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29 févr. 2024, 18:53
Samhradh Innseanach – L’été indien
Parc de Poudlard, plaine herbeuse entre le stade de Quidditch et le Lac Noir
Jeudi 28 septembre 2048, 17h51
@Iphis Diotimē
RPG+



Une petite brise humide soufflait dans le parc de Poudlard, il faisait frisquet, mais une bonne odeur de bruyère rappelait encore la douceur de l’été écossais. Bedelia était affalée sur le ventre dans la pelouse mouillée. Elle se tenait sur les coudes face à un gros bouquin assez abîmé, Plantes aquatiques magiques des lacs d'Écosse d’Hadrian Whittle, qu’elle contemplait avec un mélange d’incompréhension et d’effarement. Elle n’irait décidément pas faire trempette dans le lac de sitôt !

La petite fille portait un uniforme de sport constellé de tache de boue et on pouvait apercevoir une grosse brindille prise dans ses cheveux derrière son oreille droite. Elle était venue s’installer dans cette grande étendue en pente derrière le stade de Quidditch juste après son cours de Vol. Bedelia ne se sentait pas très à l’aise dans le château, elle avait beaucoup de mal à se faire à la présence de tous ces gens, partout, tout le temps, et elle passait beaucoup de temps à essayer de se réfugier dans les endroits les moins fréquentés de l’école.

Le parc était un des lieux où elle arrivait le plus à s’isoler, mais attention, il ne fallait pas aller n’importe où dans le parc : le Cromlech, les serres et le parterre de l’amitié était presque aussi fréquentés que la Grande salle ! Ce soir-là, Bedelia s’était trouvé un petit coin pas mal, près de la rive Sud du Lac Noire, où personne ne venait trop s’aventurer.

Ici, elle se sentait presque normale, dos au stade et au château elle pouvait comme avoir l’impression qu’elle était chez elle, couchée face au Loch du Nord, occupée à observer les oiseaux. Mais des oiseaux, il n’y en avait aucun ce soir-là. Pas de petits Bécasseaux, pas de Courlis à pattes hautes et, surtout, pas de majestueux cormorans. Bedelia lança un regard pensif à sa belle plume de cormoran, qu’elle avait ramassée et taillée elle-même au mois d’avril. Sa collection de plume risquait de ne pas beaucoup s’étoffer pendant l’année scolaire…

Bedelia restait concentrée sur sa pauvre plume abandonnée dans l’herbe et sortie sa baguette en s’appuyant sur son coude gauche. Elle murmura tout doucement l’incantation « Wingardium Leviosa » et baissa la tête d’un air affligée. Évidemment, il ne s’était rien passé. Bedelia avait beau tout savoir du sortilège, de son invention par Jarleth Hobart en 1544 jusqu’à la réglementation en vigueur concernant son usage sur les êtres vivants, le cours sur ce sortilège n’aurait lieu qu’au mois de novembre.

La fillette s’était donnée pour mission d’apprendre vite et d’apprendre bien tous les sortilèges qu’elle pourrait pendant son séjour à Poudlard. Elle n’aurait pas supporté que tout ce temps passé à l’école des sorciers soit inutile en plus d’être franchement incommodant.

456 mots
Dernière modification par Bedelia Jones le 18 mars 2024, 22:50, modifié 1 fois.

Couleur : 6D107F

02 mars 2024, 23:56
Samhradh Innseanach – L’été indien
JEUDI 28 SEPTEMBRE 2048, 17h49
[20e Βοηδρομῐῶνος, Ol.706-4]
Sud-Est du Parc, non loin du Lac
Iphis, 1ère année, 12 ans


