On m'avait parlé d'un endroit qui regorgeait de créatures magiques, l'enclos à bêtes tenue par monsieur Dawson pour son cours. J'avoue que j'étais profondément déçu de pas avoir le cours de monsieur Dawson avant deux ans. Voilà un cours qui m'intéresse, ça c'est des choses sympa et ça change de la théorie barbante qu'on nous apprends en histoire de la magie par exemple. J'adorais m'occuper des animaux. A la maison, c'est moi qui faisait la toilette de Neptune, qui lui donnait à manger, qui le sortait. Je le traitais comme un roi. Mes parents, ils étaient trop fatigués pour le faire en rentrant du boulot. C'était déjà une chance qu'ils aient accepté de le prendre.

J'imagine que les bêtes magiques, c'était un peu comme les animaux communs, fallait bien prendre soin d'eux, savoir comment les nourrir et avec quoi. Ça devait grave être intéressant. Je voulais aussi en savoir plus sur les caractéristiques magiques de chacun aussi. On m'avait dit par exemple que certaines espèces d'oiseaux produisait des sons seulement à leur mort, et ce son, c'était un long cri constitué de tous les sons qu'il a entendu au cours de sa vie. C'était très curieux comme chose mais ça me fascinait.

J'étais sur les lieux et je voyais les enclos d'ici. J'avais décidé de m'approcher du premier enclos. En pointant mon nez, j'observais à l'intérieur de petites bêtes très poilus qui ressemblaient comme deux gouttes d'eau à des ornithorynques mélangés à des taupes. Je regarde la pancarte de l'enclos. Il y avait écrit Niffleurs. C'était sûrement l'espèce de ses deux petites créatures incroyablement mignonnes. J'aurais pu mourir pour elles. Je m'agenouille donc, complètement attendri par les deux petites choses qui commençait à me regarder avec des gros yeux. J'essayais de les attirer à travers la barrière en leur faisant un petit.

— Psssst !

Les deux petits niffleurs se levèrent directement pour s'approcher, il fallait croire que j'attirais leur attention. Je passais un moment à les regarder. Pour une créature magique, je me demandais bien qu'elles étaient leurs caractéristiques.

— Approchez tous les deux. Je vais pas vous faire de mal. Moi c'est Nico.

Et tendrement presque, j'essaye de passer une main pour pouvoir en toucher un, en leur faisant comprendre que je n'étais pas là pour les menacer. Peut-être imprudent de ma part, mais je les sentais vraiment inoffensifs

Ce n’était pas la première fois qu’Ernest se rendait dans la zone des cours de Soins aux créatures magiques pour observer les pensionnaires de l’enclos. S’il n’avait pas encore le niveau pour suivre ces cours, cela ne l’empêchait pas de s’intéresser à toutes sortes de créatures magiques. C’était d’ailleurs ici qu’il avait vu des hippogriffes pour la première fois. Autant vous dire qu’il avait hâte d’être en troisième année pour suivre cette matière. Alors quand il avait terminé ses devoirs, c’était comme une petite récompense qu’il s’accordait. Ça lui permettait de se vider l’esprit et puis il fallait se rendre à l’évidence, Ernest était plus à l’aise avec les bêtes qu’avec les hommes.

Et le choix des endroits où il traînait sa robe n’était pas tout à fait anodin. L’adolescent évitant les lieux bondés et privilégiait les heures où il ne risquait pas de croiser grand monde. C’était le cas de la serre de botanique dédiée aux élèves mais également de la zone de Soins aux créatures magiques. À cette époque de l’année, les élèves ne se montraient pas encore trop téméraires face aux températures, ce qui laissait au brun une certaine marge de manœuvre dans il décidait de se rendre à l’extérieur. Ce n’était pas qu’il n’aimait pas les gens. Au contraire, il avait plutôt l’impression que les gens ne pouvaient pas l’aimer. La faute à des grands parents bien trop sectaires et intolérants.

En arrivant près de l’enclos, il s'aperçut qu’il n’était pas le seul à avoir eu cette idée. Bien sûr, les créatures magiques présentaient un certain attrait pour les élèves. Particulièrement pour les enfants pour lesquels le monde magique était une découverte. Si Ernest avait toujours été bercé par la magie, il vivait dans une grande ville et dans un quartier ou sorciers et moldus se cotoyaient. Alors les animaux fantastiques, il ne les connaissait pour la plupart que dans ses bouquins. Il hésita à repartir mais la curiosité le piqua. Un peu à l’écart, il observait le garçon qui se trouvait face à l’enclos.

