Après le repas, Selah s'était engouffrée dans sa salle de classe, tout en ouvrant une ou deux fenêtres d'un coup de baguette sur son passage. Il lui arrivait de passer un peu de temps dans sa salle de classe durant le week-end mais jamais la sorcière ne s'était imaginée travailler un samedi. Elle entra un instant dans son bureau, et ressortit avec quelques livres qui la suivaient joyeusement. Il n'était pas nécessaire de sortir tout l'attirail dès le début de l'entretien.

C'était le troisième entretien d'Adaline Macbeth. Selah avait eut l'occasion de découvrir un peu la Gryffondor au fil des cours, ainsi que des discussions qui en découlaient après ceux-ci. La sorcière avait dès lors hâte d'en apprendre d'avantage sur la, elle l'espérait, future Animagus.

Les livres n'avaient, au premier abord, pas grand chose à voir avec la formation, mais Selah était certaine qu'ils lui seraient utiles durant l'entretien. Elle les installa tous sur la longue table qui était habituellement utilisée pour les démonstrations en classe. La lumière naturelle, bien que le ciel soit gris en ce mois d'octobre, donnait à Selah l'envie de se promener à Pré-Au-Lard. Elle se promit de faire cela un peu plus tard, après l'entretien.

Le thé était servi dans des petites tasses dépareillées, et la professeure était prête à recevoir sa recrue. Elle n'attendit pas bien longtemps avant que l'élève pointe le bout de son nez.

- Bonjour Miss Macbeth, dit-elle en faisant signe à l'élève de s'approcher de la grande table. Heureuse de vous voir.

Ce n'était pas une politesse, c'était sincèrement le cas. Elle lui incita à prendre place sur l'un des petits fauteuils, et en fit de même, tout en avalant une gorgée de thé chaud.

- Tout d'abord, comment vous sentez-vous vis à vis de la formation Animagus ? Avez-vous des questions sur l'année qui s'est écoulée ?

La question était bateau, mais il fallait bien commencer quelque part.

Le samedi 3 octobre 2048,
Dans l'après-midi


Aujourd'hui, mon cœur bat plus vite que tous les autres jours.

Je suis convoquée par ma nouvelle professeure de métamorphose, qui n'est plus tout à fait nouvelle, pour le troisième et dernier entretien de ma formation. Rares sont les moments où je suis aussi heureuse, j'ai pensé toute la matinée. En essayant de méditer un peu ce matin, je n'ai pas réussi à me concentrer sur l'exercice : je ne pensais qu'à ce troisième entretien.

Alors j'ai ajusté ma robe de sorcier, pris ma plume, mon encrier et du parchemin dans un sac à dos et je me suis rendue devant la salle de métamorphose.

Miss Crane m'attend déjà, près de la porte, là où elle nous a déjà fait quelques démonstrations. Au pied d'une étagère se trouvent quelques fauteuils qui permettent de rester près de la grande table qui sert à ces dites démonstrations, c'est ici qu'elle m'invite à m'asseoir après m'avoir saluée.

« Bonjour Miss Crane, heureuse de vous voir également. »

La salué-je en retour, avec un sourire sincère.

Ce sourire, de toute façon, je ne peux pas l'enlever de mon visage. En prenant place sur le fauteuil qu'elle m'indique, je réalise que mon cœur bat toujours aussi fort et que mon visage est enflammé. Mais ce n'est pas de la gêne, c'est plutôt une sorte de hâte ou encore de passion qui cherche à sortir de mon corps. Et comme je ne peux pas me mettre à crier ou à sauter, aussi bien parce que mon esprit trop cartésien me l'empêche que parce que ce ne serait pas de bon goût, mes joues sont rouges du feu qui brûle à l'intérieur de moi.

