Lundi 13 avril, fin de matinée
@Alienor Delphillia

Les vacances étaient terminées. Côté positif, cette année, le Poudlard Express était rentré sans encombre jusqu'à l'école. De retour dans ce cadre désormais familier et le stress de ce voyage derrière elle, Sarah, qui avait largement profité de ses congés pour se reposer, tâchait de se mettre à jour. Après quelques préparations théoriques à son bureau, il lui restait donc à vérifier l'état du petit matériel. Où étaient rangé les boîtes à secret ?

La sorcière ouvrit la porte du meuble ensorcelé et plongea littéralement le buste entre les étagères, parlant à haute voix pour elle même. Quelques instants plus tard, elle se redressa, tirant entre ses avant-bras de nombreuses boîtes en bois, sculptées ou ornées de jolies peintures. Un bruit, dans son dos attira vaguement son attention et, songeant que quelqu'un venait peut-être lui rendre visite, elle reprit la parole toujours concentrée sur son placard.

" Un instant, j'ai presque terminé. "

Plongée dans son armoire, elle ne vit donc pas l'ombre étrange qui prenait forme sur sa droite. Quand elle se retourna, une femme châtain foncé, mesurant exactement sa taille, avec un visage pâle et des yeux sombres la regardait. Sarah ne m'y qu'un court instant à reconnaître son propre reflet. Un reflet étrange cependant avec des traits plus durs et un regard haineux. Son double maléfique portait une robe qu'elle n'avait pas mis ni vu depuis bien longtemps et pour cause, elle était resté quelque part, sur un autre continent. Sarah sentit un frisson lui glisser le long de l'échine et, par reflexe, fit un pas en arrière en sortant sa baguette avant de parcourir la salle de classe du regard. Qui donc s'amusait de la sorte ?

L'intruse s'arma également en réponse, sortant de sa manche une baguette que la Galloise n'avait pas revue depuis de longues années. L'enseignante quelque peu décontenancée déglutit sentant la panique monter tout en trouvant cette réaction totalement ridicule. Un sentiment de colère monta soudain, surpassant tout le reste. Qui donc lui fausait cette farce de mauvais goût ?

" Qui êtes vous ? " lança t'elle en direction de cet étrange miroir en pointant sa baguette clairement décidé a mettre fin à cette vulgaire farce au plus vite.

Premier jour de la rentrée et Aliénor profitait d’une matinée libre. Elle en avait profité pour aller courir ce matin, prendre un petit déjeuner frugal et en cette fin de matinée, elle souhaitait aller voir sa professeure de sortilèges pour évaluer sa progression grâce aux cours particuliers et la remercier également en lui offrant cette boite de friandises typique de Bristol : des rock cakes qui accompagnaient très bien les thés chez elle. Elle espérait que cela ferait plaisir à sa professeure. Elle leva la main pour frapper à la porte quand elle entendit la voix de sa directrice de maison à l’intérieur demandant qui était-elle. Aliénor fronça les sourcils et entra dans la pièce, sa boite de gâteaux dans la main.

-C’est moi Miss, Aliénor Delphi…

Mais quand elle se retourna après avoir fermé la porte derrière elle, la jeune fille se retrouva face non pas à une, mais deux professeures. L’une de dos, et la seconde de face qui semblait vouloir se défendre contre la première. La Miss Priddy de dos dégageait quelque chose d’étrange qui mettait assez mal à l’aise la Poufsouffle. Mais non, ce n’était pas possible, il ne pouvait pas y avoir deux Miss Priddy !

-Miss… ?

L’intervention d’Aliénor fit se retourner la professeure de dos. Ah ben pour avoir quelque chose de différent, elle avait quelque chose de différent ! Un chat dans la gorge, ou une bonne grippe ?

-Vous avez une sale tête.

Par mimétisme, Aliénor lâcha la boite de gâteaux et s’empara de sa baguette. Une crainte montait doucement en elle alors qu’étrangement la personne face à elle ressemblait de moins en moins à sa professeure. Aliénor se pétrifia sur place quand elle reconnu ses traits, ses traits à elle déformés par la rage. Elle fit un pas en arrière et se retrouva le dos plaqué à la porte, terrifiée par cette Aliénor qui s’approchait d’elle.

-Qu’est- ce que… Je… ARRÊTE !