Il observa le manège entre l’élève et les niffleurs, se demandant s’il arriverait à les amadouer. Lui n’aurait pas pris l’initiative de passer les mains à travers l’enclos mais les taupinettes n’étaient pas connues pour être particulièrement agressives. Du moins, pas si on essayait pas de leur voler leurs trésors. Il s’approcha doucement et s'accroupit à côté du rouquin, lui tendant une noise qu’il avait récupéré dans l’une de ses poches.

“Essaie avec ça… Succès garanti.”

Bien que j'arrivais à attirer l'attention des petites bêtes, celles ci semblaient encore ne pas avoir très envie de me rejoindre. Oh, je fais si peur que ça ? Pourtant je veux juste vous caresser petite bêtes ! Je regarde l'une d'entre elles avec une moue un peu déçue tandis que je m'efforce tout de même de continuer à les appâter comme je le pouvais. C'était quand même plus simple avec un chien, on avait qu'à lui offrir un joujou ou une friandise pour qu'il vous traite comme un roi. Alors que j'essayais toutes les méthodes pour qu'ils me rejoignent, je sentis soudainement une présence qui s'approcha de moi, une présence qui me présenta bien vite un mornille, une pièce sorcière. Tournant la tête pour l'observer, c'était un élève, un petit Serpentard que je n'avais jamais eu l'occasion de voir. Faut dire que je connaissais pas tout le monde non plus, déjà que j'avais du mal à retenir ceux de ma maison. Je regarde sa pièce un peu dubitatif. En quoi sa pièce allait m'aider à quoi que ce soit ? C'est pas comme si ces petites taupes avaient des problèmes d'argent non ? C'était des animaux.

Je me décide tout de même à tenter le coup, récupérant la mornille qu'il me tendait en hochant la tête. Un peu méfiant de ce que j'allais faire, je passe la main à nouveau en tendant la pièce vers les petites boules de poils griffues. C'était n'importe quoi, j'étais sûr que ça allait pas marcher. D'un coup, les deux se relevèrent, les yeux emplie d'envie. Les miens en attendant s'écarquillent tandis que je les vois peu à peu s'approcher de ma main. Jetant un regard médusé à mon coéquipier, je n'en revenais clairement pas mes oreilles, laissant exprimer joyeusement mais calmement ma surprise.

— Hey mais t'avais raison ! Ça marche !

Je sens un grand sourire s'étendre sur mon visage. Je sais pas par quelle magie ça fonctionnait, mais les deux animaux avaient l'air particulièrement intéressé par ce que je leur tendais. Un peu trop même puisqu'un des deux sauta sur ma main en un éclair pour attraper la pièce. Un petit cri de surprise s'échappa de ma gorge tandis que je laissais rouler la pièce malheureusement perdu dans l'effort. Et sans que j'ai le temps de dire quoi que ce soit, les deux boules de poils commençaient déjà à se sauter l'un sur l'autre pour se disputer la fameuse mornille.

— Pas la peine de vous battre tous les deux, c'est qu'une pièce ! Mes mots faisaient autant d'effet qu'un tourbillon dans un verre d'eau. Laissant échapper un petit rire, mon regard amusé se tourne vers le Serpentard. On dirait deux Poufsouffles qui veulent gratter le dernière dessert de la table, je te jure. Mais d'ailleurs je savais pas qui il était lui. Moi c'est Nico, Nico Ferrell. Tu t'appelles comment toi ?

Tandis que j'offrais un sourire amical à mon acolyte du jour, je regardais les deux animaux continuer à se battre. Un peu plus et ils allaient s'arracher les poils !

Ernest avait observé l’autre garçon dans ses tentatives jusque-là infructueuses. Le bouclé se tenait là seul, accroupi près de l’enclos. Mis à part l’idée de passer sa main à travers, cela aurait tout à fait pu être Ernest. Ce qui le faisait sympathiser d’une certaine manière. C’était probablement ce qui l’avait poussé à s’approcher et à faire le premier pas. Ce qui était loin d’être dans ses habitudes. Le garçon lui adressa une mine perplexe quand il tendit sa petite mornille. On n'achetait pas grand chose avec ça dans le monde magique mais ce serait probablement suffisant pour attirer l’attention des niffleurs.

Un léger sourire aux lèvres, Ernest observa l’autre adolescent tenter l’expérience sans grande conviction. Il avait pourtant vu juste. Les deux petites créatures s’étaient focalisées sur la mornille de manière quasi-instantanée. L’adolescent éprouva une pointe de satisfaction en voyant l’air étonné de son camarade. Ernst se contenta d’hocher la tête à l’exclamation du blondinet. Bien sûr que ça avait marché.