Je remarque le thé et je pense, amusée, que mes joues sont déjà bien trop chaudes pour que j'ose prendre une tasse - mais il est certain que j'en prendrais une si Miss Crane me le demandait. Tout en laissant mes pensées se disperser, parce que je suis bien trop excitée pour les en empêcher, je réfléchis à la réponse à donner à cette première question d'introduction.

« Je me sens... heureuse. Cette année a été dure, encore plus dure que la précédente, mais je n'ai jamais été aussi heureuse. »

Lui dis-je instinctivement.

Si je me rends compte que j'ai dis des mots que je n'ai pas l'habitude de dire, à une professeure que je ne connais pas si bien, je ne laisse pas le malaise prendre le dessus sur la joie. Et puis, de toute façon, mes joues sont déjà rougies alors elles ne peuvent pas l'être plus.

« Je n'ai pas de questions particulières. Si ce n'est... C'est quoi la suite ? »

Demandé-je d'un ton enjoué, avec un sourire encore plus large.

En vérité, j'ai pas mal de questions, mais j'en ai tout le temps et sur tout. Mais aucune de mes questions n'est aussi importante pour moi et pour la formation que la suite de cet entretien, et j'ai tellement hâte qu'il continue que je peux à peine tenir sur ma chaise.

La professeure s'installa à son tour autour de la grande table, face à son élève. Une jambe croisée sur l'autre, les lèvres pincées en un léger sourire, lorsque la Gryffondor montra toute son impatience au sujet de la suite de la formation. Elle garda un silence intact, espérant qu'Adaline ajoute quelque chose, mais l'élève termina par une question.

- Eh bien, dit-elle, en décroisant les jambes et en parcourant le carnet de notes qui était dédié à la formation Animagus, tout d'abord félicitations pour cette année écoulée, j'ai eu quelques échos, évidemment, et je suis certaine que votre travail reflète parfaitement vos capacités actuelles. Le parcours est long et dur, mais vous arrivez bientôt à la fin.

Elle lui fit un clin d'oeil complice.

- Concernant la suite, je vais évaluer vos connaissances en métamorphoses. Vous avez dû étudier le sortilège d'Inde, n'est-ce pas ? Nous allons commencer par cela, et nous pourrons ensuite discuter plus amplement de la suite de votre formation. dit-elle, en buvant une gorgée de thé, invitant Adaline à faire de même.

Pour ne pas stresser Adaline dès le début de l'entretien, Selah avait préféré mettre les animaux à l'écart. De ce fait, la salle de classe était d'un calme olympien, et tout à fait propice à la bonne réussite des métamorphoses. Selah avait toute confiance en son élève.

- Pour le sortilège d'Inde, je vais donc vous demander de réaliser la métamorphose dans un sens, puis dans un autre. Avez-vous une préférence pour démarrer ? demanda-t-elle, attendant que la Gryffondor réponde pour noter la justification dans son carnet.

Avec le même sourire sur les lèvres, jusqu'aux oreilles, la même teinte rougeâtre sur les joues et la même attention démesurée, je recueille les paroles de ma professeure comme des compliments. Je considère qu'il n'y a pas de plus grand honneur que de recevoir un compliment de quelqu'un qu'on admire, du moins à cet instant présent ! J'accueille aussi chaleureusement le clin d'œil qu'elle me glisse et je ne peux m'empêcher de penser que c'est un bon signe pour la suite. Je touche enfin du doigt un objectif pour lequel je me donne sang et eau depuis plusieurs années. Le sentiment qui m'envahit est indescriptible et pourtant, il se glisse dans tous les interstices de mon corps et de mon âme.

Le sortilège d'Inde ?

Miss Crane me ramène à la réalité un peu trop brusquement, si bien qu'il me faut un instant pour me rappeler de l'objectif de cet entretien : montrer que je suis prête à devenir une véritable Animagus. Et cela passe par la maîtrise de la métamorphose, dont je compte bien faire une parfaite démonstration.