Mais c’était quoi ça ? Aliénor paniquait totalement, baguette pointée vers… Elle-même ? Vers cette chose, elle ne maitrisait plus rien. Se voir elle, les mains maculées de sangs, le regard noir, un sourire malsain sur le visage, les cheveux trempés de sueur, prête à se battre après avoir littéralement écrasé un adversaire par la force de ces poings… Que pouvait-elle faire ? Elle était bien trop faible face à ce monstre qu’elle pouvait devenir. Sa baguette pointée commença à trembler et ces yeux s’embuèrent.

-Miss !

Elle ne savait pas quoi faire elle avait juste besoin d’aide.

Alors que Sarah songeait sérieusement à tenter quelque chose contre ce reflet étrange, quelque chose se passa justement, la coupable se dénonça, plongeant l'enseignante encore un plus dans la confusion. Pourquoi donc Delphillia lui faisait elle une telle farce ? Si on pouvait appeler ça une farce d'ailleurs. Une farce était sensée être drôle non ? Seulement un détail clochait, la Poufsouffle ne pouvait pas connaître cette robe et ni cette baguette magique. Comment faisait elle pour créer une telle illusion ? Sarah ne connaissait pas ce genre de talent à son élève. La Galloise ressentit cependant un certain soulagement en voyant l'autre elle se détourner un instant.

Le bruit de chute provoqué par une boîte tombant sur le sol et le cri de l'adolescente fit lever un sourcil à l'adulte qui suivi le regard visiblement terrorisé de la jeune fille. Un hoquet de surprise retentit quand Sarah découvrit que l'autre Sarah avait disparu ou plutôt... qu'elle s'était transformée en... une Delphillia sombre et visiblement folle de rage.

Une lumière s'alluma soudain dans le crâne de la sorcière ainsi qu'un pic de colère. Comment cette sale bestiole était elle arrivée ici ? Dans son armoire ! D'un mouvement rapide, elle pivota, se plaçant entre elle et la jeune Poufsouffle.

" Riddikulus ! "

La sombre Sarah qui venait de réapparaître disparu soudain, se transformant en une clown joviale parée de paillettes et de pompons.

" Rhaa... Repulso ! "

La chose fusa violemment dans l'armoire que la sorcière referma avec empressement. Elle se sentait toute tremblante mais se devait de faire face. Maintenant toujours la porte fermée, elle se tourna vers l'étudiante.

" Vous allez bien Delphillia ? Visiblement j'ai un invité surprise. Dites moi que vous avez plus d'humour que moi, sinon, cette sale bestiole risque fort de tenir tête un bon moment. "

Inutile, sa baguette tremblante, ces yeux emplis de larmes, elle était tétanisée par ce danger qui approchait d’elle. Son champ de vision fut obstruée et immédiatement le bras tendu de la jeune fille retomba le long de son corps alors que ces larmes s’échappaient enfin de ces yeux. Elle les essuya rapidement alors que son cerveau peinait à comprendre l’enchainement de sorts qu’elle avait entendu prononcé par sa professeure. « Riddikulus » ? Mais c’est pour se protéger contre les…

-Epouventard.

C’était un épouventard ? Mais non, elle l’avait vu en cours, avec Miss Holloway, son épouventard était une cage pas… Elle-même. Elle essuya rapidement ces joues et ces yeux avant de constater sa boite de gâteaux au sol puis de relever enfin le regard vers sa sauveuse. Plus d’humour ? Oui épouventard, rire, c’était le seul moyen pour s’en débarrasser mais…

-Mais Miss… Mon épouventard c’est une cage pas… ça.

Elle renifla peu élégamment avant de se redresser pour se redonner un peu de contenance, elle devait ressembler à rien et être assez pitoyable. Sa professeure lui demandait de l’aide ? Mais elle ne pouvait pas faire face à elle-même ! Comment serait-ce possible ? Surtout pas elle-même au plus haut de sa force et de sa violence ! Même elle n’était pas aussi musclée que la représentation qu’elle avait eu devant elle.

-Je… C’était moi. C’était moi, comment sa plus grande peur peut être moi ? C’ets pas possible et…

Mais attendez, quand elle est rentrée dans la pièce dans l’optique d’offrir son cadeau l’épouventard il avait la forme de sa directrice de maison. Aliénor fronça un instant les sourcils, le chemin se faisant dans sa tête.