“Ils adorent tout ce qui brillent… les choses précieuses.”

Il se demanda un instant si c’était la raison qui les poussait à manger des cétoines. S’il les confondaient avec des pierres précieuses. Où s’ils aimaient simplement leur couleur qui était plutôt attrayante. Il se nota mentalement d’essayer à l’occasion de leur en proposer. Enfin pour ça, il faudrait déjà qu’il arrive à en attraper. Il n’était pas sûr d’en avoir déjà vu dans le parc de Poudlard et puis les insectes ne se montraient pas tellement à cette époque de l’année. Il faudrait qu’il attende que les températures remontent un peu et que la végétation soit un peu plus luxuriante.
Ernest eut un petit mouvement de recul quand l’adolescent qui se tenait à côté de lui poussa un léger cri de surprise. Il ne s’y était pas attendu mais c’est vrai que le niffleur n’avait fait qu’un bon sur la main du gamin pour lui chipper sa pièce. C’était marrant la manière dont le blond s’adressait aux créatures. Ernest faisait également ce genre de choses. Avec les insectes, les plantes, les animaux. Mais il se retenait de le faire en public. Ça n’avait pas l’air de gêner l’autre garçon le moins du monde. Un nouveau sourire se dessina sur ses lèvres quand il entendit la blague sur les Poufsouffle.

L’élève ne devait donc pas faire partie de cette maison. Il espéra un instant que ce ne soit pas un Gryffondor. Si la compétition entre Serpentard et Gryffondor était probablement aussi vieille que Poudlard elle-même, Ernest avait ses propres griefs contre les élèves rouge et or. La question lui brûlait les lèvres. Il crut un instant que le garçon annoncerait sa maison alors qu’il se présentait. La plupart des élèves de l’école avaient ce réflexe. Nom, prénom, maison. Parfois l’année. À en déduire par sa taille et son physique, le petit blond ne devait pas être beaucoup plus âgé qu’Ernest. Peut-être même plus jeune. Le brun était arrivé à Poudlard la veille de ses douze ans. C’est ce qui arrivait quand on était né après la rentrée.

“Ernest Stevens… T’es pas chez Poufsouffle si je devais deviner… t’es en première année ?”

Ernest partageait ses cours avec tous les premières années des autres maisons. Il commençait à reconnaître certains visages. Les élèves qui se faisaient plus remarquer que les autres mais il n’arrivait pas à situer le blondinet.

Alors que je continuais à regarder les deux petites bêtes se battre comme des acharnées pour la mornille que je venais leur lancer, j'étais assez étonné de voir leur comportement face à si peu. Après, je connaissais pas vraiment ces petites bêtes, faut dire que mon monde s'arrêtait à celui des moldus et qu'à part ressembler à ce que je connaissais déjà, je savais pas vraiment ce qui pouvait leur plaire. Mais d'ailleurs, le brun qui était avec moi m'éclairait un peu sur le sujet. Alors comme ça, elles aimaient particulièrement ce qui brillaient.

— Oh je vois .. mais ça leur sert à quoi ? Elles font quoi avec ça ? Je suis pas sûr qu'il y a des distributeurs de bonbons pour niffleurs par exemple .. mais en tout cas, c'est marrant !

J'esquisse un sourire amusé en regardant les deux petits chamailleurs. Fallait imaginer tout un trésor, ça devait être le paradis pour eux si ils aimaient ça. C'était quand même assez particulier comme caractéristique d'être un animal qui adore tout ce qui brille. Mais bon, j'avais bien vu un saule qui kiffait particulièrement se bagarrer donc je pouvais absolument m'attendre à tout à Poudlard. D'ailleurs, le brun semblait lui aussi curieux de la maison à laquelle je pouvais appartenir. J'esquisse un sourire, ouais rien pouvait montrer que j'étais un bleu. J'étais loin de correspondre à tous les clichés de la maison et fallait dire que j'avais tout fait pour en sortir, mais bon fallait se faire une raison au bout d'un moment et puis peut-être que l'année prochaine, ils pourront me changer.

— Enchanté Ernest ! Et non, je suis pas Poufsouffle .. malheureusement en vrai. Je suis Serdaigle. Après un petit blanc je reprends très vite. Oui bon je sais que ça se voit pas mais faut que je fasse avec. Et toi, t'es quoi ? Attends, je vais deviner .. Brun, le teint un peu sombre, muet, ouais pas besoin de choixpeau pour savoir. .. t'es Serpentard ça se voit.

