...L'une de ses mains frôlait le mur de pierre alors qu'elle avançait, comme s'il pouvait de sa force incommensurable, compenser le maintien fragile que les jambes de la jeune fille n'avaient plus envie de lui offrir. Cette retenue, elle s'en souviendrait ! Est-ce que le concierge avait vraiment le droit de leur infliger ça ? Pas sur, mais elle n'était pas vraiment en position de force pour se révolter contre le système aujourd'hui.

La jeune fille n'avait avancé que de quelques mètres, juste assez pour mettre un virage entre elle et le lieu du châtiment, et accessoirement, entre elle et Mister Kohler dont le regard était aussi noir que "sa magie dont on ne devait pas prononcer le nom" aux dernières nouvelles. Enfin mise à l'écart, la Poufsouffle s'autorisa à enlever son masque de paraître, abandonnant sa fierté pour se laisser glisser dos le long du mur. Assise au sol, les jambes allongées devant elle, elle ferma les yeux en soufflant bruyamment.

Sa tête tournait, fort, trop pour lui permettre de se relever, crispant ses traits, Éli posa ses mains sur son visage, comme si elle pouvait atténuer son malaise en s'isolant du reste du monde. Elle ne faisait plus attention aux bruits qui l'entouraient, trop parasité par les bourdonnements d'oreilles qui commençaient à prendre part à la fête. Même si l'épreuve sportive qu'elle venait de subir avait largement contribué à l'apparition de ce vertige, elle n'était pas l'unique cause de cette sensation qu'elle connaissait par cœur maintenant. Miss Lloyd lui avait expliqué que ce genre de symptômes supplémentaires pouvait se rajouter à ceux de son Erisciusitelle pendant sa période de règles, elle en avait déjà fait l'expérience, et c'était de nouveau le cas aujourd'hui.

Si elle avait parfaitement intégré sa maladie maintenant, et la gestion particulière de sa vie avec, elle n'en ressentait pas moins de l'injustice dans ce genre de moment. La période hormonale complexe de cette semaine influençait déjà beaucoup son humeur, comme pas mal de jeunes filles de son âge, mais lorsque sa maladie venait lui rappeler une fois de plus sa présence dérangeante, la Poufsouffle ne maîtriser pas toujours ses nerfs.

- Kohler, va t'manger un expulso avec ta retenue de bouse d'éruptif là, sérieux !!!

@Alyssa Wright, @Suileabhan Kohler pardon

La démarche d'Alyssa était étonnamment instable alors qu'elle s'éloignait du lieu de la retenue. Une retenue durant laquelle elle n'avait eu ni à recopier des lignes, ni à écrire une lettre d'excuse, ni à produire un quelconque exercice sans signification... A quoi lui servait donc le patinage artistique et le Quidditch si cinquante pompes l'avaient achevée à ce point ? Il fallait dire que la jeune fille n'était guère habituée à ce genre d'exercice, auquel s'était ajouté des variables guères enviables telle que la présence d'Éli, de Redose et de Monsieur Kohler. C'était difficile de dire qui était le pire en fait.

Ceci étant, Alyssa avait bien l'attention de rejoindre rapidement le sommet de la tour de Gryffondor tout en négligeant la douleur dans ses jambes qui rendait sa démarche si difficile. Plus qu'un virage et les escaliers arriveraient devant elle, enfin... Un souffle particulièrement bruyant atteignit alors ses oreilles, l'obligeant malgré sa lassitude à tourner la tête.

Un geste qu'Alyssa regretta immédiatement car ce ne fut personne d'autre qu'Éli qu'elle vit alors assise par terre, appuyée contre un mur. Elle n'avait pas l'air bien. La blondinette marqua un mouvement d'hésitation. Ce n'était pas comme si l'état de son ancienne amie la préoccupait plus que ça... C'était plutôt bien même, de ne pas voir son sourire stupide flotter sur sa face ? Alyssa allait à nouveau tourner les talons dans un lever d'yeux vers le ciel lorsqu'elle vit la Poufsouffle plaquer soudainement ses mains sur son visage. Heu... C'est normal ça ?, se demanda-t-elle dans un froncement de sourcils.