« Je vais commencer par métamorphoser la dinde. C'est comme ça que j'ai réussi le sortilège la première fois... »

Avoué-je ensuite un peu plus bas, avec un sourire à l'adresse de cette femme si impressionnante qui se tient devant moi. Pourtant, elle n'est pas plus grande que moi, elle n'est pas plus méchante que moi, mais elle en connaît tellement plus.

Viens le moment de prouver que je mérite ma place dans cette formation. La professeure s'absente un moment, disparaît derrière le grand cerf, pour réapparaître avec une dinde dans les bras. Elle la pose sur la table et la première partie de l'exercice commence.

Je me concentre, en fixant la dinde qui me rend un regard parfaitement vitreux, soulagée que l'animal ne bouge pas trop pendant que je visualise mon sortilège. La visualisation que j'opère, je la connais bien, je me suis entraînée encore la semaine dernière sur une dinde du professeur Dawson. Un peu machinalement, je répète le processus de la visualisation en imaginant chacune des étapes très précisément. Je n'oublie pas d'ajouter un peu d'énergie créatrice et un brin d'imagination en voyant un cochon d'inde aux poils longs, beige parsemé de tâches blanches. J'agite ma baguette avant de prononcer la formule.

« Dindedandine ! »

La magie s'extirpe de ma baguette et mon sortilège heurte l'animal, qui s'apprêtait à ébrouer ses ailes, et commence à le métamorphoser. En quelques instants, la dinde devient cochon d'inde. La métamorphose est parfaite, aucun détail n'a échappé à ma vigilance. Je souris en constatant le résultat, et en voyant le rongeur se tourner dans tous les sens.

Ma professeure constate la métamorphose et puis je rends à la dinde sa forme avec un Réparifagex.

La professeure s'en va alors chercher le cochon d'inde, pour la seconde partie de l'exercice. Quand la créature, bien moins calme, est finalement posée sur la table, je brandis à nouveau ma baguette.

Cette fois, la visualisation est moins mécanique. Je n'ai pas répété autant de fois et, en ayant réussi la première métamorphose, quelque chose me dit de me lâcher et de me laisser aller à la création. C'est un sentiment particulier qui m'envahit alors que je garde les yeux fixés sur l'animal. Quant, plus jeune, il m'était impossible de visualiser sans avoir les yeux fermés, je peux maintenant superposer ces images pour garder les yeux sur l'animal (ou la chose) à métamorphoser. Alors je commence à imaginer la transformation, avec cette fibre créatrice qui m'anime, je vois le cochon d'inde perde son pelage tout en grossissant et rondissant pour devenir une dinde qui se couvre de plumes.

« Dindedandine ! »

Le cochon d'inde se métamorphose alors pour devenir une véritable dinde. Elle se met à glousser, sois le regard (je l'espère) admirateur de ma professeure. La même dinde que celle qui était là précédemment est en train de caqueter sur la table.

J'attends le retour de ma professeure, tout sourire.

D'un oeil expert, Selah se mit un peu en retrait, laissant à Adaline Macbeth suffisamment d'espace pour qu'elle puisse se concentrer correctement, seule face à la dinde qu'elle lui avait apporté. La sorcière avait choisi avec soin la plus grosse dinde du lot, celle qui l'avait, elle l'avoue, un peu défiée du regard lors de sa sélection. Tu seras parfaite en cochon d'inde. lui avait-elle alors murmuré.
Désormais, la dinde était posée sur la table, et Selah s'attendit à une nouvelle bataille de regard, mais sa nouvelle ennemie préféra se tourner vers celle qui comptait bien la métamorphoser en animal absolument adorable.

Adaline s'exécuta avec un coup de maître, et la professeure s'approcha alors du petit animal, pour l'analyser sous toutes les coutures. Elle nota les détails des tâches sur le poils, le museau, et le même regard vide de l'ex-dinde. Elle hocha la tête, une fois qu'elle avait noté tout ce qui pouvait être noté, tandis qu'Adaline redonnait à l'animal sa forme originelle.