J'esquisse un sourire amusé, bon je le taquinais un peu et je savais que ça marchait pas comme ça j'en étais la preuve vivante mais fallait pas mentir que les Serpentards se la jouaient souvent soit dark ninja du dernier manga en vogue ou blond, blonde aux yeux bleus qui prenaient les autres pour je sais pas quoi.

— T'es content de ta maison toi ? Tu t'entends bien avec les gens ?

Là j'entends un gros bruit venir de l'enclos. L'un des deux niffleurs venait de s'emparer de la fameuse pièce, mon sourire s'étend. Enfin, après 5 minutes de combat. M'adressant au perdant, je joue un peu l'instructeur.

— C'est bon, il a gagné, lâche l'affaire !

Le niffleur se relève, en me regardant d'un air un peu circonspect, sa tête bougeant d'un coté puis d'un autre, avant de foncer à nouveau sur son congénère pour essayer de piquer la pièce. Je souffle, incorrigibles ces deux là, fallait juste espérer qu'ils se calment.

Ernest haussa les épaules. C’était presque un réflexe chez lui. Même quand il avait les réponses aux questions qu’on lui posait. Peut-être une manière pour l’adolescent de temporiser. C’est ce qu’on lui avait toujours appris. Faire attention à ses paroles, à ses actes. C’était le lot des familles mixtes et des sorciers qui vivaient à proximité de moldus. C’était la condition sinequanone de leur mode de vie. Un équilibre à maintenir, coûte que coûte. Mais c’était ce qu’il avait toujours connu et il avait fait avec. Ernest avait toujours été en position de devoir cacher une partie de lui. La partie sorcière au moldus, la partie moldue aux sorciers. Il avançait sur le fil qui séparait les deux, tel un funambule en équilibre.

“Ils n’en font rien. Ils les stockent ou les cachent. Un peu comme un écureuil si tu veux.”

Les écureuils, tout le monde connaissait. L’adolescent posa un instant son regard clair sur l’autre garçon. Il se demanda si sa méconnaissance des niffleurs - qui était pourtant présents dans de nombreuses aventures de la littérature de jeunesse sorcière, indiquait d’une manière ou d’une autre l’origine de Nico. Mais il s’abstiendrait de poser la moindre question. Sa mère aurait probablement qualifié ça d’impoli et puis Ernest n’avait pas particulièrement envie qu’on s’intéresse de plus près à ses propres origines. Il n’était pas près à faire face à toutes ces questions encore sans réponses.

Ernest fronça les sourcils à la réponse du blondinet. Nico ne semblait pas convaincu par le chemin que le Choixpeau lui avait fait prendre. Ce qui, dans une certaine mesure, le rassura un peu même s’il serait bien incapable de l’admettre. Il voulait être envoyé à Serpentard. Il voulait être comme les autres. Comme le reste de sa famille. Cette famille qui avait pourtant renié sa mère, et lui pas la même occasion. Mais dans son fort intérieur, il espérait que s’il suivait le même chemin, s’il montrait à quel point il pouvait être similaire, peut-être qu’il pourrait être accepté. Mais les sentiments de l’adolescence étaient ambivalents. Le garçon arrivait à un âge où on refusait les étiquettes, où on cherchait à se différencier tout en désirant ardemment l’acceptation des autres.

“Pourquoi malheureusement ? C’est pas bien Serdaigle ?”

Une nouvelle moue se dessina sur son visage alors que le Serdaigle annonçait la couleur. Ernest baissa le regard sur lui, essayant de savoir ce qui pouvait bien définir le Serpentard type. Car lui n’avait absolument pas l’impression de correspondre aux canons du genre. Tous les plus âgés, ces garçons nés-sorciers, grands, fiers et imposants. Il faisait pâle figure à côté d’eux. Bien sûr, ce n’était pas le cas de tous les garçons de Serpentard, mais c’était ceux-là qu’Ernest voyait.

“Pourquoi tu dis ça ? Tu vois ça à quoi ?”

Son regard se perdit quelques instants sur l’enclos alors que le petit Serdaigle mettait le doigt sur un point sensible. Ernest était-il content de sa maison ? Était-elle tout ce qu’il avait imaginé en arrivant à Poudlard ? Après six mois passés dans les cachots, il aurait pu avoir un avis sur la question. Mais il préférait mieux ne pas se la poser. C’était comme ça. La répartition avait été faite. Ce n’était pas comme s’il pouvait changer. Alors autant ne pas s’encombrer l’esprit de ce genre de ruminations.

