En cette journée de St Patrick, Eileen avait misé sur le tout vert : du foulard qui tenait ses cheveux en une sorte de bandeau, en passant par le petit trèfle qu'elle avait épinglé sur sa cape et le ruban vert qu'elle portait au poignet en guise de bracelet, jusqu'au petit nœud vert attaché à une de ses chaussures. Elle avait hésité à récupérer les lunettes en forme de trèfle de sa mère qui faisaient voir la vie en vert mais elles étaient bien trop encombrantes et Abigaïl en ferait un meilleur usage qu'elle, là-bas, à Galway !

Des petites notes qui auraient pu paraitre étranges au badaud non averti mais qui ne manqueraient pas d'attirer l'œil d'un irlandais !

Même Mila a ses pieds portait un petit origami trèfle réalisé en papier coloré de vert sur son collier habituellement uniquement bleu. Après tout, comme chat d'irlandaise, elle se devait de répondre à la tradition. Il s'agissait que les lutins malveillants ne s'approchent pas trop près de sa féline ! Elle avait sourit en pensant à cette légende lorsqu'il avait fallu ajouter le trèfle à une Mila quelque peu étonnée. Elle n'avait pas l'habitude d'être attifée bizarrement par sa maitresse, elle avait déjà eu du mal à se faire à son collier et ce fut une Serdaigle patiente qui avait réussi à avoir gain de cause.

Quel meilleur lieu pour célébrer cette fête exceptionnelle que de se balader dans le parc ? Elle avait fini ses devoirs et s'était permis cette petite balade, rejoignant un parc qui reprenait ses couleurs verdoyantes, rappelant les vastes pâturages de son chez elle où paissaient les moutons.

Tandis qu'elle parlait à sa chatte d'un souvenir de St Patrick familial remontant à deux ans, Eileen entendit un air qu'elle connaissait bien... Tendant l'oreille, elle reconnut sans difficulté un chant de chez elle qui fit résonner sa corde sensible.

En s'approchant, elle reconnut l'infirmier de Poudlard qui l'avait bien aidé en début d'année et se permit, guillerette, de se joindre à lui en milieu de chanson. Elle n'était pas la meilleure des chanteuses mais se débrouillait tout de même. Et un irlandais qui mettait du cœur à l'ouvrage était toujours apprécié ! Mila intriguée s'arrêta nette pour regarder ce drôle de duo se former.

Après avoir demandé de l'aide à des élèves pour mettre l'infirmerie aux couleurs de l'Irlande, Diarmuid était retourné chez lui pour la matinée puis avait rejoint Domhall. Les deux frères avaient rejoint les festivités de la Saint Patrick avec plusieurs connaissances. Loin d'abuser de l'alcool, ça avait surtout été l'occasion de se laisser aller à des moments léger faits de rires, de musique, de danses... entre autre. Et puis était venu le temps de se séparer et le pédiatromage avait repris le chemin de Poudlard, mais sans quitter la tenue qu'il avait enfilé le matin même. Un pantalon vert assez foncé qui paraissait plutôt être noir avec des reflets d'émeraude, une chemise d'un vert pâle et une veste beige. Le doute n'était pas vraiment permis, c'était bien là un irlandais en pleine célébration. Mais si vous n'en étiez pas encore totalement certain, la broche trèfle épinglé à sa veste et le foulard vert noué en bracelet de son île natale devraient vous convaincre.

Alors qu'il était sur la barque le ramenant à Poudlard, il se mit à chanter à voix basse un air traditionnel et, petit à petit, à le faire de plus en plus distinctement. Les paroles étaient en gaéliques, donc incompréhensibles pour beaucoup mais n'était-ce pas là le propre de la fête dédiée à son pays? En foulant par la suite l'herbe encore humide de la fin de l'hiver écossais, se pensant toujours seul, il se permit de pousser légèrement le volume de sa voix et fut finalement rejoint par une autre, plus féminine et juvénile. Il tourna la tête dans la direction voulue et y découvrit une petite de son ancienne maison, l'uniforme paré d'accessoire qui ne laissaient paraître aucun doute. Il adressa un sourire à l'élève qu'il avait reconnue et termina le chant avant de lui adresser quelques mots: "Que l'Irlande et les irlandais ne tombent jamais." Ce n'était pas la formulation exacte, mais ils n'étaient pas en train de trinquer. Et prendre un verre, même d'une boisson non alcoolisée, avec une élève, il préférait s'abstenir.