-C’était vous. Votre épouventard c’est vous.

Si les circonstances n’étaient pas ce qu’elles étaient elle aurait été ravie d’apprendre ce genre de choses, la connaissance c’est le pouvoir non ? Et une information avait toujours de la valeur surtout une information aussi secrète et personnelle que sa plus grande peur. Mais elle n’était clairement pas en position de force, si cette chose ressortait de l’armoire elle n’avait aucune idée de comment s’y prendre.

-Euh de l’humour, oui, Colby aime bien mes blagues… Enfin je crois, mais rendre ça drôle je… Je vois pas comment.

Rien que d’y repenser, les poils de ces bras s’hérissaient et elle voulait fuir. Mais ce n’était pas la solution. S’il y avait bien une chose qu’Aliénor ne faisait pas, c’était fuir. Elle l’affronterait. Comment ? Aucune idée, mais elle le ferait, mais là, elle avait besoin d’être guidée et surtout de comprendre. Pourquoi son épouventard avait changé et surtout… Un épouventard ça peut changer de forme ?

-Je… Je croyais qu’il ne changerais jamais de forme. C’est pas normal d’avoir peur de soi-même.

Balle perdue, mais en même temps ça paraissait si étrange ! Elle se revoyait se jour là devant Aelle… Elle l’avait dévisagée, ce monstre en elle, il était capable de pulvériser quelqu’un. Ce n’était pas vraiment elle. Ça ne pouvait pas.

La panique s'entendait dans la voix de la Poufsouffle qui était visiblement arrivée au mauvais endroit au mauvais moment. Sarah hocha la tête, puis hocha de nouveau la tête, puis... soupira profondément. La baguette de l'adulte s'agita et un plateau quelque peu inutile apparut suivi de près par des verres et une carafe d'eau qui semblaient avoir un Poudlard Express de retard.

" Asseyons nous une seconde. Voulez vous un peu d'eau ? "

Sans vraiment attendre de réponse, elle remplit les deux verres et vida le siens avant de reprendre la parole.

" Ces sales bestioles changent de forme comme nous changeons nous. Les rencontres et les évènements font que nous évoluons, nos peurs et nos passions aussi. Les épouvantards lisent en nous par un procédé qui m'a toujours rendue perplexe mais peu importe, ils savent. "

La sorcière marqua une courte pause avant de se resservir sans pour autant boire à nouveau.

" Avoir peur de soi-même n'est pas impossible, la preuve, nous sommes visiblement au moins deux dans cette situation. Son regard se perdit un instant avant qu'elle ne reprenne. Certaines personnes savent plus que d'autres de quoi elles sont capables quand la colère ou la peur prend le dessus. Ces gens là, craignent donc leurs propres réactions. Je trouve ça assez logique. Enfin, cette Sarah là, je ne m'apprêtais pas à la revoir un jour. Merlin... "

Elle but une grande gorgée en refoulant au loin l'image plus que perturbante aperçut un instant plus tôt. Elle allait devoir l'affronter à nouveau sous peu mais mieux valait réfléchir la tête vide.

" Alors... vous m'aider à me débarrasser de cette chose ? Qu'est ce qui vous paraîtrait ridicule chez vous ou chez moi ? Cherchons des idées. "

De l’eau ? Oui de l’eau. Elle avait besoin d’eau. Mais d’abord… Elle avisa une nouvelle fois ces gâteaux sur le sol et la boite qui s’était ouverte, laissant s’échapper un ou deux d’entre eux. Heureusement la plupart étaient encore à l’intérieur. Elle les ramassa rapidement avant de venir s’assoir et d’avaler d’une traite son verre d’eau. « Comme nous changeons nous » Alors la peur d’Aliénor avait changé ? Mais elle était toujours claustrophobe c’était certain. Ça veut dire que son monstre lui faisait plus peur que sa phobie ? Dans l’immédiat c’était visiblement ça. Sa professeure semblait également affectée par cette apparition, la jeune fille ne connaissait Miss Priddy qu’en tant que professeure, elle ne savait donc rien de son passé ou de sa vie de manière générale. Elle semblait avoir eu une vie bien chargée mais elle avait vraiment beaucoup de mal à imaginer sa professeure céder face à sa colère ou à la peur. Elle avait l’air si forte et tellement dans le contrôle. Rien ne semblait pouvoir l’ébranler.