“Euhm.. je… ils sont… corrects… la plupart… enfin j’imagine…”

Mis à part les autres premières années, il n’avait pas eu beaucoup d’interactions avec les élèves de sa maison. Ernest passait le plus clair de son temps seul. Bien sûr, il avait des compagnons de chambrée avec qui la cohabitation n’était pas si mauvaise. Disons que ça aurait pu être pire. Mais il ne pouvait pas honnêtement dire qu’il s’était lié d’amitié avec qui que ce soit. Il y avait bien l’un ou l’autre élève qui se détachait du lot, avec qui il se sentait moins mal à l’aise. Mais il n’était pas doué pour tisser des liens.

“Et toi ? T’aurais préféré être à Poufsouffle ?”

C’est qu’il y avait pensé. Les Poufsouffle avait la réputation d’être des gens tolérants et plein de compassion. Un peu comme Lucy, sa mère moldue. Mais ce n’était pas parce qu’on souhaitait être entouré de ce genre de personne qu’on l’était soi-même. Ernest avait un caractère particulier. Un caractère qui l’avait mené à Serpentard, quoi qu’on en dise.

@Nico Ferrell

Donc les Niffleurs étaient comme des écureuils qui cachaient les objets brillants et les accumulaient. Je me gratte la tête, c'était quand même particulier. Mais au moins, ça pouvait signifier pas mal de choses. Tiens, tiens, Nico, t'es pas le moins malin de tous. Je me tourne vers Ernest avec une petite idée dans la caboche.

— Dis Ernest .. vu que tu me dis qu'ils accumulent les richesses qu'ils trouvent, ça te dirait pas de parti à la chasse à la tanière de Niffleur ? C'est un coup à devenir riche !

J'esquisse un sourire fier et amusé, lui lançant un clin d'oeil. J'étais sûr qu'il y avait assez de tanières pour qu'on aie assez d'argent tous les deux jusqu'à en plus pouvoir. Et ça devait sûrement l'intéresser le petit Serpentard, qui dirait non ? D'ailleurs en parlant de maison, le brun semblait curieux de savoir pourquoi j'avais l'air si peu enthousiaste de ma maison. A croire que tout le monde kiffait dans quoi il était tombé. Comment c'était possible d'ailleurs ? Comment tout le monde pouvait se sentir bien là où il était tombé. Je souffle un coup, exaspéré, me laissant tomber fesses les premières contre la cage des petites boules de poils avares.

— Bah c'est Serdaigle quoi .. tout le monde a le nez dans ses bouquins, ils veulent tous être premier de la classe, se faire bien voir par les profs et faire les fayots, il y a personne qui est un peu fun là-dedans. A part des rares exceptions. Je suis pas comme ça moi et la théorie, les bouquins, ça m'intéresse pas. La majorité des cours m'ennuient.

D'ailleurs, il était assez étonné que je puisse deviner assez facilement qu'il était Serpentard. En même temps fallait pas se voiler la face quand on regardait le brun, il était un peu le stéréotype même du Serpentard.

— Le coté brun, un peu dark en mode je m'assois sur un banc tout seul à la récré pour dire des trucs mystérieux en japonais, le coté un peu froid, ça fait très Serpentard ça ! Après pour l'instant, t'es plutôt cool si ça peut te rassurer.

Ouais, au moins il avait pas gardé le coté supérieur et mieux que tout le monde que les Serpentard pouvait avoir. Ou la méchanceté gratuite de certains. J'esquisse un sourire taquin, je grossissais un peu le trait, mais c'était gentil, juste pour le mettre plus à l'aise. D'ailleurs, sa réponse à lui trahissait un peu ce que je pensais.

— Je suis pas le seul à pas réussir à m'entendre avec ma maison à ce que je vois. J'esquisse un sourire. C'est quoi le problème, toi aussi tu les trouves pas intéressants ? Tu peux me dire t'inquiète.

Je lui lance un clin d'oeil, c'est sûrement pas moi qui allait le juger vu comment je parlais de mes camarades. D'ailleurs, il me demandait si j'aurais préféré être à Poufsouffle.

— Faut dire qu'ils sont plus sympa, même si les Gryffondor sont plutôt classes et ils sont moins prises de tête, je me verrais mieux là-bas ouais. Et si tu devais choisir une autre maison toi ?