C'était au tour du second animal. Selah avait choisit le cochon d'inde le plus vif. La sorcière avait par ailleurs failli le perdre dans la salle de classe, quelques heures auparavant. L'animal était vif, et avait réussi à se glisser entre deux bibliothèques, ce qui avait particulièrement agacé Selah.

- Aussi appétissante qu'une dinde de Noel, dit-elle en guise de commentaire de conclusion, après avoir observé le plumage de l'animal, qui était un peu énervé par sa taille bien plus conséquente. Je vois que vous avez fait un joli travail sur ces métamorphoses. Si vous permettez, je vais remettre cette petite peste dans mon bureau.

Lorsqu'elle revint, les mains vides, et un petit doigt rougit par une morsure sauvage, Selah s'installa face à son élève, prête à lui parler de la suite de la formation.

- Bien. Dit-elle avec un sourire satisfait. Nous allons passer à la partie de la formation qui est certainement la plus compliquée émotionnellement. Oh, pas de panique, Le professeur Dawson et moi sommes toujours à votre disposition si vous avez besoin de discuter. C'est le début de votre quête intérieure. Nous allons donc explorer ensemble qui vous êtes au plus profond, pour faire sortir l'animal qui dort en vous.

Je hoche la tête et regarde la professeure se lever pour traverser la pièce et disparaître à nouveau. Pendant les quelques instants que je passe seule, je souffle, installée à ce petit salon qui me rapelle fortement celui dans lequel je me suis installée en avril, à l'autre bout du monde, et où j'ai appris de la magie que l'on pratique en Amérique. C'est un grand soulagement d'avoir terminé la démonstration de ce sortilège, sur lequel j'ai tant travaillé toute l'année dernière, et par dessus tout d'avoir réussi à les exécuter devant ma professeure avec une telle qualité.

Quand la professeure revient, je lui adresse un sourire.

C'est un sourire de soulagement, plus qu'autre chose, qui exprime toute la joie qui m'habite de m'être délesté d'un poids. Bien qu'avoir réussi les métamorphoses ne m'assure pas de continuer la formation, à cet instant présent, il me semble que rien ne puisse m'empêcher d'accéder à cette troisième année. Après tout, je la mérite, non ?

Je crois avoir fait tous les sacrifices qu'il fallait, en laissant de côté mon apprentissage du Gobelbabil pourtant si intéressant, en arrêtant de creuser certaines matières moins intéressantes, en arrêtant de m'intéresser à autre chose que la formation Animagus. J'ai laissé des heures de sommeil et gagné des cernes dans le processus, probablement aussi perdu des amis.

Je hoche la tête, à nouveau, et prends une grande inspiration.

Il s'avère que ces dernières années m'ont rendu plus dure émotionnellement, c'est pourquoi il est particulièrement difficile pour moi de me livrer entièrement. Pour autant, l'apprentissage de la Bradypomagie, la méditation et même le sport m'ont permis de me connaître mieux et d'apprendre à être honnête avec moi-même. Les autres... ça reste une autre histoire.

La quête intérieure.

Je pensais avoir déjà affronté et confronté mon moi dans tous les sens, pour autant, je n'ai pas rencontré l'animal qui sommeille en moi. Et je n'ai absolument aucune idée de comment faire pour le réveiller. Je déglutis, la peur d'échouer m'enserre le coeur. Et si je ne rencontrais jamais cet animal ? Et s'il n'y avait tout simplement aucun animal qui dorme en moi ?

« Est-ce que... est-ce qu'il s'agit de méditation guidée ? Comment est-ce que ça va se passer ? »

Demandé-je, le visage moins ouvert, sur lequel on peut probablement lire l'inquiétude qui perce au-dessus d'un enthousiasme toujours présent.

La professeure examinait les traits du visage de son élève. Etait-elle inquiète, impressionnée, apeurée ? Elle but une dernière gorgée de thé, attendant qu'Adaline réagisse, avant de reprendre la conversation.

