avant de s'avancer vers un lit en particulier et de regarder les photos accrochées sur le panneau de bois attenant. Faisant un sourire à sa découverte, elle entrepris de se mettre à genoux, afin de fouiller sous le lit, juste au moment où Jenny faisait dépasser sa tête de la valise.

Nous arrivâmes finalement à destination. Aishani ne perdit pas son temps pour grimper à l'échelle tandis que j'eut un temps de flottement. L'hésitation me gagnait et pour cause, des choses interdites j'en faisais mais toujours pour la bonne cause. Sortir la nuit dans les couloirs, c'était simplement pour calmer mes hantises nocturnes, arriver en retard en cours, jamais pour louper le cours mais toujours parce que quelqu'un est dans le besoin... Aucune de mes bêtises n'était dépossédée de justification. Alors là, s'introduire dans les dortoirs masculins d'une maison qui n'était pas la mienne, pourquoi le faisais-je ? Pour Aishani, par amitié sans doute, parce que son aura d'aventurière me faisait me sentir proche d'elle surtout quand elle m’entraînait dans ses courses aux réponses pour divers mystères. Là on parlait de faire cela pour Aishani et pour démasquer un garçon suspect de garder des fioles dans sa valise...

Bon le temps pressait, je n'avais pas le temps pour un débat intérieur dans l’instant T et laisser parler mon intuition me laisserais l'occasion d'apprendre à faire des erreurs. Je pris mon courage à deux mains et le premier barreau en main puis escaladait ce qui me séparait de l'univers interdit et masculin que nous devions fouiller. Je priais pour que nous n'ayons pas à le faire de fond en comble car plus courte serait notre visite plus de chances d'en sortir indemne j'aurais.

A la surface l'odeur âpre me fit comprendre que les garçons étaient aussi à cheval sur l'hygiène que nous pouvions l'être, peu de différence sur ce point. L'espace restait rangé grâce certainement à l'efficacité des elfes de maison. Mais présentement je préférais fixer les mûrs que les chaussettes, la disposition était différente de celle de nos dortoirs et surtout l'aspect chaleureux du rouge et or était complètement inhabituel pour moi, il me piquait presque les yeux. La salle de serpentard était plutôt sombre même si les dortoirs ne manquaient pas de luminosité mais là, c'était... chaleureux, oui chaleureux était le mot. Un chaleureux différent du nôtre, un chaleureux plus souriant que rassurant.

Aishani ne perdait pas de temps, j'avais à peine eu le temps d'admirer la chambre qu'elle farfouillait déjà dans ce qui semblait être probablement le bon lit. Je m'approchais et m'agenouillais près d'elle, je supposais qu'elle cherchait la valise du jeune homme ou n'importe quel indice. Plutôt que de plonger moi aussi sur le lit je me levais et marchais à pas félins vers l'interstice de la porte pour guetter la présence du moindre obstacle à notre recherche pour le moins peu discrète. Mais les garçons aimaient vraisemblablement manger puisque les dortoirs dans leur intégralité étaient complètement déserts. Et si ils ne l'étaient pas, ils étaient en tout cas silencieux quoi qu'il me sembla entendre les grattement d'un rat dans une chambre adjacente.