Eileen sourit à la remarque et répondit d'un proverbe irlandais* :
- "Sceitheann fion firinne"

C'était faire beau jeu à la phrase que sa parentèle O'Brien disait en trinquant, bien que l'infirmier ne lui paraissait pas particulièrement alcoolisé...

Elle comprit que le proverbe pouvait être mal interprété dès qu'elle l'eut sortit. Non seulement, elle ne buvait pas d'alcool, mais encore elle ne voulait pas laisser entendre qu'elle en cachait quelque part...

Pour éviter toute incompréhension, elle poursuivit :
- "Il faudra trinquer au jus de citrouille !"

Et pour dévier le sujet, elle poursuivit :
- "J'adore votre tenue ! On est plutôt coordonné ! " rit-elle, espérant détendre l'atmosphère. "L'Irlande n'a pas tellement envahi le Château malgré notre fête du jour..." déplora-t-elle.

Mila avait du se rendre compte que sa maitresse avait fait une bourde, ou en tout cas, était en situation délicate, car rapidement, elle s'approcha de l'adulte et quémanda une caresse. C'était plutôt rassurant pour la Serdaigle de la voir agir ainsi car sa féline était d'un naturel méfiant, dû à sa moitié fléreur.

Puis, la rouquine fit référence à la malédiction qui guettait ceux qui ne portaient pas de vert en ce jour fatidique...
- "Vous avez vu un Leprauchaun dans le coin ? "

Elle pensait à sa matinée qui lui avait permis de voir le tableau d'un farfadet faisant des farces aux tableaux adjacents qui n'avaient pas de verts sur eux. Elle avait dû en référer au concierge pour que tout rentre dans l'ordre. Pour autant, elle savait que les Farfadets étaient une réalité. Elle l'avait vu dans son livre de Norbert Dragonneau. Elle avait même pu en voir un en vrai dans la zone SaCM le mois précédent. Il était donc tout à fait plausible qu'une telle rencontre soit possible... Ils étaient dans un monde magique après tout !

C'était le seul tableau faisant référence à l'Irlande qu'elle avait vu, mais elle n'était pas très amatrice d'art et s'interrogeait : d'autres références à son pays natal étaient-elles présentes à Poudlard ?
- "Vous connaissez probablement mieux Poudlard que moi..." Elle se disait qu'en tant qu'adulte, il devait être présent ici depuis longtemps et peut-être qu'il avait été élève ici avant elle... "des références à notre île sont-elles présentes dans le Château ?"

*Littéralement, "Le véritable amour coule ", proverbe signifiant "Les gens disent la vérité lorsqu’ils sont ivres"

Diarmuid sourit largement en entendant la réponse de sa compatriote qui était fort à propos après ce que lui même avait pu dire. Il assortit ce sourire d'un hochement de tête lors qu'elle mentionnait un jus de citrouille avant de déviez le sujet sur les traditions de la Saint Patrick. "Certains auront probablement été plus discrets que d'autres. J'ai la chance de pouvoir m'habiller complètement à ma guise quand les élèves doivent adapter quelques accessoires à leurs uniforme." Tempéra-t-il avant de proposer: "Trinquez à l'Irlande ce soir en début de repas. C'est ce que je ferais. Cela en déliera probablement quelques uns." Dit-il alors avec un clin d'œil avant de sentir le frottement du félin sur ses jambes.

Baissant la tête, il écarquilla les yeux. Voilà quelque chose qui ne lui arrivait pas souvent. L'irlandais eut donc un temps de réaction probablement plus long que la plupart des humains que côtoyait l'animal mais se baissa finalement pour caresser son épaule deux ou trois fois. Il se redressa pour répondre à la Serdaigle. "Pour tout avouer, je suis parti ce matin après ma nuit de travail et je viens seulement de revenir." Il désigna le ponton non loin derrière eux, l'exact endroit d'où il venait. "Mais je ne serais pas étonné qu'un ou deux farfadets ait été attirés par la concentration de sorciers en un jour si spécial. Vu leur nature, le contraire serait même particulièrement étonnant." Ajouta-t-il avec un air assez sérieux. Pas dans le sens rabat-joie, mais plutôt de celui qui expose des faits et non une théorie.

La suite de la discussion en revanche, le laissa moins sûr de lui. Il avait parcouru le château pendant plusieurs années en tant qu'élève et cela faisait deux ans qu'il était de retour, cependant il n'avait jamais cherché de mentions claires de l'Irlande entre ses murs. "Il y a quelques tableaux qui représentent des paysages irlandais. Je crois même qu'il y a une vue de Dublin du temps de la fondation de l'école. Et quelques irlandais célèbres bien entendu. Mais je ne crois pas qu'il y a de représentation qui soit spécifique à nos célébrations ou nous coutumes." Il avait une mine désolée de ne pouvoir plus l'orienter dans l'immédiat.