-Euh ridicule ? Je suis ridicule quand je chante ou quand je danse. Mais pas sûr que ça rende ce truc drôle au contraire. Vous… Vous voir en marraine la bonne fée serait totalement décalé mais pareil ça pourrait avoir l’effet inverse.

Comme dans les films d’horreur avec les clowns. Parfois les costumes dans un contexte qui ne s’y prête pas, c’est tout sauf joyeux. Même si la vision de Miss Priddy en robe rose à paillettes avec un petit chapeau pointu et une baguette étoile était particulièrement risible. Aliénor se resservit un verre d’eau avant de poser sa boite à gâteaux sur la table.

-A la base je vous apportais des rocks cakes. Ce sont des gâteaux de Bristol. Je crois que ma tête avec ces gâteaux devant cet épouventard devait être assez ridicule…

La jeune fille se mordit l’intérieur de la joue, son verre en main. Son cerveau tournait à plein régime, elle ne savait pas quoi proposer et surtout elle était totalement perdue face à ce changement d’épouventard. Elle avait été ça face à Aelle… Elle ne pouvait plus devenir cette chose.

-Je… Miss ? Vous aussi vous avez peur de devenir votre épouventard ?

Après tout c’était elles. Certes dans des conditions particulières mais c’était elles… Et si finalement ce n’était pas la peur de ce qu’elles étaient vraiment au fond d’elles ? Si ces choses étaient simplement leur véritable reflet dans le miroir ? La jeune Delphillia tourna soudain la tête vers l’armoire qui venait de bouger. Visiblement il n’avait pas spécialement envie de rester enfermé là-dedans… Elle devait trouver un truc. Mais quoi ?

Sarah hocha la tête aux suggestions de l'adolescente.

" Je me valide ridicule en marraine la fée effectivement. Je vous renvoie d'ailleurs le compliment. Vous voir habillée en rose bonbon avec un ballon licorne serait assez étonnant. Merci pour les biscuits, c'est très gentil et de toute évidence, ça ne nous fera pas de mal pour le prochain affrontement. "

Sans plus attendre, elle croqua un des petits gâteaux, invitant son élève à en faire autant.

" Ils sont délicieux, annonça t-elle après avoir dégusté dans sa totalité la petite sucrerie en silence, réfléchissant à ce qu'elle pouvait dire ou non à son élève. Delphillia était une grande fille et, de toute évidence, elle connaissait des tourments assez proches des siens. Je suis plus ou moins mon épouvantard, je n'ai donc pas vraiment peur de le devenir, j'ai plutôt peur, inconsciemment de laisser exprimer cette part de moi... Les émotions fortes sont des choses complexes. Je m'en méfie car je sais que je ne suis plus une petite fille de 11 ans. Je sais que j'ai les capacités et la puissance nécessaire pour faire de mauvaises choses si je le voulais. Je sais aussi qu'un jour, j'ai réellement pensé à le faire et je ne souhaite pour rien au monde redevenir cette personne. Je la déteste du plus profond de moi. "

C'était la vérité. Elle détestait ce qu'elle avait pu être à cette époque, faible, crédule, amoureuse éperdue et surtout stupide,... cette naïveté la dégoutait profondément autant qu'elle l'effrayait. Elle savait qu'elle était capable de se laisser déborder encore. Elle n'avait pas changé totalement, elle resterait elle à jamais et cette Sarah faisait donc partie d'elle-même. L'armoire vibra à nouveau et la sorcière soupira en reprenant sa baguette en main, au cas où.

" Et... si nous alternions ? Vous, moi, vous, moi... on se défoule un bon coup jusqu'à ce qu'on finisse par en rire. Des marraines la fée, des pompons roses, des licornes à paillettes... ça vous tente ? Il paraît que l'autodérision est dans le fond une grande preuve de courage. "

La professeure se servit dans les gâteaux proposés par la jeune fille. Aliénor l’observa faire et se servit après qu’elle ait approuvé leur goût. C’était sa maman qui l’avait aidé à choisir alors il y avait peu de chances que ça ne soit pas le cas. Le goût du sucre et l’apport énergétique du gâteau fit du bien à la jeune fille qui se senti un peu plus forte pour ce qui l’attendait ensuite. Elle hocha la tête aux paroles de sa professeure, voir les deux femmes tour à tour barbitisés serait certainement très drôle. Du rose, des licornes et des paillettes, exactement ce qui ne correspondait pas à la vision qu’elle avait de son monstre.

