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29 janv. 2021, 19:09
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
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Parfois, je ne peux que gémir, souffrir et vider mon désespoir au piano.
La musique avait fait silence depuis plusieurs longues minutes. Tu fixais l’autre personne, sans trop savoir. Savoir quoi dire, enfin plutôt quoi écrire, sans savoir quoi penser. Elle était une énigme à elle toute seule, et tu n’aimais pas les énigmes. Enfin si, tu aimais résoudre des énigmes. Pas les énigmes sans solution. Et elle était de ces énigmes sans solutions apparentes. Mais toi, toi tu n’avais pas le courage ce matin de tenter de la résoudre, d’autant qu’elle ou il, que c’était agaçant de ne pas savoir, ne te faciliterait sans aucun doute pas la tâche. Alors si elle désirait rester une énigme tant mieux après tout. Cela t’évite de trop réfléchir, tu ne veux pas réfléchir de toute façon.

Tu te mets à fixer, le stylo, elle ne l’avait pas encore repris. Elle ne voulait peut-être plus te répondre, après tout. Elle venait déjà de supporter pendant plusieurs minutes de t’écouter jouer du piano, alors qu’elle finit par se désintéresser de toi, n’était au final pas si étonnante. Eh tant mieux d’ailleurs ! Tu allais pouvoir te replonger dans ta mélodie, dans ce dialogue silencieux entre toi, toi et le piano. Un dialogue de sourds intérieur. Voilà à quoi tu en étais réduit, à te poser les questions et à parfois y répondre. Tu aurais bien tapé du poing sur la table, enfin sur le piano. Mais l’autre personne était encore là, tu ne voulais pas l’effrayer, car au fond elle n’a rien fait de mal.

Elle te fixait, elle te fixait quand tu écrivais. À tel point que tu te demandes si tu as quelque chose sur la figure. Ce quelque chose devait dater de la veille, tu n’avais pas mangé ce matin. Tu ne savais pas d’ailleurs si tu irais manger après. Peut-être ce midi. Voir ce soir. Surement demain. Tu ne sais toujours pas comment réagir face à cette énigme qu’elle représente pour toi. Dois-tu lui hurler de s’en aller et de te laisser dans tes émotions, ou lui dire merci ? Tu ne sais pas. Tu hésites, mais finalement tu t’abstins. Les deux solutions sont mauvaises, l’abstention te semble la meilleure.

Elle tend la main pour se saisir du stylo. Qu’allait-elle écrire ? Tu ne savais pas, tu attendrais qu’elle finisse avant de te saisir du stylo pour lui répondre. Finalement, elle était sympathique de ne pas t’obliger à parler, parce que franchement tu n’en avais pas envie. Alors d’une certaine façon tu lui étais reconnaissante de ne pas te forcer, et de simplement discuter, même si votre discussion restait relativement abstraite. Quelque chose changeait en toi, tu en étais à peu près sûre, mais en bien ou en mal ? Ça, c’était une véritable question que tu ne voulais pas la réponse. Parce que le changement, au fond, ça t’effraie. Alors on verra plus tard, après tout.

Tu t’es tellement laissé distrait par tes pensées que tu n’as pas remarqué que l’autre n’a pas encore écrit. Le bruit du cahier que l’on referme te fit sortir de la légère torpeur dans laquelle tu t’étais mis jusqu’ici. Visiblement la discussion, si tant est que l’on puisse appeler un échange par écrit interposé une discussion, venait de prendre fin. Elle avait repris son carnet et le serrait désormais contre sa poitrine sans un mot, sans un son. Toi non plus tu ne parlais pas. Il n’y avait rien à dire. Vos chemins s’étaient entremêlés pour finalement se délier plus tard. Votre rencontre n’était qu’un éphémère. Elle naît, vit et meurt rapidement. Peut-être se croiseront ils un jour de nouveau. Où peut-être qu’elle ne restera qu’une présence, un lointain et vague souvenir d’un échange silencieux, un échange sans mots, couché sur le papier ?

Elle te tourne le dos et s’éclipse, aussi fugacement qu’elle était arrivée plus tôt. Elle se tourne une dernière fois vers toi. Elle te sourit. Tu lui rends son sourire par politesse. Mais ce sourire est faux, c’est un de tes fameux sourires de façade des moments ou ça ne va pas, mais que tu simules que ça va bien ! Ça y’est… Elle est partie, désormais tu es seul. Seul avec toi-même. Seule avec tes émotions, elle t’a surement aidé à y faire face. Mais te voilà de nouveau en solitaire, avec toi et tes pensées. Elle est partie, emportant ce petit moment de calme qu’elle t’avait permis d’avoir. Même si votre discussion n’était pas basée sur les mots, elle t’avait offert l’occasion de décrocher ton esprit de ce qui le hante depuis ce matin. Alors te voilà là, face à ce piano. Jouer ? Pour quoi faire ? La musique a perdu de sa saveur, et tu risquerais de blesser ce piano avec des notes aussi impures. Alors tu refrènes tes doigts qui ne désirent que de taper furieusement sur ce clavier. Que faire alors ? Allez manger, tu n’as pas faim ? Retourner dormir ? À quoi bon ? Tu ne trouveras pas le sommeil ? Allez en cours ? Il était trop tôt, et même si d’ordinaire, la question ne se posait pas, tu envisageais sérieusement de louper la journée. Tu n’étais pas dans ton assiette, ils comprendraient. Alors tu fais la seule chose à laquelle tu n’as pas pensé. Tu le fais par instinct. Où pour te blesser davantage peut-être.

Tu farfouilles dans les poches de ta robe de sorcier, à la recherche de quelque chose. Tu l’as quand même prise avec toi. Pourquoi ? Tu ne sais pas. Tu détournes brièvement le regard à nouveau vers les partitions au sol.

Mais finalement, tu la trouves. Tu sors la lettre, celle qui a tout changé, et tu la relis. Tu la relis pour la pénultième fois. Elle te fait toujours le même effet, celle d’un millier de petits couteaux que l’on enfonce dans ta poitrine. Tu sens chacun d’eux te transpercer la peau. Ils font s’écouler un mince filet de ton âme, qui finit en torrent. Et tu pleures, les larmes simples goutte se transforme en averse. Puis en pluie. Les pluies de Castamere…
FIN
Merci beaucoup d'avoir bien voulu écrire avec moi un bout de l'histoire de nos deux Protégées.

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6