- Effectivement, nous allons faire de la méditation guidée ensemble, durant votre quête intérieure.

Selah avait intégré la méditation dans sa routine quotidienne. C'était un moyen pour elle de faire le point sur ses journées et de se recentrer sur elle-même. Elle avait déjà pu accompagner quelques adultes lors de ces méditations, lorsqu'elle était consultante en particularités métamorphiques, mais jamais encore la professeure n'avait pu accompagner un adolescent. Si les étapes à suivre étaient sensiblement pareilles, la façon d'aborder cette méditation serait, sans aucun doute, bien différente. Elle était prête à relever le défi.

- Je vous conseille, tout d'abord, de faire un bilan sur vous-même. Votre identité personnelle, vos valeurs, vos aspirations et vos passions. Essayez d'en apprendre d'avantage sur vous, et qui vous êtes, au fond. Ce n'est pas un exercice facile, évidemment. Vous êtes encore jeune, et vous êtes encore en pleine construction de votre identité.

Selah ne voulait pas décourager Adaline, mais elle souhaitait lui montrer toute l'étendue du travail qui l'attendait. La professeure avait confiance en la Gryffondor. Elle savait que celle-ci pouvait tout à faire y parvenir.

- Et ensuite, nous procéderons à la méditation guidée. Avec le professeur Dawson et moi-même. Etes-vous familière avec ce type d'activité ? demanda-t-elle, tout en cherchant dans ses notes.

Mon visage s'ouvre progressivement, au fur et à mesure que les explications de Miss Crane s'éclaircissent. Comme un ciel qui se dégage après une averse, mes pensées se clarifient. J'attrape la tasse de thé avec mes deux mains pour en boire une gorgée, ce qui me permet aussi de masquer une respiration plus longue que les autres.

Tout en sirotant la tasse de thé chaud, liquide qui me brûle la langue, je hoche doucement la tête.

Je repense à ces séances de méditation, durant lesquelles je ne pouvais retenir mes pensées. Alors je les laissais aller. Toutes ces pensées qui se concentraient sur moi, mes qualités, mes défauts, mes relations, mes passions. Ce n'était pas de bons moments, je me mettais parfois à pleurer, d'autres fois j'arrêtais la séance. Mais c'était nécessaire, pour trouver les 5 noms qui sont les miens et espérer accéder à l'apprentissage de la Bradypomagie.

Alors ça me fait pas peur.

Je bois une dernière gorgée et repose la tasse vide sur la table basse.

« Je pratique la méditation depuis l'année dernière, régulièrement ! Mais je n'ai participé qu'une fois à une séance de méditation guidée. »

Répondis-je à la dernière question de ma professeure.

Plus que les séances de méditation solitaires, je me souviens de ce moment à Ilvermorny. En essayant de revoir les images de cet instant, c'est l'image de ces cheveux blonds clairs, de ces yeux bleus rivés sur moi ou encore de ces grandes jambes qui marchent devant moi. Chase Markle me manque, ne puis-je m'empêcher de penser à cet instant, et je réfrène cette pensée avec un pincement au coeur.

« Si je comprends bien, il faut que je commence par faire un bilan, avec moi-même, et puis nous pourrons commencer les séances de méditation guidées ? Est-ce que vous serez tous les deux, avec Monsieur Dawson, pendant les séances ou un seul de vous à la fois ? Et... à quoi ça ressemblera une séance de méditation guidée avec vous ? »

Demandé-je, presque d'une traite, avec un enthousiasme teintée de la même espèce d'inquiétude - la peur d'échouer.