Elle était son épouventard ? Et elle acceptait que quelque part, cette chose soit elle ? Mais comment pouvait-elle faire ça ? Aliénor avait totalement exclu cette partie d’elle, comme si c’était une entité à part dans son identité, mais que la vraie Aliénor n’avait rien a voir avec ce qu’elle avait pu être lors de cet affrontement. Les yeux dans le vide, elle analysait les paroles de sa directrice de maison avant de se ressaisir quand elle proposa son plan pour neutraliser l’épouventard.

-Euh… Oui, je peux essayer.

Aliénor se leva, terminant son verre d’eau au passage avant de se poster devant l’armoire. Avisant sa professeure, elle prit une grande inspiration avant d’hocher la tête pour indiquer à l’adulte qu’elle était prête à combattre cet épouventard.

Quand la porte se déverrouilla, l’Aliénor combattante sortit immédiatement, claquant presque la porte ce qui fit reculer la sorcière d’un pas. Elle leva sa baguette, le bras un peu tremblant alors que son double se rapprochait d’elle. Tentant de l’imaginer affublée d’une robe à paillettes, elle lança le sortilège riddikulus. Les vêtements que portaient l’épouventard prirent une teinte rosée, mais pâle rendant la chose pas moins terrifiante pour la jeune fille qui retenait son souffle.

Heureusement sa professeure intervint rapidement et la créature se désintéressa d’Aliénor qui se décala pour reprendre son souffle. Rapidement les traits de sa professeure apparurent à la place de ceux de la capitaine des Hel’s. Effrayante certes, mais pas autant que précédemment, la Poufsouffle en profita pour reprendre son souffle et travailler sa visualisation. La professeure tenta également, avec bien plus de succès qu’elle. Mais un épouventard était coriace. Aliénor cria et agita les bras pour attirer l’attention de la créature. Ce qui fonctionna superbement et de nouveaux la jeune sorcière se retrouva face à elle-même. Prenant une grande inspiration, elle lança de nouveau le sort et cette fois la robe imaginée apparut sur la représentation. Rose à paillettes, assez ridicule. Mais si un fin sourire était apparu sur les lèvres de la jeune Delphillia, le regard toujours aussi noir sur ce visage qui était le sien lui glaça le sang. Elle ressemblait vraiment à ça ?

Elle fit un nouveau pas en arrière, manquant de trébucher. C’est alors que l’adulte pris le relais. Aliénor ferma les yeux tentant de chasser cette image de son esprit. Elle se sentait nulle en plus de ne rien arranger. Elle était accompagnée d’une puissante sorcière et elle n’était pas capable de montrer sa valeur.

-Désolée…

Balbutia-t-elle se rendant encore plus pitoyable. Elle renifla un grand coup avant de relever la tête. Sa professeure était de retour, mais l’épouventard semblait s’affaiblir…

Les métamorphoses s'enchaînaient et il fallait bien admettre que cette créature était plutôt brillante dans ce domaine ! Robes à froufrous, talons aiguilles, paillettes, ailes de fées, ballons roses, licornes, feux d'artifice, maquillage grossier, tout y passait. Le devant de l'armoire n'était plus désormais qu'un grand fouilli multicolores d'où émergeait régulièrement une Alienor ou une Sarah furibonde et d'autant plus ridicule. Le spectacle devenait clairement grotesque et la professeure de Sortilèges éclata soudain de rire alors que son double maléfique apparaissait pour la énième fois. La triste apparition explosa littéralement sous une vague de rire en un nuage de ballons licornes rose bonbon qui s'éleva inutilement vers le plafond avant de disparaître pour de bon.

" Non être 0, Delphillia-Priddy 1, annonça l'adulte avant de souffler sur le bout de sa baguette. Félicitations, ajouta t'elle très sérieusement à l'adolescente avant de pouffer de rire. Merlin... que d'émotions pour un jour de rentrée... je vous offre un jus de fruit ? Il nous reste quelques buscuits pour nous remettre. Vous allez bien au moins ? "

Elle même, se laissa tomber sur la chaise qu'elle occupait un peu plus tôt alors que des bouteilles fraîches, si on en croyait les gouttelettes sur les parois de verre, emplies de jus de citrouille et de soda de branchiflore arrivaient tranquillement dans la pièce à la file indienne, suivies de près par un petit bol de glaçons. Un petit remontant avant de reprendre la journée là où elle s'était arrêté.

