Le soleil brille en cette fin de septembre. Les rayons réchauffent ma peau pâle et un léger vent annonce l'arrivée de l'automne.

Mes pas me guident naturellement vers un lieu que je ne connais pas encore. J'ai passé une bonne partie du mois cloîtré dans le terrier des blaireaux, jonglant entre mes devoirs et mon propre univers. Mais aujourd'hui, j'avais simplement l'impression d'étouffer dans ma salle commune.

Alors j'ai décidé d'en sortir pour prendre l'air.

Armée de mon sac, j'arrive au lac. Je retire mes chaussures et remonte mon jean, avant de m'asseoir.. Je plonge mes pieds dans l'eau et m'adosse à un rocher. J'ouvre mon sac, saisis mon carnet et laisse les mots traduire mes pensées.

Je passe un certain temps, installée ici, mes cheveux virevoltants au gré du vent. Je m'arrête d'écrire, ne trouvant rien d'autre à ajouter, et relis mes propres pensées. C'est un bon moyen - en tout cas pour moi - de remettre les choses au clair dans mon esprit. J'ai toujours fonctionné ainsi, m'exprimant nettement mieux à l'aide d'un stylo et de papier. Les mots viennent en général tout seul et je me retrouve souvent à enfin mettre des mots sur ce que je ressens, chose que je n'arrive pas à faire par la voix.

De nouvelles pensées me traverse, que je retranscris immédiatement.

Les derniers beaux jours d'été ensoleillaient le parc de Poudlard et Caliban s'était senti d'humeur à sortir aujourd'hui. Lui qui n'avait encore pas beaucoup d'ami, pour ne pas dire aucun, se retrouvait souvent à flâner à la bibliothèque où à se balader dans le parc, en profitant pour emmener un livre avec lui ou réviser. La lettre qu'il avait reçu de ses parents il y a quelques jours l'avait replongé dans une douce mélancolie, et il aimait sortir et se remémorer les journées en forêt avec son père, les moments où sa mère lui enseignait ce qu'elle savait sur les plantes...

D'un pas décidé, il prit la direction du parc, ne prenant avec lui qu'une veste légère. Il se dirigea comme à son habitude vers une rive du lac peu fréquentée des autres élèves car plus éloignée du château, pensant être tranquille.

Au moment où il s'approchait de "son coin", quelle ne fut pas la surprise du garçon quand il vit qu'une jeune fille y était déjà ! Les pieds dans l'eau, adossée contre un rocher, elle avait un cahier dans les mains et semblait en train d'écrire dedans.
Caliban eut un instant d'hésitation, il ne savait pas s'il devait faire demi tour ou aller engager la conversation.

*Bon, allez Cal. Ça fait bientôt un mois que t'es là, et à part ceux que tu croise en salle commune tu parle à personne. Elle va pas te mordre.*

Une inspiration plus tard, il se dirigea vers la jeune fille, dont il ignorait encore la maison, et vit en arrivant que ses cheveux bruns étaient coupés d'une mèche rose et qu'elle semblait en effet écrire dans le carnet qu'elle avait sur les genoux.
Il se racla la gorge afin d'annoncer son arrivée et dit d'une voix hésitante :
- Euh, salut... Désolé de te déranger, je viens tout le temps ici et d'habitude je suis tout seul. À mesure que les mots sortaient de sa bouche il se sentait rougir, satané timidité ! Tu... Tu écris quoi ?
Gêné, il se dandinait sur place sans savoir quelles allaient être la réponse ou la réaction de la jeune fille.

Un raclement de gorge se fait entendre. Je sursaute. Contrairement à ce que je pensais, je ne suis pas seule. Je ferme mon carnet un peu brutalement. Après tout, ce sont mes pensées qui y sont écrites. Je me tourne ensuite vers mon interlocuteur et découvre un garçon aux cheveux ébène. Il est assez petit et possède des yeux bleus dans lesquels je parviens à apercevoir des touches de gris. Sa peau pâle rougit au fur et à mesure de ses paroles.

- Euh, salut... Désolé de te déranger, je viens tout le temps ici et d'habitude je suis tout seul.

J'ai soudain l'impression de déranger. Mais alors que l'idée de partir avait fait son chemin dans ma tête, elle est balayé par le sorcier.

- Tu... Tu écris quoi ? Me demande-t-il.

