En ce froid mais ensoleillé matin de janvier, Dakota avait gravi les marches menant jusqu'à la volière, une lettre à la main. Pénétrant dans la tour, elle chercha Wolfgang, la chouette de Weston. Celle-ci l'avait vu arriver et vint se poser sur son avant-bras. Elle lui caressa un peu la tête puis lui confia sa lettre.

Chers Jared, Porter et Kasen,

J'espère que vous allez bien et que vous n'en faites pas voir de toutes les couleurs à Frances. Pas toi Kasen, je suis sûre que tu es sage, comme d'habitude. J'ai adoré ton dessin, merci ! Tu dessines de mieux en mieux. Je suis sûre que grâce à toi, on aura un artiste dans la famille. Vous me manquez beaucoup et je suis très triste de ne pas avoir fêté Noël avec vous. J'espère vous revoir bientôt, peut-être aux prochaines vacances.

Ici tout va bien, les cours sont toujours aussi passionnants, enfin certains cours en tous cas. En Sortilèges, on a commencé à étudier les sortilèges de feu, c'est génial ! Vous verriez les flammes que j'arrive à produire. Dommage qu'on ne puisse pas utiliser la magie à la maison, vous auriez été impressionnés !! En Métamorphose, on a transformé des rats en verres à pied. J'ai adoré. Vivement que vous soyez à Poudlard pour que je puisse vous montrer tout ça ! Weston, Sullivan et Virginia vont bien aussi. J'espère qu'ils vous écrivent pour vous le dire. Enfin, pour Sullivan, on peut toujours rêver.

Embrassez Frances et Milo de ma part, et obligez les parents à passer un peu de temps avec vous de temps en temps. Demandez leur si on pourra revenir en février. Et écrivez-moi !

Je pense très fort à vous,
Je vous embrasse,
Dakota

En sortant, elle se pencha contre le muret, admirant le paysage grandiose qui s'étalait devant ses yeux. Mais le voyait-elle vraiment ? Une légère mélancolie l'étreignit et en lieu et place du lac et des montagnes apparurent la forêt, la mer et sa chère Sea Wood's House, ses frères chahutant dans le parc du domaine. Elle entonna un chant celtique qu'elle murmurait souvent à l'oreille de ses petits frères lorsqu'elle leur racontait l'histoire du Secret de Kells avant qu'ils n'aillent dormir. Elle avait trouvé le disque dans le grenier de son grand-père et il l'avait autorisée à l'emprunter. Elle se demandait vraiment où il avait pu trouver ce genre d'histoires, lui qui était un anglais pur souche et fier de l'être. Elle s'imaginait qu'il avait eu une aventure avec une belle écossaise dans sa jeunesse, mais que ses parents lui avait interdit de la revoir. Elle n'avait jamais osé lui poser de questions, il était plutôt caractériel et elle ne voulait surtout pas réveiller son courroux. Elle avait appris par coeur l'histoire et les chansons qui allaient avec en les écoutant chaque soir sur son gramophone magique.

Depuis qu'elle était entrée en troisième année, Cheryl n'avait plus à suivre des cours qui ne lui plaisait pas et elle s'était davantage orientée vers les sortilèges, son objectif étant de devenir professeure de défense contre les forces du mal. Et mine de rien, cela lui faisait un grand bien d'étudier les sortilèges. Qu'est-ce qu'elle adorait ça. Et ce qu'elle aimait encore plus, c'était de s'entraîner de son côté et de remarquer des progressions.

C'est pourquoi ce jour-là, elle se rendit à la volière, assez tôt dans la matinée pour envoyer sa lettre destinée à ses parents.

Maman, Papa,

J'espère que vous allez bien et que vous avez passé de bonnes fêtes. Pour ma part, je me suis plutôt bien amusée ! On a fait un Secret Santa avec les autres Serpentard. Si vous savez pas ce que c'est, le but est de piocher le nom d'un camarade et de lui offrir un cadeau, mais la personne en question n'est pas au courant.

J'ai repris les cours il y a deux semaines et tout se passe bien. Je suis tellement contente d'avoir pris la filière Auror, j'attendais que ça depuis mon arrivée à Poudlard. J'aimerais tant vous montrer les sortilèges que je peux lancer. Peut-être un jour.

Je vous embrasse fort,

Cheryl.

Alors qu'elle montait les escaliers, la rouquine entendit une voix chantonner. Un chant dans une langue qu'elle ne maitrisait pas. Sa curiosité prit le dessus et la jeune fille se mit à s'avancer d'un pas délicat pour que la voix féminine ne l'entende pas. Une fois qu'elle eut une vue dégagée sur la personne en question, elle vit alors Dakota, une élève de sa promo. C'était donc elle qui chantait.