Elle faisait ce qu’elle pouvait tentant de garder la face et de ne pas se concentrer sur ces échecs répétés mais sur sa progression. L’épouventard était de moins en moins terrifiant et visiblement de plus en plus faible jusqu’à ce que l’image de sa professeure soit tellement ridicule qu’elle soit obligée de se mordre la joue pour retenir un rire. Visiblement cette hilarité était partagée par l’adulte qui éclata de rire avant que la créature ne disparaisse. Aliénor sourit de toutes ces dents laissant s’échapper un rire puis un soupir de soulagement. Soudain la fatigue de l’exercice lui tomba dessus, elle venait d’enchainer plusieurs sorts d’affilé et se sentait un peu faible. Malgré cette fatigue qui lui tombait dessus, elle partagea la joie de sa professeure souriant à son imitation des westerns de son enfance.

Elle se dirigea vers la chaise qu’elle avait délaissé quelques minutes auparavant avant de répondre à l’adulte.

-Un peu fatiguée, mais je suppose qu’un gâteau me redonnera assez d’énergie.

Elle ne se fit pas prier et attrapa une des spécialités de Bristol pour coquer à pleines dent dedans. Observant la pièce maintenant bien plus calme, elle se laissa aller à quelques confidences avec sa professeure.

-On nous avait entrainé en troisième année contre les épouventard. On avait tout appris sur eux, mais l’affronter, seule, en vrai… C’est bien plus compliqué que ce que je pensais. Encore plus quand l’épouventard c’est soi-même.

Elle avait encore du mal à s’en remettre mais après tout… C’était logique. Elle rêvait de ce moment où elle s’en était prise à sa camarade, de ce dérapage absolument pas contrôlé et de ce qu’elle aurait pu faire si elle ne s’était pas retenue avant.

-Ca ne vous fait pas peur ? De savoir que cette représentation c’est une partie de vous ? Que finalement c’est juste un miroir qui vous représente dans votre pire état ? J’ai toujours eu l’impression de ne pas maitriser mes émotions et que c’était à cause de ça que je n’arrivais pas à pratiquer et à progresser en magie. J’ai appris à me maitriser, à accepter mes émotions et grâce à vous je sais qu’avec passion on progresse bien mieux. C’était pour ça que j’étais venue. Pour vous remercier de m’avoir aidé, je crois que mon E aux BUSES c’est un peu grâce à vous que je l’ai eu. Et à ça du O.

Elle mima un tout petit espace entre don index et son pouce pour représenter le peu de points qui lui restait pour avoir la note maximale. Elle baissa la tête, encore un peu déboussolée par ce changement d’épouventard et cet affrontement. Elle sourit de nouveau à sa professeure avant de lever la tête vers l’horloge du bureau. Ca faisait un petit moment qu’elle était là et elle ne voulait pas abuser de l’hospitalité de sa directrice de maison.

-Enfin voilà. Encore merci pour tout. Je… Je vais vous laisser, vous devez avoir mieux à faire et moi, il faut que je prépare mes cours de cet après-midi.

Potions, elle voulait vérifier qu’elle avait bien tout ce qu’il lui fallait et puis de toute façon s’éterniser en compagnie de ces professeurs ce n’était pas vraiment son genre. Elle préférait largement retrouver ces amis et là, elle aurait besoin d’un petit point dortoir, ou alors un petit moment dans les airs ? Se changer les idées. En voilà une bonne idée.

Elle se leva souriant poliment à l’adulte avant de se diriger vers la porte. Elle qui avait toujours eu du mal à considérer les adultes de Poudlard comme des personnes de confiance, découvrir la plus grande peur de sa professeure et la sienne et les affronter ensemble… Elle venait de passer un cap dans le respect qu’elle portait à sa professeure de sortilèges. Elle savait qu’elle pourrait se confier à elle et ce, peut-être plus tôt que prévu.

En tous cas c'est une fin pour moi ! Merci beaucoup pour cet échange