Selah approuva d'un signe de tête. L'élève, qui se trouvait face à elle, semblait avoir déjà de bonnes connaissances et de bonnes bases pour démarrer cette troisième année de formation. Pratiquer la méditation au quotidien l'aiderait grandement à mieux comprendre les principes d'une méditation guidée. Selah se souvenait comme il pouvait être compliqué, pour certains de ses patients, d'en réaliser à ses côtés. Généralement, les adultes pensaient trop, et ne parvenaient pas à faire le vide dans leurs têtes. Selah pensa qu'il serait plus évident de travailler avec Adaline, une élève disciplinée et avec déjà un pied dans ce type d'activité, qu'avec n'importe quel sorcier adulte.

- C'est déjà très bien. Encouragea-t-elle d'un sourire. La méditation guidée a pour but de vous fixer des objectifs spécifiques, là où une méditation seule est plus libre et vous permet surtout de vous recentrer sur vous-même. Ce n'est pas plus compliqué, vous devrez nous faire confiance.

Selah se mordit la lèvre inférieure. La sorcière avait toute confiance en Jae Dawson, le professeur de soin aux créatures magiques, et savait qu'il était tout à fait à la hauteur de la confiance que les élèves lui accorderaient, mais soudain Selah se sentit comme une intru dans sa propre salle de classe. Après tout, elle n'était là que depuis un mois, et elle n'avait aucune envie de brusquer ses élèves.

- Tout à fait, dit-elle en chassant ses pensées d'un signe de tête. Effectivement, ce sera Mr. Dawson ou moi-même, selon vos préférences et nos horaires. Concernant la procédure à suivre, ne vous inquiétez pas, c'est une méditation classique avec nos instructions. Le matériel utilisé durant la méditation sera bien évidemment à votre disposition, donc vous ne devrez apporter que votre volonté de devenir Animagus.

Elle marqua une pause, espérant ne pas avoir embrouillé son élève avec ses réponses.

- Avez-vous d'autres questions ?

Le fait de devoir me replonger dans les confins de mon esprit et mener le même travail d'introspection que pour commencer mon apprentissage de la Bradypomagie me met mal à l'aise. Je pourrais ne pas recommencer le travail, puisque j'ai un souvenir très vif de l'introspection que j'ai mené au printemps dernier, mais ma conscience ne pourrait pas supporter de mentir à mes professeurs. Et puis, il s'est passé tellement de choses depuis mars dernier.

Je hoche la tête en écoutant les réponses de ma professeure à mes questions.

Il est probable que je sois influencée par mon envie irrépressible de plaire à cette nouvelle professeure et d'en faire une alliée, mais j'ai hâte de commencer les séances de méditation guidée avec Miss Crane. Et, dans l'objectif de le lui montrer, je me mets à lui sourire un peu exagéremment.

La perspective de participer à des méditations guidées, de manière régulière, me procure véritablement de la joie. C'est comme une nouveau défi à relever, même si je ne m'imagine pas encore ce que ça me forcera à révéler à mes professeurs sur mon moi profond. Après tout, est-ce que c'est si dérangeant que ça de me révéler à des adultes de confiance, qui peuvent certainement m'aider à grandir ? Non, pensé-je.

Et puis, méditer toute seule, c'est difficile et c'est aprfois ennuyant. De plus en plus souvent, je lutte pour ne pas me mettre à une autre activité. L'envie de quitter ma position, de décroiser les jambes, de courber le dos, d'ouvrir un livre ou de me remettre sur un devoir me prend parfois alors que je n'ai même pas commencé à méditer. Mon sourire se fait un peu plus vague en y repensant, mais je me reconcentre sur l'instant présent à la dernière question de ma professeure.

« Non... Si ce n'est, quand est-ce qu'on commence ? »

Demandé-je avec un petit sourire malicieux.

Je ne suis pas sans savoir que ma troisième et dernière année d'apprentissage n'est pas tout à fait certaine. Mais, au fond de moi, je ne doute pas. Pour moi, à cet instant présent, l'échec ne peut pas exister. Imaginer que mon apprentissage s'arrête ici m'est impossible - ce serait probablement la fin de beaucoup de choses pour moi.