Cette simple phrase semble avoir été l'effort d'une grande timidité, dans laquelle je me reconnaît immédiatement. Je regarde mon carnet fermé, puis tourne ma tête à nouveau vers lui.

- Euh... Mes pensées. Je trouve ça apaisant. Ça m'aide à y voir plus clair.

Je ne sais pas si c'est le fait que lui aussi soit timide ou si c'est le fait de prendre l'air, mais j'ai l'impression que ma timidité a diminué. Ce qui n'est pas un inconvénient -enfin je crois.

- Je m'appelle Silver Hoster. Tu es ?

*Silver... C'est original comme prénom. Elle n'est pas à Serpentard, il ne me semble pas l'avoir croisée dans la salle commune.*

Un peu rassuré que la jeune fille lui réponde et ne s'en aille pas, Caliban fit un pas pour se rapprocher d'elle, tout en gardant une certaine distance. Après tout, il n'aimait pas que les autres l'approchent trop vite, pourquoi l'imposerait-il à une inconnue ?

- Je m'appelle Caliban. Caliban Wellan.

Elle avait parlé de ses pensées... Quelle chance elle avait de pouvoir les coucher sur papier, les ordonner, les voir. Caliban, lui, n'avait jamais réussi à s'imposer cet exercice. Il adorait lire, il lisait tout ce qui lui passait sous la main, mais pour ce qui était de l'écriture il n'y arrivait tout simplement pas. Rien que de penser aux devoirs écrits qu'il allait devoir faire tout au long de ses sept années de scolarité il angoissait.

Caliban profita de s'être rapproché pour observer plus en détail son interlocutrice. Jean moldu, frange, yeux marrons ... Sa façon d'être assise au bord de l'eau et de simplement être là, dehors, il avait l'impression de se voir, chez lui à la maison, près du ruisseau son livre du moment à la main. Soudain sa mélancolie et sa timidité reprirent le dessus, et d'un air désolé et commençant à paniquer, il bafouilla :

- Tu attendais peut être du monde, excuse moi de t'avoir dérangé. Je venais juste faire un tour, j'en avais marre d'être seul dans ma salle commune et je voulais profiter un peu du soleil. C'est juste que je t'ai vu écrire et j'aime beaucoup lire, et je me disais que tu écrivais peut être des histoires. Mais des pensées, c'est personnel... *Evidemment que c'est personnel, crétin. Pas capable de se faire un pote et une des premières personnes à qui tu parle tu lui sors des absurdités pareilles ?* Je suis désolé. Conclut-il d'un air penaud et légèrement essoufflé d'avoir parlé aussi vite sans respirer.

Il semble se détendre, et s'approche même un peu.

- Je m'appelle Caliban. Caliban Wellan.

Je sens son regard m'observer. Plongé dans ses pensées, il commence à paniquer soudainement. Il déballe alors un flot de paroles de manière rapide.

Visiblement, il pense que j'attend du monde, et qu'il dérange. Sans pouvoir m'en empêcher, j'ai un léger rire. Il y a quelques instants, c'est moi qui pensais déranger, bien que je l'ai gardé pour moi.
Il finit par s'excuser et reprend son souffle, l'air penaud. Je le laisse récupérer, puis décide de soulager ses craintes.

- Je n'attend personne, ne t'en fais pas. Moi aussi, j'étouffais dans le Terrier.

Bien que cela ne fait qu'un mois que je suis ici, j'ai rapidement pris l'habitude de nommer ainsi ma salle commune. Je l'ai surtout entendu de la bouche d'énormément d'élèves, et ce nom m'a tout de suite plu.

- J'ai commencer à écrire une histoire, il y a quelques temps. Mais j'ai vite laissé tombé. Je n'arrive déjà pas à m'occuper de ma propre vie, alors m'occuper de celle d'un personnage, ce n'est pas une tâche facile ! Dis-je en plaisantant.

Ma timidité semble s'être envolé, et, très honnêtement, cela fait du bien. Le vent commence à être un peu plus présent, faisant se mouvoir l'eau du lac. Malgré tout, ce vent reste agréable.

- Ce moment de l'année est, selon moi, le meilleur. Le soleil apporte la chaleur et le vent rend cette chaleur, parfois étouffante, agréable. Et les feuilles qui commence à vêtir les couleurs de l'automne, c'est magnifique aussi.