J'étais quand même curieux de savoir où il se mettait. Je l'aurais bien vu en Serdaigle, ça a l'air d'être le genre sérieux qui bosse dur mais bon, peut-être que je me trompais et que c'était un vrai cancre.

Ernest haussa un sourcil face à la proposition de Nico. Ce n’était pas dénué de logique. Et puis il pourrait récupérer sa mornille. Et peut-être d’autres. Mais quelles étaient les chances que les Niffleurs de l’école arrivent à mettre la main sur un véritable trésor ? Le regard concentré, il balaya l’enclos du regard. L’idée était tentante.

“Je… Probablement que le professeur de Soins aux créatures magiques y aurait déjà pensé, non ? Et puis je crois pas que ce soit très bien vu d’entrer dans les enclos… enfin.. c’est interdit en fait…”

Ernest, ou la prudence même. C’était surtout qu’il ne voulait pas se faire remarquer. Il imaginait déjà la tête de sa mère si elle recevait un hibou lui décrivant comment son fils était entré par effraction dans un enclos du parc. Et tout ça pour une poignée de mornilles ? Il voyait déjà la beuglante venir… Étonné, il observa le Serdaigle se laisser tomber les fesses les premières. Nico semblait plus dépité que ne l’aurait cru l’adolescent. Il écouta son explication avec attention, baissant le regard sur le sol. Ce que décrivait le blondinet était une bonne description d’Ernest. Mis à part pour la partie fayot. Il était bien trop timide et impressionné par ses professeurs pour oser leur adresser la parole sans qu’on le lui demande. Enfin, il y avait bien le Professeur Charleston qui avait repris les cours de Botanique avec qui il se sentait un peu plus à l’aise.

“Il y a des cours sympas quand même… les sortilèges… ou la Défense contre les forces du mal…”

Il s’abstint de faire le moindre commentaires sur tous les livres qu’il avait déjà emprunté à la bibliothèque et qu’il avait trouvé passionnants. Il les dévorait, littéralement. Ernest savait qu’il n’était pas “fun”. Et comme ses centres d’intérêts correspondaient assez à ce que Nico décrivait de la maison Serdaigle, il fut encore plus surpris d’entendre le blond lui dresser le stéréotype du parfait Serpentard qu'il semblait incarner.

“Je sais pas lire le japonais…”

Mais c’est vrai qu’il était plutôt solitaire. Il préférait penser que c’était par choix plutôt que de se dire qu’il était incapable de s’intégrer. Il releva la tête vers Nico lorsque ce dernier lui dit le trouver plutôt cool. Un léger sourire se dessina au coin de ses lèvres et ses joues rosirent légèrement. Ernest ne savait pas prendre les compliments. Une nouvelle moue se dessina sur son visage.

“Nan… enfin… c’est pas qu’ils sont pas intéressants… enfin… j’en sais rien en réalité… je leur parle pas beaucoup…”

Parce qu’il n’était pas doué pour la communication mais également parce que la maison Serpentard était réputée pour être servie de né-sorcier et d’une quantité de Sang-Pur extraordinaire. Peut-être n’y en avait-il pas plus que dans les autres maisons, Ernest n’en savait rien. Mais les Serpentards l’affichaient bien plus volontiers. Il pensa particulièrement à Lavinia qui s’était fait la mission de découvrir le statut d’à peu près tous ses camarades de classe.

“Serdaigle ou Poufsouffle, ça l’aurait fait aussi… Tant que c’était pas à Gryffondor…”

L’adolescent avait eu quelques contentions avec des élèves de Gryffondor et même s’il savait qu’on ne pouvait pas faire du cas de quelques élèves une généralité, il avait commencé à nourrir à leur encontre un certain mépris. Pas tous, évidemment. Mais l’idée était là. Leur fierté et leur côté jacasseur l’exaspérait profondément.

“Le Choixpeau t’a parlé pendant que tu l’avais sur la tête ?”

Il avait lu beaucoup d’histoire à ce propos et lui-même avait entendu le monologue du Choixpeau siffler à ses oreilles mais il était curieux de savoir comment ça s’était passé pour quelqu’un d’autres. Avoir un vrai ressenti.

Je souffle, de toute façon ça servait à rien d'essayer d'entrer dans l'enclos. J'avais déjà essayé et c'était impossible d'ouvrir ces cages là. Peut-être que monsieur Dawson avait lancé un sort ou quelque chose car même en forçant, rien n'y faisait. Mais j'étais sûr d'autre chose.