Doucement, tout doucement, sans vraiment savoir pourquoi, la Gryffondor s'approcha d'Éli à pas de loup. Celle-ci poussa subitement une vive exclamation, Alyssa accusa un sursaut. Néanmoins, bien qu'elle préfèrerait encore sauter dans le lac que de l'admettre, elle se trouvait être plutôt du même avis que son ancienne amie. Kohler méritait même bien plus qu'un Expulso... Bref.

Éli semblait décliner de plus en plus. Pour être honnête envers elle même, la jeune fille ne pouvait empêcher une vague inquiétude se saisir d'elle en voyant le malaise emplissant visiblement sa camarade. Mais Alyssa n'était pas honnête avec sa tête, et tout ce qu'elle trouva alors à lancer en direction de la Poufsouffle fut :

- Bah alors, t'es déjà fatiguée par cet échauffement de pacotille ?

Bien que cette décharge de méchanceté, pas du tout gratuite, avait légèrement apaisé la colère de la jeune fille, elle n'en restait pas moins très remonter contre Miss Jenkins, contre Kholer, contre Alyssa, contre Redose, contre les pompes et tout ce qui pouvait se rapprocher d'une activité sportive, contre elle de ne pas avoir assez progressé pendant ses entraînements, contre le château qui n'avait que des murs froids pour s'y adosser, contre tout ... Tout l'énervé à cet instant, absolument tout.

Mais tout n'étais visiblement pas suffisant, puisque sa colère monta encore d'un cran en entendant SA voix. Les mâchoires de la jeune fille se crispèrent directement, relâchant l'emprise de ses mains sur son visage, elle dévisagea la griffonne qui la regarder avec son air suffisant. Est-ce qu'elle était fière de sa petite remarque-là ? Sérieusement !! La tête toujours en étau dans son brouillard, Éli fit le maximum pour reprendre un semblant de contenance, ne voulant pas montrer le moindre indice de faiblesse devant celle qui l'avait déjà bien assez humilier auparavant.

- T'aimerais bien ! Mais rien à voir, j'suis mal à cause d'une odeur de griffonne trop pressente dans c'couloir j'pense. Simulant deux doigts s'enfonçant dans sa gorge, et un reflex vomitif, Éli finit par coller un sourire sournois sur ses lèvres. T'as rien d'autre à faire que d'me mater là ? Oui, elle était censé arranger les choses avec Alyssa, ou au moins tenter de neutraliser le conflit, mais aujourd'hui elle n'y arrivait pas. Malgré son envie de répliquer encore, la vigueur qu'elle avait mis dans ses mots renforça son malaise, laissant passer une nouvelle grimace malgré elle.

Un sourire presque moqueur était apparu sur le visage d'Alyssa alors qu'elle tirait une nouvelle force de sa phrase bien culottée envoyée en direction d'Éli, les bras croisés contre sa poitrine, le regard suffisant. Le malaise qu'elle ressentait s'écrasait peu à peu pour laisser place à un certain triomphe de voir son ancienne amie à terre tandis qu'elle, bah elle était encore debout. Les mains de la Poufsouffle glissèrent alors de son visage, visage qu'Alyssa jaugea sans ciller, l'image fugace des blessures qu'elle lui avait causée quelques semaines auparavant s'imposa dans son esprit.

Elle n'hésiterait pas à recommencer. Et ce malgré tout le mal qu'elle avait pu ressentir après.

Le visage d'Alyssa se tordit alors dans une étrange grimace aux mots d'Éli. Houla, mime pas ça, j'vais vraiment te vomir dessus, pensa-t-elle avec effarement durant une fraction de seconde, reculant d'un pas... Avant que son effarement soit balayé par un certain intérêt : C'est que ça ferait une belle vengeance ça, dégoupiller sur l'autre là ! Un sourire sournois marquait désormais les lèvres d'Éli, sourire qu'Alyssa avait bien envie de balayer... D'autant plus lorsque la Poufsouffle poursuivit dans un sujet déplaisant fort à la blondinette.