Alors que Caliban se rendait compte qu'il débitait un flot de paroles incessant et qu'il était probablement en train de se ridiculiser, la jeune fille esquissa un sourire et laissa échapper un petit rire léger. Mais à la grand surprise du jeune Serpentard, elle ne se moqua pas de lui, elle sembla plutôt apprécier qu'il ai eu l'impression de déranger.

*Le "terrier" ? Certainement la salle commune des Poufsouffle, il me semble que c'est comme ça que maman l'appelait quand elle m'en parlais. *

Un peu rassuré par le ton de Silver et ses réponses, Caliban garda une certaine distance mais s'assit également, c'était la première fois depuis son arrivée au château qu'il n'était pas mal à l'aise ou trop timide en présence de quelqu'un d'autre. Il la regarda et lui dit, un sourire au coin des lèvres :

- T'es à Poufsouffle, c'est ça ? Ma mère y a été, vous entrez vers les cuisines si je me souviens bien ! Ca doit être plus agréable que moi par les cachots...

*Zut. Est-ce que j'ai fait une bourde ? Si ça se trouve elle fait partie de ceux qui ne peuvent pas encadrer les Serpentards, je ne pourrais pas vraiment lui en vouloir d'ailleurs, et je viens de tout gâcher en un instant...

Faisant comme si de rien n'était mais toute trace de sourire effacé, il continua à parler en détournant son regard et en se mettant à observer la surface du lac.

- Si un jour tu finis une histoire pense à moi pour être ton premier lecteur, promis je suis bon public.

Sentant sa langue se délier, il enchaîna :

- C'est vrai que le temps est agréable. Ca me rappelle un peu chez moi, même si j'habite en Angleterre on est à la frontière avec l'Ecosse et je crois que les sorties en plein air c'est ce qui me manque le plus. On en faisait tout le temps avec mon père, et ma mère quand elle était à la maison.

Le vent fit trembler la surface de l'eau, un poisson cru qu'un insecte s'était posé et sorti sa tête pour essayer de le gober. Caliban ne put s'empêcher de rire en voyant cette situation et se rendit compte que toute trace de timidité s'était envolée.

Le garçon décide de s'asseoir à son tour. Un sourire vient se poser au coin de ses lèvres, avant qu'il ne prenne la parole.

*Les cachots ?*

Il me faut quelques secondes pour me souvenir que c'est dans cette partie du château que se trouve la salle commune des Serpentard.

- Les cuisines, exactement ! Je m'exclame.

Caliban tourne la tête pour observer la surface du lac. Je fais de même.

- Promis, j'y penserais.

Il enchaîne rapidement en parlant de ses parents, et des balades qu'il faisait avec eux. J'ai un pincement au cœur. Moi, on ne peut pas dire que j'ai eu la chance d'en faire, des balades avec mes géniteurs ! Ou même simplement faire quelque chose avec eux, en fait. Mais est-ce vraiment nécessaire de plomber l'ambiance, surtout maintenant que Caliban semble être plus à l'aise ?

J'esquisse donc un sourire, le plus vrai que je puisse faire. Un poisson sort de l'eau pour attraper un insecte inexistant, ce qui fait rire le sorcier. La famille a l'air d'être quelque chose d'important pour lui, et il semble être proche de la sienne.

- Moi j'habite à Londres, donc je sors pas beaucoup. Les rues sont trop bruyantes pour moi. Ma chambre, c'est nettement plus calme !

Un silence prend place durant quelques secondes. Je l'interromps.

- Hormis lire et te promener, tu fais quoi de ton temps libre ?

- Hormis lire et te promener, tu fais quoi de ton temps libre ?

*Comment lui dire que je n'ai jamais vraiment eu d'ami ? *

Caliban détourna le regard de la surface du lac et pris une grande inspiration.

- Tu sais, ma mère est très rarement à la maison, elle est herbologue et voyage très souvent un peu de partout. Elle était rentrée exprès pour m'emmener au train à la rentrée, mais elle est déjà repartie, et mon père répare des livres dans son atelier à la maison. Je crois que je suis le seul enfant sorcier de mon village, et j'ai jamais trop essayé de me faire des amis, en fait j'ai jamais trop été doué pour ça. Mais j'adorais explorer la forêt autour de chez moi. Donc pour te répondre, je dirai que la lecture m'a permis de m'évader de mon trou paumé et que les excursions m'ont fait le même effet. Mis à part ça, j'aime beaucoup m'occuper de plantes, je me suis fait une petite serre à côté de celle de ma mère. Oh, et la musique aussi ! Je joue un peu de guitare mais je l'ai pas prise avec moi donc je pense que d'ici les vacances j'aurai quasiment tout perdu. Il réfléchit un instant et rajouta : Et les animaux. Que ce soient des créatures magiques ou pas, j'adore les animaux.