— Oublie l'enclos Ernest ! Je suis sûr que c'est pas les seuls Niffleurs du coin non ? Doit y en avoir à Poudlard ?

Après tout, c'était pas moi le studieux ici, c'était lui, alors au moins il pourrait me dire où ça vivait et peut-être que je me trompais totalement et qu'il y en avait aucun qui vivait dans ce type d'environnement. Mais bon ça coutait rien de chercher. Lorsqu'il évoqua les différentes matières qui lui semblait intéressante, ma tête se releva.

— Les sortilèges, c'est mon cours préféré, même si il y a beaucoup de théorie ennuyante. Mais Miss Priddy est grave stylée. Un jour, elle m'a même montré comment faire un sortilège pour réussir mieux mes farces !

Je la kiffais trop et c'est pour ça que je faisais en sorte d'écouter un minimum durant ces cours, mais bon, au final, j'avais toujours du mal avec la théorie même si j'essayais de bien faire dans son cours.

— Par contre Miss Valerion ... je marque une pause en affichant une moue .. elle m'fait peur. J'ose rien faire pendant son cours, du coup j'écoute, mais bon c'est juste que je suis obligé. Après la pratique, ça me plait mais elle me donne pas envie de m'intéresser. Puis je suis sûr qu'elle maltraite des élèves .. dans les cachots tu sais. Une fois elle a même fait disparaitre mes cheveux ! Tu te rappelles ? Je suis sûr qu'elle peut faire pire, on fait pas des choses comme ça.

Ouais, ça craignait, et même si j'avais rien dis ce jour là, je trouvais ses méthodes un peu spéciales. Bon j'exagérais un peu pour les cachots, mais venant d'elle, ça m'aurait presque pas étonné. Je me relève un coup, en regardant le Serpentard tandis qu'il avouait pas savoir lire le japonais. Je rigole un coup en esquissant un sourire avant de le taquiner en lui poussant amicalement l'épaule.

— Je savais pas que les Serpentards étaient drôles !

Mais j'avais pas totalement tort quand je disais que c'était le genre solitaire vu que le brun me disait qu'il parlait quasi à personne. Comme quoi j'ai du flair, le flair Ferrell et je me trompais rarement sur les gens.

— Comme quoi, le choixpeau nous a peut-être inversé ! Après, j'en ai déjà parlé à Monsieur Dawson, mais il est convaincu que je suis à ma place. Mais bon, je comprends que les Serpentards t'intéressent pas .. il y a quelque chose en toi de .. différent.

J'esquisse un sourire. Faut dire que il me donnait une bonne vibe malgré son coté un peu renfermé. J'étais sûr qu'il était plus sympa que tous ses camarades. Enfin, on verra bien. Mais je comprenais pas bien pourquoi il voulait pas aller chez Gryffondor, perso, c'était mon rêve.

— Pourquoi pas Gryffondor, ils t'ont fait quoi ?

J'esquisse un sourire amusé. J'en connaissais un qui s'était fait un ennemi Gryffondor. Après, c'est normal, c'était un Serpentard, il parait que les deux maisons se détestent. Je trouve ça un peu puéril au final, puis ça a pas vraiment de sens. Mais bon, c'était marrant à voir.

— Euh, je crois pas. Bizarrement il m'a directement envoyé chez Serdaigle, il y a pas eu de réflexion. Pourtant dans ma tête je pensais Gryffondor. C'est pour ça que je suis sûr qu'il s'est trompé. Et toi alors il t'a parlé ?

D'ailleurs, ça avait été plutôt bizarre comme expérience, d'entendre un truc comme ça te parler dans les oreilles, heureusement que moi ça avait été rapide, mais ceux avant moi avait du l'entendre siffler dans leurs oreilles pendant de longues secondes, heureusement j'avais échappé à ça, pfiou.

Ernest baissa une nouvelle fois le regard vers le sol et les niffleurs qui étaient toujours en pleine guerre de mornille. Nico montrait un caractère intrépide. Ce qui manquait cruellement à Ernest. Les seuls moments où il se montrait impulsif et aventureux, c’était quand il tentait de dépasser les limites de ses pratiques magiques. Mais cela arrivait quand il était seul, et à l’abri des regards. Pas dans ses échanges sociaux.

