PV @Brynn Wathen

Le lionceau entra dans la serre et referma doucement la porte derrière lui. La chaleur humide de la serre tropicale l'envahie. Le silence et la température soulageait l'esprit angoissé du garçon. La veille, il avait envoyé un hibou à ses parents leur disant qu'il souhaitait rentrer à la maison. Il pensait que cette lettre soulagerai son mal du pays et son impatience mais ça n'avait pas été le cas.

Circulant entre les grosses plantes, le petit soupira. Il était venu ici car le froid du nord de l’Écosse le rongeait. Le petit avait donc pensé que la température régulière de la serre tropicale réchaufferait son corps et son cœur. Sa maison lui manquait. A moins d'une heure de la mer, le manoir de sa famille paraissait bien plus chaleureux que ce château froid et lugubre qu'était Poudlard.

L'enfant s'assit au bord du bassin et observa le sauge en face de lui. Ici, au moins, il serait tranquille pour ruminer. Ce n'était pas son genre, mais depuis sa rentrée, le lionceau avait changé. On pourrait dire qu'il était possiblement devenu plus mature mais ce n'était pas son ressenti. Ces derniers jours, il était plutôt malheureux. L'approche de Décembre lui donnait le mal du pays et son lit à Winchester lui manquait.

Il fut troublé dans ses pensée par un bruit non-loin de lui...

La matinée avait été un peu perturbante, pour Brynn, qui s'était retrouvé à émettre des sons fort peu gracieux tandis qu'il s'était assis à sa table pour son petit déjeuner dans la Grande Salle. Autour de lui d'ailleurs, d'autres personnes avaient régulièrement émis des sons de flatulences, tandis que certains cherchaient à enquêter sur la disparition d'un scone ou d'un pancake à renfort de regards suspicieux et que d'autres engloutissaient la pièce sous leurs rires. Le résultat de ce remue-ménage était un vacarme assez fatigant et même s'il avait fini par comprendre que c'était là une farce, le petit garçon n'avait que fort peu goûté la plaisanterie et s'était enfui aussi vite qu'il avait pu. Il avait hâte de retrouver la calme petite cuisine des Wathen pour prendre son petit déjeuner encore en pyjama après avoir câliné sa famille.

Malheureusement, la petite cuisine des Wathen se trouvait à un nombre désespérant de kilomètres, et même si les moyens de transport sorciers rendaient les distances souvent un peu relatives, Brynn, lui, n'avait en sa possession que ses petits pieds qui ne le mèneraient pas très loin. Aussi, au lieu de chercher le chemin du Pays de Galles, ses jambes avaient-elles tracé celui de la cour de la tour de l'horloge, avant de décider qu'il faisait froid et qu'il fallait aller se chercher un endroit plus chaud.

Trottinant dans la neige, il avait ainsi atteint la serre tropicale, où il aimait observer les grenouilles, et était entré dans cette moiteur chaude qui était presque de trop finalement, lorsqu'on portait un pantalon blanc de neige en son bas, une cape d'hiver et une écharpe bien chaude. Étouffant un peu alors que son corps était assailli par le contraste, le jeune Poufsouffle retira ses couches les plus chaudes et traversa la serre - non sans saluer les grenouilles - pour se réfugier dans la partie un peu moins moite qu'était celle de l'espace de travail. Il déposa ses affaires sur une chaise puis décida d'attendre un peu de s'habituer à la chaleur avant de retourner dans le reste de la serre.

Attrapant donc un livre de botanique et une figurine de triton au gingembre en pâte à sel qu'il avait dans sa poche, le petit garçon s'amusa à donner cours à son triton, jusqu'à ce que le dit triton ne l'informe qu'il en avait marre et qu'il voulait voir les grenouilles. Comprenant que l'amphibien lui aussi se sentait seul et voulait retrouver ses semblables, Brynn se leva alors de la chaise où il était, referma le livre qu'il reposa sur l'étagère où il l'avait pris et trottina jusqu'au bassin.

La présence d'une silhouette qu'il connaissait l'arrêta, hésitant à s'approcher alors qu'il aurait souhaité être seul avec les grenouilles et son triton, malgré son sentiment de solitude. Néanmoins, Lance aussi semblait tout seul, et il avait l'air calme, alors il s'approcha doucement.

« Tu regardes les grenouilles ? »

Quelqu'un était en effet rentré dans le serre. C'était pourtant relativement rare. Enfin, il ne faisait peut-être que passer. C'était peut-être même le professeur Charleston qui passait discuter avec ses plantes. Il suspectait l'homme d'avoir des pouvoirs spéciaux pour entendre parler ses Molys. Au final, ce n'était pas lui mais Brynn Wathen qu'il avait déjà rencontré plusieurs fois mais à qui, en réalité, il avait rarement parlé depuis la rentrée.