Ce Château me rend malade. La pierre s’est immiscée sous ma peau, gravant d’invisibles entailles. L’air est une absence, provoque une incessante asphyxie. Vingt-huit jours d’agonie, de poumons éraflés, d’organes atrophiés. Me mouvoir au sein de cette immense prison se révèle si ardu. Ni la faiblesse de mes jambes ni mon désir d’immobilité ne sont à blâmer. Seule s’impose la densité du Château. Nul espace pour respirer, nul espace pour exister. Cette île me semble toute entière faite de pierre. Un couloir vide ou une étendue frappée par le vent ne résolvent rien. La Foule, dans toute sa monstruosité, n’est pas l’entité dérobant l’oxygène. Non, l’oxygène est absent en premier lieu. Dans l’enceinte de l’école, rien d’autre qu’un vide étouffant. Mes poumons n’absorbent que de la pierre, un roc pesant et implacable. Marcher au cœur d’un espace dénué d’air, d’une absence si marquée qu’elle semble pétrée. De pierre, tout est de pierre, et je suis emmurée dans cette prison qui ne me laisse pas vivre. Ce Château est ma fin. Tout m’est dérobé par la pierre. Mon enfance et mes rêves, saisis et incarcérés entre les murs. L’impénétrabilité du lieu rend vain tout espoir d’y échapper saine et sauve. Poudlard me marque. Poudlard me tue lentement, prenant soin de laisser sur moi sa trace. Poudlard est un fantôme de pierre qui me hante et ne me quittera plus jamais— vingt-huit journées et déjà je l’ai compris.

Ici, les Dieux semblent lointains. Agenouillée sur l’herbe, carnets et livres dispersés dans mon dos, je le réalise avec une acuité nouvelle. Les jours sont des mesures arbitraires et non plus des voyages cycliques d’Hélios et Séléné. Pas un seul Agathos Daimon ne se cache dans la bâtisse immense et pourtant si réduite. Le monde est hors de portée. Au loin, le ciel est le même, aussi infaillible qu’il n’est inatteignable. Les ombres divines sont des esquisses qu’il m’est soudainement pénible de percevoir, cheminement de dévotion nécessitant un effort que je n’ai jamais connu auparavant. Le Château est son propre dieu, écrasant tout le reste, liminal et tout autant irréel qu’accablant. Ou plutôt, les Dieux semblent s’être retirés de cet espace, avoir tracé ce vide. La pierre est leur absence. Au plus profond de moi, je sais que ces impressions sont teintées d’impossible. C’est en moi que réside la distance. Ils ne peuvent m’abandonner. Mais je peux les fuir. Je ne crois pas fuir, pourtant. Pas eux. Je me fuis, moi— et ce que la pierre fait de moi. L’enfant malmenée par le Château, je la fuis. Ce que ce lieu fait ressortir en moi, ce qu’il façonne à partir de mon être, je le fuis. Mais je ne peux courir, je ne peux m’évader hors de moi. De chair mon corps devient pierre-prison, l’effet du Château plus efficace que le regard de la Gorgone. Même elle, autour de mon cou, autour de ma canne, ne peut me sauver désormais. Que peut l’apotropaïque quand le Mal est partout ?


« Diffindo, » en un souffle. Le catalyseur, s’il était entre mes doigts depuis le début de ma perdition, aurait dû se briser. Mais je l’ai compris : la baguette me poursuit malgré mes efforts pour la repousser. Seule reste la possibilité d’embrasser ce qu’elle représente. Et la destruction qui monte en moi, l’exhalante volonté de réduire en pièce quelque chose, le calme avec lequel je rêve ma démolition, main dans la main avec celle du Château, est si aisée à accepter. Ce sort, je l’ai longtemps étudié. En avance, comme tant d’autres qui m’intrigue. Je m’adapte à lui sans effort, les flux d’Hécate empruntent sa voie avec une détermination glaciale. De loin, je ne ressemble qu’à une enfant qui s’entraine. Et je m’entraine ; un murmure, et le sol est barré d’une entaille profonde. En miroir, reflétant à la perfection l’effet que le Château a eu sur moi. Comme la Magie britannique détruit ! Quelques syllabes et l’horreur s’ensuit. Ma respiration est si calme qu’elle me surprend. Presque inaudible. Précautionneusement, je me laisse tomber sur le côté, allongée dans l’herbe humide. Un léger sourire escalade mon être et se loge au creux de mon visage, étirant mes lèvres.