Les yeux commençant à pétiller, il ajouta :

- La fois ou j'ai ramené un écureuil blessé et qu'il a rongé la moitié des livres de mon père dans la nuit je crois que s'il avait eu des pouvoirs il m'aurai incendié sur place !

S'arrêtant net, Caliban jeta un œil à Silver, redoutant sa réaction à l'annonce du fait qu'il était un sang-mêlé et que son père est un moldu. Après tout, tous les pro sang-pur ne sont pas à Serpentard...

A nouveau, j'ai un pincement au cœur. Il parle de sa famille avec énormément d'amour dans la voix. Je comprend rapidement qu'il est un sang-mêlé. Je ne suis pas certaine de savoir lequel de ses deux parents est moldu, avant de me souvenir qu'il a dit que sa mère était à Pousouffle.
Lorsqu'il évoque l'histoire de l'écureuil blessé, ses yeux se mettent à pétiller. Son amour pour les animaux est flagrant.

Il s'arrête net et me regarde, semblant attendre une réaction.

*Il attend que je parle de moi ?*

J'ouvre la bouche, prête à parler.

- Moi aussi je joue de la guitare ! C'est un peu un échappatoire. Je m'arrête, avant de reprendre. Mon oncle est botaniste, je passe quasiment toutes mes vacances là-bas. Lui aussi était à Poufsouffle !

J'évite volontairement de parler de mes parents. Je n'ai pas spécialement envie que Caliban s'apitoie sur mon sort alors qu'on vient de se rencontrer.

- La première fois que j'ai été là-bas, j'avais 4 ans. Je ne me souviens pas de grand chose, mais je sais que quand je suis arrivé, sa chienne m'a sauté dessus et j'ai fini au sol ! Je raconte.

A ce souvenir, je ne peux m'empêcher de rire. Après ça, j'avais peur de Neige. Il m'a fallu quelques temps, mais à force de venir chez mon oncle, j'ai compris que cette boule de poils était adorable, mais simplement un peu brusque. Elle suit toujours mon oncle partout, donnant parfois lieu a des situations assez amusantes.

Je tourne mon regard vers le lac, et bouge mes pieds. L'eau réagit immédiatement et créé des ondulations.

*Cool, oncle botaniste hein !*

Au moment ou la jeune fille évoqua son souvenir avec la chienne de son oncle, elle se mit à rire et Caliban compris qu'elle devait être très proche de lui. Il nota également qu'elle ne lui avais pas parlé de ses parents, bien qu'elle doive habiter avec eux puisqu'elle dit aller chez son oncle pour les vacances. Silver avait détourné la tête et jouait avec l'eau du bout des pieds.

*Elle doit avoir ses raisons de ne pas en parler, et puis après tout on vient de se rencontrer. Je suis le premier à ne rien dire et à tout garder pour moi, pourquoi je devrai attendre d'autres personnes qu'elles fassent l'inverse ?*

Caliban essaya de changer de sujet, tout en ne sachant pas trop quoi dire. *Merci le manque d'interactions sociales*

- J'ai toujours voulu avoir un chien, mais mes parents ont jamais voulu. Mes grands parents ont une ferme, ils habitent à la sortie du village, donc je passe aussi pas mal de temps chez eux et j'aide mon grand père à s'occuper des animaux. Il habite où ton oncle ? Si tu pars chez lui pendant les vacances ça doit te changer de Londres, ça doit être cool ! Moi du coup je ne pars jamais, à part pour venir à Poudlard je n'avais jamais été aussi loin de chez moi.

Il jeta un oeil à la jeune Poufsouffle et n'arrivait pas à croire que la première personne avec qui il arrivait à discuter au château, mis à part les professeurs (et encore, c'est compliqué !) soit une fille, qui plus est d'une autre maison. Il pensait sincèrement qu'il allait passer l'entièreté de sa scolarité seul dans un coin sombre, avec un bout de parchemin à la main et de l'encre sur les doigts. A cette pensée, le garçon se mit à sourire et se rendit compte qu'il se sentait bien aux côtés de Silver.