— C'est en quelle langue que tu chantes ? demanda-t-elle sans attendre qu'elle finisse son chant.

Dakota se laissa entièrement absorbée par la mélodie si douce et mystérieuse qui s'échappait de ses lèvres. Elle l'avait tellement chantée que les paroles s'écoulaient sans qu'elle ait besoin d'y réfléchir. Sa voix se répandait aux alentours, claire et vibrante, en de pures harmonies. On pouvait sans nul doute affirmer qu'elle chantait merveilleusement. Elle pratiquait le chant depuis sa plus tendre enfance sans jamais vouloir en faire une performance, même si elle avait reçu des cours, tout comme ses frères et soeurs qui ne partageaient guère son enthousiasme. Elle n'avait jamais songé à s'en servir autrement que pour son propre plaisir et celui de ses proches qui adoraient l'entendre chanter. Pour elle, c'était simplement un moyen d'expression, une méditation où elle se perdait dans la beauté des sons. Elle avait toujours pensé que la voix était le plus extraordinaire des instruments, et elle la voyait comme un don du ciel, que chacun possédait.

Une voix l'interrompit, la sortant de sa rêverie. Elle se retourna et tomba nez à nez avec Cheryl Styles, une élève de sa promotion. Elle la connaissait peu et n'avait jamais cherché à la côtoyer davantage, la trouvant assez hautaine. Mais elle appréciait sa façon de s'habiller, assez élégante et recherchée. Sans préambule, elle lui demanda en quelle langue elle chantait. Elle n'aima pas spécialement sa façon de l'aborder mais essaya de ne pas avoir d'aprioris, comme elle le faisait toujours lorsqu'elle rencontrait quelqu'un.

« Bonjour Cheryl. » commença-t-elle avant de répondre à sa question, même si la Serpentard n'avait visiblement pas prévu d'être polie.
« C'est un mélange d'anglais et d'une langue gaélique, de l'Irlandais je crois, mais je ne me suis pas vraiment renseignée, ça pourrait aussi être de l'Écossais. Je ne parle pas gaélique mais je connais la traduction de cette chanson. »
Dakota se demandait si elle était réellement intéressée ou si elle avait autre chose en tête. Après tout, elle ne lui avait jamais vraiment adressé la parole. Peut-être appréciait-elle la musique ? La Gryffonne décida d'en apprendre plus sur elle malgré leurs apparentes différences. « Tu aimes chanter ? » Peut-être que cette conversation se révèlerait intéressante.

Un "Bonjour Cheryl" qui était considéré par la rouquine comme du mépris. Effectivement, cette dernière ne l'avait pas salué, mais était-ce dramatique ? La Serpentard ne lui avait déjà parlé et voilà qu'elle ne l'appréciait déjà pas. Bien que l'envie de lui jeter une chouette sur la tête lui effleura l'esprit, la jeune fille se contenta de rouler des yeux et s'approcha d'un hibou pour lui confier sa lettre.

— Je vois, fit-elle en hochant légèrement la tête. Tu parles plusieurs langues du coup ? Ou c'est juste que tu chantes sans savoir ce que ça veut dire ? continua-t-elle, en caressant la tête du hibou blanc qui avait pris en charge sa lettre.

La troisième année murmura un "merci" à l'animal avant de le voir s'envoler devant elle. Le chant était l'une des passions de la jeune sorcière, avec la danse sans doute. C'était d'ailleurs pour cette raison qu'elle avait décidé de rejoindre le choeur des grenouilles, bien qu'elle ne s'était toujours pas habituée au fait de devoir tenir une grenouille en chantant.

— Oui, j'aime beaucoup ! Je fais partie de la chorale d'ailleurs. Tu pourrais peut-être nous rejoindre, non ?

Cheryl estimait effectivement que Dakota avait une belle voix, mais elle n'allait certainement pas lui dire de façon explicite.

— Enfin, rien ne dit que Mister Tripplehorn te prendra, mais on sait jamais, ajouta-t-elle en abordant un sourire que certains qualifieraient de faux.

Cheryl n'eut pas l'air d'apprécier son "bonjour". On aurait dit qu'elle prenait ça comme un reproche, même si ce n'était pas l'intention de Dakota. La Gryffonne n'en fut pas gênée pour autant. Elle savait très bien qu'on ne pouvait pas s'entendre avec tout le monde et ne cherchait pas à se faire apprécier à tout prix.