premier cycle
solit[air]e

28 mars 2024, 19:33
Samhradh Innseanach – L’été indien
Bedelia n’allait pas se laisser abattre aussi rapidement. Après tout, l’apprentissage des sortilèges demandait de la patience et de l’opiniâtreté. Elle révisa les mouvements de la baguette et l’intonation de la formule quelques fois avant de tenter un deuxième essai. La petite fille se redressa sur ses avants bras, s’installa en position assise et prit une grande inspiration. Les yeux fermés, elle fit le calme dans son esprit. Elle écarta les sensations encombrantes de l’herbe mouillée et du vent dans ses cheveux pour se concentrer sur le sortilège de lévitation. Elle pouvait assez naturellement visualiser la plume flotter dans son esprit. Bedelia se saisit doucement de sa baguette avant d’ouvrir les yeux et de prononcer clairement : « winGARdium leviOsa. ».

Alors que la jeune fille tournait et abaissait fermement sa baguette, la plume noire s’éleva promptement dans les airs jusqu’à atteindre le niveau de son visage. Elle voleta quelques instants sous son regard rieur avant de retomber délicatement sur l’herbe verte.
Bedelia se laissa retomber sur la pelouse avec une exclamation joyeuse. Elle contemplait d’un air sérieux le ciel bleu qui s’étendait à perte de vue lorsqu’elle entendit un craquement sinistre derrière elle.

Elle se redressa vivement et se tourna dans la direction du son étrange venu perturbé son moment de gloire. Elle ne vit qu’une silhouette allongée dans l’herbe à quelque chose comme trente pieds de là où elle se trouvait. La petite fille fut très surprise, il était rare qu’elle se laisse surprendre par quelqu’un d’autre. Elle aurait dû se méfier du bruit du vent, traître qui avait camouflée la présence de l’inconnu.

Bedelia se précipita pour ramasser ses affaires éparpillées autour d’elle. Dans sa hâte, la fillette déchira un morceau de l’illustration des strangulots de la page 117 de Plantes aquatiques magiques des lacs d'Écosse. « Peste » murmura-t-elle doucement avant de rebrousser chemin vers le château à grandes enjambées. Elle s’apprêtait à faire un grand arc de cercle pour éviter la personne qui avait dérangé sa quiétude lorsque Bedelia l’a reconnu soudain.

C’était Iphis Diotimē, une Gryffondor de première année. Bedelia n’avait vraiment pas fait l’effort de connaître ses camarades, mais Iphis faisait partie des rares personnes que la jeune fille avait vraiment remarquées. Il fallait dire qu’elle était assez remarquable, à se trimballer dans tout le château au bout de sa canne et à pratiquer des rites païens de bon matin dans le dortoir. Au-delà de ça, ce n’était pas la première fois que Bedelia la croisait dans le parc, elle avait même pris l’habitude de vérifier qu’Iphis n’était pas déjà là avant de s’installer dans un coin à l’extérieur.

À moindre distance, Bedelia pouvait aussi observer une sorte de très fine tranchée dans la terre près de la forme allongée d’Iphis. Elle n’avait pas oublié le bruit sourd qui l’avait alerté de la présence d’autrui et sa curiosité était piquée, elle entreprit de dévier de sa trajectoire et d’avancer en direction de l’autre jeune fille. Arrivée à son niveau, elle laissa glisser son sac à ses pieds, se passa une main dans ses cheveux emmêlés avant de déclarer nerveusement :
« Salut, c’est toi qui as fait tout ce boucan ? »

@Iphis Diotimē, 529 mots

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