“J’ai jamais entendu parler de ça… J’veux dire… y a bien la forêt interdite mais… elle est interdite… et puis faudrait traverser le Lac Noir… Y a des trucs dans le Lac Noir… on voit parfois des ombres depuis les fenêtres des cachots…”

Il n’avait cependant jamais aperçu le calamar géant mais il ne perdait pas espoir. Mais entre apercevoir une créature derrière une baie vitrée et se retrouver réellement confrontée à elle, il y avait un monde. Et puis Ernest n’était pas très bon nageur. Il esquissa un sourire quand le petit blond exclama son enthousiasme pour les cours de sortilèges. En même temps, il n’avait encore rencontré personne qui n’aimait pas les cours de Miss Priddy. Enfin… il n’avait pas rencontré grand monde alors ce n’était peut-être pas très objectif. Mais qui n’aimait pas la magie, sérieusement ? Il leva un sourcil en entendant Nico lui raconter que miss Priddy lui avait elle-même appris quelques tours. Ses dents se serrèrent légèrement. Un brin de jalousie, peut-être ?

“J’ai bien aimé fabriquer les nichoirs. Ce qui est cool dans ce genre de cours, c’est de mettre les sortilèges en pratique pour de vrais trucs de la vraie vie…”

C’était son exercice préféré et il ne manquait jamais d’imagination pour trouver de nouvelles applications aux sortilèges qu’ils apprenaient. Ceux des cours de Sortilèges et de Métamorphoses étaient parfait pour ce genre d’expérience. Il était plus difficile de trouver des sujets sur lesquels s’entraîner à jeter des sortilèges de Défense contre les forces du mal, forcément… Le regard de l’adolescent s’assombrit quand il entendit le ton sur lequel le Serdaigle avait prononcé le nom de sa directrice de maison.

“Qu’est-ce qu’elle a Miss Valerion ?”

Un peu sur la défensive, le petit brun n’était pas d’accord avec son acolyte du jour. D’accord, c’est vrai qu’elle faisait un peu peur. Enfin elle était très intimidante. Mais ses cours étaient toujours dynamiques et passionnants. L’un des seuls où il faisait en sorte d’être dans les premiers rangs pour ne pas en louper une miette. À mesure que le blond parlait, les sourcils d’Ernest se fronçaient. Si le garçon n’avait pas encore trouvé sa place au sein de sa maison, ce n’était pas pour autant qu’il n’y dévouait pas son allégeance. Depuis l’instant où le Choixpeau avait pris sa décision. Il doutait de lui, pas des Serpentards.

“C’est n’importe quoi ce que tu racontes ! Pourquoi elle t’aurait pris comme bouclier humain ?”

Aucun Serpentard n’était maltraité dans les cachots. Enfin… pas à sa connaissance… Cependant, l’adolescent ne savait pas trop quoi penser du témoignage du Serdaigle. Un bouclier humain ? Ça semblait peu probable. Miss Valerion était une sorcière puissante. Elle n’avait même pas besoin de prononcer les incantations à voix haute pour lancer des sortilèges. Elle aurait trouvé plus efficace qu’un petit élève de première année. Aucun doute la dessus… enfin… elle l’avait aussi menacé de prendre ses yeux pour mettre dans son café. Mais ça, c’était juste une menace… Probablement.

Nouveau sujet fâcheux, le rapport qu’Ernest entretenait avec les Gryffondor. Enfin pas tous, seulement les trois idiots qui se payaient sa tête en cours de vol. Et pui l’’incident avec Thom Wright n’avait clairement pas amélioré les choses. L’adolescent se rendait toujours sur le terrain d’entraînement la boule au ventre et ce n’était pas uniquement son aversion pour la pratique. Il essayait de ne pas faire attention aux regards menaçants et aux messes basses, mais il savait qu’elles étaient là.

“Rien. C’est juste pas ma maison préférée.”

Il ne tomberait pas dans le cliché. Il ne laisserait pas cette boule familière s’installer au creux de son ventre. Pas aujourd’hui. Il fut néanmoins étonné d’apprendre que le Choixpeau avait pris sa décision au moment où Nico l’avait posé sur sa tête. C’est qu’il devait être vraiment sûr pour pas avoir besoin de réfléchir. Ernest lui se rappelait les paroles du Choixpeau comme si c’était hier. À peine arrivé à Poudlard et déjà l’ombre de sa mère et de cette famille qu’il ne connaissait pas avait plané sur lui.

“Il m’a dit quelques trucs… mais… enfin… Serpentard, c’est ce que j’ai demandé…”

Il l’avait espéré en tout cas. Pour ne pas être différent des siens. Pour essayer de rentrer dans le moule. Un moule carré alors qu’il était bel et bien rond. Mais peut-être qu’en forçant un peu…