En l'entendant parler de grenouille il se leva du bassin contre lequel il était appuyé.

- Ah ! Y'a des grenouilles là-dedans ?

Il se pencha sur le rebord pour les voir. En effet, en se levant, elles prirent peur et quelques une sautèrent dans l'eau.

- J'aime pas les grenouilles. Une fois, chez moi à Winchester, quand j'étais petit, une m'a sauté sur la figure ! répondit-il en gardant ses mains proches de son corps. Notant l'accent gallois de Brynn il enchaina. Tu viens d'où toi déjà ?

Les grenouilles, il les préférait en chocolat et pas trop vives.

La présence de Brynn soulagea le garçon qui, un instant, craignit la présence d'un élève de sa maison. Au moins, le Pouffsouffle n'avait jamais rien fait pour le contrarier, il était même plutot gentil avec lui. Il appréciait son tempérament et son sérieux. Il aurait aimé le compter parmi ses amis proches, malheureusement ils se parlaient peu et le lionceau avait peur que l'hostilité que ses camarades avaient à son égard l'ait contaminé.
Pour autant, Brynn ne semblait pas méprisant le moins du monde.

Désolé, j'ai prit un peu de temps à l'envoyer celui-là

Sous la révélation, Brynn ne put empêcher un mouvement de sourcils vers le haut, surpris. C'était possible, de ne pas aimer les grenouilles ? Elles étaient pourtant toutes mignonnes à sauter partout, et très gracieuses, lorsqu'elles fendaient la surface en un plongeon fuyant. Très jolies, aussi.
Resté bloqué sur ce point pour le moins surprenant, Brynn mit un peu de temps à réagir après la question de Lance, qu'il n'était d'ailleurs pas sûr de comprendre. Le rouge et or avait-il été étonné de son apparition ?

« De là, derrière, où y'a les tables pour travailler. »

C'était en effet de là qu'il venait, si cela pouvait rassurer son camarade sur le fait qu'il n'était pas apparu de nulle part d'un seul coup.

« C'est dommage que t'aime pas les grenouilles. Moi j'aime bien les regarder. Mais il faut être patient et rester sans bouger parce qu'elles sont un peu timides. » Se rapprochant du bassin, le petit garçon s'assit sur son rebord, ses mains effleurant une des plantes d'eau, le corps à moitié tourné vers le lionceau « C'est bizarre qu'elle t'ait sauté dessus la grenouille, d'habitude elles ont peur. Elle t'avait pas vu ? ».

Peut-être que son camarade avait un talent rare pour rester immobile sans bouger ? Ou peut-être qu'elle lui avait sauté dessus alors que le jeune sorcier faisait une sieste dans l'herbe ? Malgré lui, un sourire grimpa sur les lèvres du Poufsouffles tandis qu'il imaginait la scène, Lance une grenouille sur la tête, étalée de tout son long comme une étoile, encore plus paniquée que lui en se rendant compte que son nouveau rocher était vivant.

Il n'y a pas de mal !

Lance jeta un coup d’œil suspicieux vers les tables pour travailler. Ce n'était évidemment pas ce qu'il voulait dire mais peu importe. S'approchant du bassin, le petit s'accroupit pour avoir ses yeux à hauteur de l'eau. Il observa le milieu des grenouilles.

- On jouait à cache-cache dans le jardin chez moi, et je suis tombé dans la mare. Elles ont sauté de partout et une a atterrit sur ma figure. J'ai eu super peur. Elle était froide et toute gluante ! dit-il en se remémorant la scène.

Il avait 7 ans, son frère et lui jouaient à cache-cache et il était tombé de sa cachette. Ou peut-être qu'on l'avait poussé. Il ne se rappelait plus très bien. Il était ressortit de la mare trempé, sale et très mécontent. Plissant les yeux, il tentait d’apercevoir les batraciens. Peut-être qu'elles n'étaient pas si terrible, vu comment Brynn en parlait affectueusement.

- Il y en a beaucoup à ta maison des grenouilles ?

Peut-être que le Pouffsouffle vivait dans une maison de grenouilles. Peut-être même que ses parents avaient été transformés en grenouille ! Le pauvre ! Le lionceau se releva du bassin pour retirer sa veste. Il faisait bien chaud à l'intérieur de la serre et maintenant, sa veste ne servait plus à rien. Il la posa dans un coin avant de retourner s'asseoir face au bassin, à côté du sauge.