Eileen fut rassurée de voir que sa réponse irlandaise n'avait pas été mal interprétée. Au moins, l'un d'eux trinquerait comme au pays tandis que l'autre se contenterait d'un jus de citrouille. Et il fallait avouer que ce n'était pas pour déplaire à la jeune fille. Aussi bien l'idée qu'elle n'était pas la seule à célébrer la St Patrick, que celle consistant à penser que d'autres irlandais montreraient peut-être le bout de leur nez au diner ou encore qu'elle n'aurait pas à boire de l'alcool. Elle n'avait jamais goûté à une boisson alcoolisée mais rien que l'odeur ne lui donnait pas envie. Elle se demandait comme ses compatriotes pouvaient autant apprécier les boissons aux houblons notamment. En réponse à ce qu'elle venait d'entendre, elle fit un clin d'œil et frappa dans ses mains, en signe d'excitation.

La réaction de son interlocuteur à la venue de Mila ne lui échappa pas et d'ailleurs, la féline ne partit pas avant d'avoir quelques caresses. Il fallait avouer qu'elle était têtue.
- "Je suis désolée... Elle vous dérange... ?"

Elle était toute prête à sermonner l'animal ou du moins à la prendre dans ses bras pour qu'elle n'embête plus l'infirmier.

La suite étonna la Serdaigle. Elle n'attendait pas des explications quant à la tenue de l'adulte. Il n'avait clairement pas à se justifier vis-à-vis d'elle.
- "Au moins la St Patrick a-t-elle été célébrée comme il se doit !" déclara-t-elle joyeuse.

Puis elle rebondit sur la question des farfadets :
- "C'est donc la concentration des sorciers qui les fait venir ? Même en Ecosse ?" s'étonna-t-elle. Elle était particulièrement au fait des histoires que racontaient les moldus à leur sujet mais n'avait pas vraiment eu la possibilité de mettre la réalité magique en face pour comparer.
Elle s'attendait à ce que le petit peuple ne soit présent qu'en Irlande. C'était après tout leurs traditions et leur petit peuple !
- "Vous en avez déjà vu en liberté ? Ici ou ailleurs ?"

Ainsi, il y avait bien quelques références à l'Irlande dans son internat ! Mais il fallait avouer que cela n'était pas grand chose au regard de l'immensité du Château.
- "Ah, il faudra donc que je regarde mieux alors... Ils sont regroupés dans un endroit particulier ?"

Elle serait particulièrement heureuse de voir notamment la différence entre le Dublin d'autan et celui qu'elle avait connu lors du Noël de sa première année.
- "J'aimerais bien voir cette vue de Dublin ! Et les sorciers ! Et nos magnifiques paysages, je ne m'en lasse pas !"

Elle avait bien ramené une photo de bruyère qu'elle avait laissé dans la serre n°6 avec sa Mochara mais les références irlandaises lui manquaient beaucoup. Ils étaient en Ecosse certes, mais les O'Brien ne pouvaient pas être les seuls élèves irlandais n'est-ce pas !
- "Finalement, ma seule référence irlandaise ici est Mochara... C'est ma plante... Une bruyère rouge que j'ai cueilli à côté de chez moi... Parfois, ca me manque... Pas vous ?"

Et en y réfléchissant, elle avait évoqué avec son cousin la réalisation d'un match particulier à Poudlard, pensant que l'infirmier par son nom de famille devait être irlandais et pourrait être éventuellement intéressé pour arbitrer. C'était peut-être l'occasion de lui en parler ?
- "Je ne sais pas si vous êtes au courant... mais Etan O'Brien, qui est en 1ère année à Serpentard, est mon cousin... et il a eu une idée lumineuse au Nouvel An : on aimerait organiser un match de hurling à Poudlard. Il s'est même dit qu'on pourrait éventuellement lancer une version de notre sport national sur balai. J'ai pensé à vous pour joueur l'arbitre... Ca vous dirait si on avait l'autorisation ?"
Il fallait avouer que le hurling était un sport brutal, mais pas beaucoup plus que le Quidditch. Il y faisait penser en partie, ainsi qu'au baseball et au football. L'irlandaise avait l'habitude de matchs amicaux dans son jardin en famille le dimanche quand elle était à la maison et avait fait découvrir sa tradition à son cousin. Elle se demandait bien si l'infirmier était sportif...

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@Etan O'Brien pour la mention