« Non, je ne parle que l'anglais. Mais je comprends ce que je chante parce qu'avec le vinyle il y avait un livret avec les chansons et leur traduction. C'est une chanson qui parle du chat d'un moine du IXème siècle, Pangur Bán. »

Cheryl confia sa lettre à un hibou blanc et confirma qu'elle aimait beaucoup chanter elle aussi. Elle faisait même partie de la chorale de l'école, que l'on pouvait entendre quelques fois dans l'année. Elle lui proposa alors de les rejoindre. Dakota ignorait si la Serpentard avait apprécié sa voix ou si c'était simplement qu'il leur manquait du monde. Elle se dit soudainement qu'elle était en train de se moquer. Mais les membres de sa famille avaient assez fait l'éloge de sa voix pour qu'elle mette rapidement cette idée de côté. Elle n'avait jamais pensé auparavant à rejoindre le Choeur des Grenouilles. Chanter lui venait naturellement mais elle ne ressentait pas le besoin de se produire devant un public.

« Ah oui, c'est vrai qu'il y a une chorale au château. Je ne sais pas trop, c'est vrai que j'aime beaucoup chanter, mais de là à le faire devant toute l'école... » Dakota réfléchissait tout en essayant de formuler une réponse. « Ça consiste en quoi exactement ? Vous vous réunissez régulièrement ? » Cheryl ajouta qu'il faudrait encore que Mister Tripplehorn l'accepte. « Il faut passer une sorte d'audition ? » L'idée ne l'enchantait pas. Mais c'était sans doute inévitable pour que la chorale fonctionne.

Un chat ? La jeune sorcière fut tout à coup davantage intéressée par la musique que chantait Dakota. La rouquine adorait les animaux, en particulier les chats. On disait même qu'elle n'était pas la même avec ces créatures qu'avec les êtres humains. Savoir qu'une chanson sur un chat avait été écrite au IXème siècle, c'était impressionnant mine de rien. Les chats existaient donc déjà. Avaient-ils la même forme qu'ils ont maintenant ?

— Je savais pas qu'il y avait des chansons sur les chats ! Encore moins au XIème siècle, fit la rouquine, les yeux illuminés.

En parlant du choeur des grenouilles, la Gryffondor posa plusieurs question à la jeune Styles, témoignant d'un certain intérêt. Pour l'instant, combien étaient-ils dans la chorale ? 6 ou 7, si sa mémoire était bonne.

— Tu peux toujours tenter, et si ça te plait pas tu pourras quitter la chorale, dit la jeune fille en haussant les épaules. On fait des petites réunions de temps en temps, des répétitions... Et on tient des grenouilles, ajouta-t-elle en affichant une moue dégoutée. M'enfin, ils sont attachants. Le mien s'appelle Luciano. Il est hyper timide.

Elle se souvenait encore du jour où Luciano lui avait été attribué. Sa bouille toute timide avait fini par le rendre adorable.

— Oui, il faut passer une audition. Tu te présentes devant le chef de choeur et tu chantes, répondit-elle de façon concise.

Cheryl eut l'air de s'adoucir lorsque Dakota parla de chat. Elle devait aimer ces animaux.
« Oui, c'est drôle. Pangur Bán était un chat tout blanc. Dans le poème, le moine compare son travail de copiste à un chat qui chasse les souris. Peut-être parce que c'est répétitif ? » se demanda-t-elle tout haut.

La Serpentard lui proposa d'essayer et lui dit que si ça ne lui plaisait pas elle pourrait toujours abandonner. « Oui, tu as raison, je devrais peut-être essayer, je suis sûre que ça pourrait me plaire. Je vais y réfléchir sérieusement. » Mais au fond d'elle même, elle n'était pas sûre d'avoir le courage de sauter le pas. Elle lui confirma aussi le fait qu'il faudrait qu'elle passe une audition et ses doutes augmentèrent encore. Ce n'est pas qu'elle avait peur. Elle avait confiance en elle et savait qu'elle avait une belle voix. Mais pourquoi elle plutôt qu'un autre ? Il devait y avoir des tas d'élèves avec une belle voix à Poudlard. Mais elle laissait malgré tout la possibilité ouverte. Elle ne prenait pas assez le temps de chanter sérieusement et c'était pourtant une activité qui l'apaisait. « Il va falloir que je trouve une chanson pour l'audition alors. Tu crois que celle que je chantais quand tu es arrivée pourrait aller ? »

La rousse lui parla aussi des grenouilles que les solistes tenaient quand ils chantaient devant les élèves. Dakota se souvint que c'était des crapauds harmoniques. « Ah oui les grenouilles ! Elle sont mignonnes et ça fait un joli accompagnement ! Elles sont sages pendant les répétitions ? »

Pangur quoi ? Bon, peut-être bien qu'à l'époque, ils aimaient déjà les chats, mais ils ne savaient pas les nommer correctement visiblement. Ce moine en question avait trouvé une belle comparaison, aux yeux de Cheryl. Enfin, ça c'était si tous les chats chassaient les souris. Son chat, Dami, en avait peur. Elle se souvenait encore de ce jour où sa petite boule de poils s'était cachée sous le drap alors que la jeune fille tentait tant bien que mal de chasser une souris de chez elle.