La scène qu'il s'imaginait n'existait semble-t-il que dans son esprit, s'il en croyait Lance. Tomber dans la marre était en effet moins drôle que dormir dans l'herbe, et il comprenait mieux pourquoi son camarade avait un mauvais souvenir des grenouilles. Même si les grenouilles de la marre de son jardin avaient probablement tout autant un mauvais souvenir de lui et de sa tentative pour se fondre parmi elles.
Malgré lui, un petit sourire vint se dessiner sur ses lèvres tandis qu'il imaginait Lance-la-grenouille sauter dans la marre de son jardin en croassant. Ça aussi, c'était une scène qui n'existait que dans son esprit.

« Il y a plein de grenouille dans la marre ! Mais elles ont pas la même couleurs que elles, elles sont plus marron. » commença-t-il, avant de froncer le nez, comme venant de se rappeler de quelque chose de déplaisant « Enfin ça dépend quand, quand je vais rentrer à la maison elles seront cachées. »

Parce que oui, les pauvres grenouilles du Pays de Galles ne subissaient pas les mêmes saisons que celles de la serre tropicale, alors, lorsqu'il retrouvera sa famille, nulle doute qu'elle seront en train de dormir, bien cachées. L'hiver, quand on était une grenouille de la marre, ça ne venait pas avec des réunions de famille autour de la cheminée en grignotant des biscuits à la cannelle. C'était plus rude, plus froid, plus dangereux aussi. Alors il fallait se cacher et ne pas se montrer, même pour les beaux yeux d'un petit garçon qui les aimait beaucoup.

Les doigts dans l'eau, l'esprit du petit Poufsouffle se perdit doucement dans ses souvenirs de batailles de boules neige avec ses cousins près de la marre gelée par petits bouts, et de goûters à base de chocolat chaud dans la chaleur de la cuisine. Il avait hâte de retrouver tout ça, s'échapper du château, loin des bancs farceurs, des repas bruyants et du manque de mamans.

« C'est dans combien de jours les vacances ? » tomba la question de Brynn, en même temps qu'il la pensait.

Le petit garçon n'était pas très bon, pour se repérer dans le temps. Il savait simplement que cela faisait longtemps qu'ils étaient à Poudlard, et que les vacances étaient censées être dans pas longtemps. Ce qui était tout de même assez vague, même si assez prometteur. Peut-être Lance faisait-il partie de ces enfants qui comptaient les jours avant la libération ?

Combien de jours restaient-ils avant les vacances ? Si Lance ne comptait pas les jours, il connaissait par contre la date exact. Consciencieusement , il compta sur ses doigts. C'était le 21 et nous étions le 2.

- Dans dix-neuf jours ! Les vacances c'est dans dix-neuf jours et on pourra rentrer chez nous. Je rentrerai à Winchester et il fera moins froid. Je retrouverai mon lit et mon papa ! En plus ce sera Noël et on va avoir des cadeaux. Je vais revoir ma mamie et ma maman. Et Harbey va faire trop bien à manger et...

Le petit s’arrêta car il sentit sa gorge se bloquer. Il n'en avait pas prit conscience jusqu'à maintenant, mais sa maison lui manquait terriblement. Pour cacher ce qui le perturbait, le lionceau renifla nonchalamment.

Son père, sa mère, Harbey. Et même son frère qui pourtant était dans l'école. Tous lui manquait.

Malgré le dortoir chaleureux de sa salle commune et ses voisins de lits, la nuit, le garçon se sentait terriblement seul. Lorsqu'il se réveillait le matin, il ne sentait pas les tartines qu'Harbey était en train de faire griller pour lui. Dans les couloirs glacials, il pensait à la cheminée du manoir. Lorsque sa grand-mère s'en occupait, il y brulait un grand feu capable de réchauffer la grenouille la plus gelée du fond du jardin. Lorsqu'il sortait dans le Parc, il pensait à La Manche où il allait en weekend avec ses parents. Une petite demi-heure à balai et ils se retrouvaient tous sur les plages qui faisaient face à la Normandie.

En se frottant rapidement les yeux, le lionceau demanda de son plus bel accent anglais.

- Toi, c'est où chez toi ? Tu es pas d’Écosse mais tu parles pas pareil.

Il avait reconnu que Brynn ne prononçait pas les mots de la même manière que lui. Pour autant, il ne parlait pas comme ses amis écossais non-plus. Le petit savait que les différents accents indiquaient souvent l'origine des gens, mais il n'était pas encore capable de relier lesquels venaient d'où. En même temps, il détournait l'attention de ce qu'il venait de balancer à haute voix malgré lui.

En entendant le peu de jours qu'il restait avant les vacances et toutes les choses que Lance brûlait de retrouver ou de faire, l'esprit de Brynn s'emballa, lui aussi. Ce sera Noël, c'était vrai, mais avant ça ce sera Yule, puis ils ouvriront leurs portes pour Mari Lwyd, et il verra ses cousins, Oncle Rhys, son Almy, et puis surtout toute sa famille ! Puis ses chats, et Esbrouffe, et toutes ses peluches qui n'avaient pas pu venir. Et puis il y aura la nouvelle année et sûrement qu'ils iront profiter de l'effervescence des fêtes pour aller à Clacton le temps d'un après midi ?