Dakota semblait emballée par l'idée d'auditionner. C'était pas plus mal. Après tout, ils n'étaient pas si nombreux que ça dans la chorale, et puis le maestro était si gentil et attentionné. On voyait qu'il aimait réellement ce qu'il faisait. Même durant son audition, la rouquine s'était sentie tellement à l'aise face à lui.

— Franchement, y'a moyen. A vrai dire, tout peut convenir. Essaye juste d'y mettre tout ton coeur, le maestro va aimer ! conseilla-t-elle jovialement.

C'était même à se demander s'il y avait des gens qui avaient raté l'audition. Peut-être des gens qui chantaient comme des casseroles.

— Un joli accompagnement, m'ouais, fit la Serpentard. C'était quand même une drôle d'idée d'intégrer ces animaux dans une chorale. Elles ont toutes leur petit caractère. Avec Luciano, je dois impérativement m'entraîner en étant entourée d'autres sorciers, sinon il veut pas. Y'en a d'autres qui sont inséparables, un qui est gourmand, bref, y'a de tout ! Mais globalement, elles sont sages oui, expliqua la troisième année en laissant échapper un sourire.

Au fil de leur discussion, l'attitude de Cheryl s'était complétement transformée. Si elle avait su qu'il suffisait de parler un peu avec elle pour qu'elle devienne aussi agréable. Elles avaient visiblement un goût commun pour le chant et elle se dit qu'elles pourraient bien s'entendre au final. Et c'était tant mieux si elle finissait par intégrer la chorale. Elle auraient à se côtoyer plus souvent.

Elle approuva son choix de chanson et lui confia que tout pourrait convenir tant que ça venait du coeur. Dakota se dit que c'était la chanson parfaite. Celle qui faisait remonter de bons souvenirs à la surface et qui la faisait frissonner d'émotion. « Super, je vais encore prendre le temps d'y réfléchir un peu, mais c'est vrai que ça me fait envie. »

Ces petites grenouilles avaient l'air trop mignonnes. Elle avait hâte de les rencontrer. « Ça doit être assez drôle de chanter avec elles. »

Cette rencontre fortuite l'avait fait réfléchir à une nouvelle activité possible et elle était contente d'avoir découvert Cheryl sous un jour nouveau. Mais il était temps de se mettre à ses devoirs, ce qui ne l'enchantait guère. « Merci de m'avoir parlé de la chorale. Je vais devoir y aller, mais on s'y croisera peut-être bientôt ! Passe une bonne journée ! » dit-elle en lui souriant. Et elle descendit les marches en réfléchissant à son hypothétique audition.

Merci pour ce RP !

On dirait que Cheryl avait réussi à persuader la Gryffone à intégrer le choeur. Finalement, elle avait laissé de côté la mauvaise impression qu'elle avait eu d'elle lorsqu'elle lui avait adressé la parole au tout début. En grandissant, la rouquine perdait peu à peu son mauvais caractère. Enfin, il était bien entendu, toujours présent. Seulement, elle arrivait à devenir agréable par moment — après tout, une petite pique ou un regard mauvais n'était jamais de refus.

Pour être drôle, oui, ça l'était. En intégrant le choeur des grenouilles, la troisième année n'avait pas idée que ces animaux pouvaient tant être différents, les uns que les autres. Chacun avait véritablement son petit caractère, ce qui les rendait attachants, parfois énervants. C'était drôle de voir les autres membres du choeur se soumettre aux désirs des grenouilles pour les faire chanter.

— Je t'en prie. J'espère que tu nous rejoindras ! répondit la jeune fille en lui souriant.

Dakota avait disparu du champ de vision de la rouquine, qui resta quelques minutes de plus dans la volière, à admirer le paysage, caresser les hiboux et les chouettes qui trainaient, avant de descendre à son tour et rejoindre sa salle commune et se blottir devant la cheminée. Après tout, il faisait pas chaud par ici. Le courant d'air et les battements d'ailes des oiseaux n'arrangeaient rien.

Merci à toi pour ce RP !