Cela faisait beaucoup de choses à imaginer, et Brynn se plongeait dans ses souvenirs, un sourire aux lèvres, se remémorant quelques après midi à boire des boissons chaudes près de l'âtre, à cueillir du houx, symbole du renouveau, ou à modeler des petites décorations, entouré d'une odeur chaude d'épices variées.

« C'est au Pays de Galles ! Avec le dragon ! »

S'il n'avait pas parlé d'Écosse, probablement que le petit garçon lui aurait répondu le nom de son village, mais l'évocation de l'Écosse lui avait fait comprendre que son camarade était probablement davantage intéressé par la nation dont il venait que par l'emplacement de sa maison.

« Toi non plus, tu parles pas pareil » ajouta-t-il toutefois, soucieux de préciser qu'à ses yeux c'était Lance qui ne parlait pas comme il en avait l'habitude, et non pas lui. « C'est qui Harbey ? Moi j'ai hâte de revoir Llew, mon chat ! Puis ma famille aussi. Et décorer l'arbre de Yule ! »

Le voilà qui était pris d'un enthousiasme enfantin qui le rendait plus exclamatif que d'habitude.

- Harbey ? C'est l'elfe de maison de chez moi. Il est vieux, il est grognon mais il est super gentil et il cuisine trop bien. On dirait qu'il devine ton plat préféré ! Tu veux des cupcakes pour le goûter ? Boom, il en fait ! De la pizza au petit déjeuner ? Et bam ! En voilà !

Brynn venait du pays de Galles ? Inconsciemment, le lionceau associa l'accent du Poufsouffle au pays. Il le reconnaitra probablement s'il l'entendait à nouveau. Il était presque jaloux de l'animal qui symbolisait le pays de son camarade. Quoi de plus stylé qu'un dragon vraiment. Pour l'Angleterre, c'était un lion. C'était chouette mais redondant avec l'animal qui symbolisait sa maison à Poudlard. Le garçon était donc un lion-lion ? Il faudrait qu'il essaie de rugir pour voir.

- Le pays de Galles ? Oh, t'a un chat ! Trop bien ! Moi je voulais un chien mais mes parents veulent pas. Ils disent qu'on s'en occupera mal. Mais c'est pas grave, un jour j'en trouverai un et je l'adopterai et ils auront pas le choix !

Il avait dit ça très sérieusement. Le petit en était persuadé, le destin lui ferai croiser un petit chien et ils deviendraient amis pour la vie comme dans les livres d'histoire.

- Tu as commandé quoi pour Noël ? Moi jvoudrais un balai mais il est trop cher celui que je veux.

La yajirushi était en effet hors de prix pour les finances de Blacksword qui, plus le temps passait, plus se réduisaient. Inconscient de cela, les enfants avaient pour autant remarqué que malgré leur grande maison, on évitait les dépenses inutiles chez eux. Mais pour le moment, Lance était trop jeune pour le comprendre.

Harbey était donc un elfe de maison qui cuisinait de la pizza pour le petit déjeuner. Si Brynn trouvait l'idée étrange, il ne put que sourire à son camarade, face à l'enthousiasme qu'il affichait, même s'il tiqua un peu ensuite sur quelques éléments de la suite.

« J'ai rien commandé pour Noël », commença-t-il, un peu hésitant, puisque chez lui on ne commandait pas « Mais j'aimerais bien avoir un livre sur les crapauds harmoniques ! »

En réalité, ce que le petit garçon voulait changeait en fonction des jours, mais cela tournait globalement autour des créatures magiques et des amphibiens. Il était en effet assez absorbé par les crapauds et les grenouilles, depuis la rentrée, ayant découvert à la fois les crapauds harmoniques, les grenouilles de la serre Tropicale et les courses de crapauds à la menthe avec Elin. Son autre souhait, plus profond, aurait été de rester dans sa famille après les fêtes, mais il savait que c'était un vœu qui n'était pas réalisable. Et puis, il commençait tout de même à s'attacher à quelques aspects et personnes du château, malgré tout.

« J'espère que je pourrais ramener Llew après les vacances, il me manque » ajouta le petit garçon, soudain un peu triste. « On peut avoir un chien, à Poudlard ? »

Il n'avait jamais vu de chiens, à Poudlard, mais il ne savait pas si c'était parce que ça n'était pas autorisé ou tout simplement parce que dans la communauté sorcière, les chiens ne faisaient pas tant partie des mœurs.