- En attendant celle qu'on entend soupirer aussi fort d'un Troll, c'est bien toi, prononça alors celle-ci dans un rictus méprisant, les bras toujours croisés contre son torse.

Complètement insensible à la grimace flottant un instant sur le visage de son interlocutrice, Alyssa poursuivit d'un ton sarcastique :

- A ton avis ? J'essayais de trouver une vision pire encore que le concierge pour parfaire cette journée. Et je t'ai vue, mission accomplie.

La Gryffondor n'avait pas tort, Éli imaginait assez la vision déplorable qu'elle lui offrait à cet instant, le visage rougit par l'effort, la sueur qui rendait son front luisant, le souffle pas tout à fait redevenu serein, et ça l'énervait encore plus de lui offrir ça. Malheureusement, elle n'avait pas les armes pour faire mieux rapidement, la jeune fille n'avait que les piques verbales pour l'atteindre aujourd'hui, et encore. Attrapant son sac d'une main, elle fit semblant de chercher quelque chose dedans.
- Oh, si c'est qu'ça fallait l'dire, j'ai sûrement un miroir dans mon sac attends. Puis, d'un geste vif, elle ressortit sa main, le doigt d'honneur relevé fièrement, pour le présenter à Alyssa le regard noir.

Se sentant un peu mieux, et surtout pas très à l'aise pour répliquer en position de faiblesse, au sol face à Alyssa, Éli prit appui sur ses mains, plia les genoux pour se donner de la force, et se releva. Mauvaise idée, à peine la stature debout atteinte, la sensation de vertige repris bien plus fortement qu'avant. Une main posée sur sa tempe, l'autre contre le mur, la Poufsouffle plia légèrement son buste en avant comme pour se donner plus d'équilibre. Le couloir était devenu un vague espace flou, ou la silhouette de la griffonne ne lui importait plus. Cette embrouille était devenue secondaire finalement, toute son énergie était entièrement dédiée à la maintenir sur ses jambes le plus longtemps possible.

Éli n'avait qu'une envie, qu'Aly décide subitement de partir, pour lui éviter la honte de ce qui allait sûrement suivre, mais vu la posture de sa camarade, elle avait peu d'espoir qu'elle le fasse.
- Fait chier !

Si Éli ne figurait pas en tête de liste des personnes qu'Alyssa haïssait le plus au monde (sans exagération), nul doute que la jeune fille aurait éclaté de rire face à ce doigt d'honneur sorti tout droit du sac de la Poufsouffle qui n'avait strictement aucun sens à ses yeux. Mais là, c'était la fille qui l'avait indirectement jetée au lac, qui avait imaginé le plan machiavélique du kidnapping de Klee, qui avait raconté à son sujet n'importe quoi au concierge, qui avait fuit le combat dans les souterrains après l'avoir maltraitée...

Alors ce fut un rire froid qui sortit de la bouche d'Alyssa. Sans une grande réflexion, elle répliqua :

- Oui trouve ton miroir, regarde toi bi...

La jeune fille s'interrompit subitement, non pas en constatant qu'Éli se levait, mais en la voyant subitement tanguer. Ce n'est pas normal. Alyssa fronça les sourcils, un réflexe classique chez elle dès que la Poufsouffle apparaissait dans son champ de vision, certes, mais là elle commençait à se sentir perturbée par la tournure que prenait leur altercation. Et elle n'aimait pas ça.

Elle n'aima pas non plus l'exclamation qui sortit de la bouche d'Éli, et grimaça, sans pour autant s'avancer ou reculer. Fallait-il la soutenir, l'aider à se rasseoir ou à marcher ? Alyssa n'avait pas vraiment envie de ne serait-ce toucher d'un doigt cette fille qui lui avait donné une claque et planté sa baguette dans ses côtes lors de leur dernier contact. Mais, bien malgré elle, la blondinette demanda tout de même :

- Tu veux pas que j'aille chercher quelqu'un ?

Elle n'avait pas envie de parler, ni d'écouter la blonde se moquer de sa faiblesse. Par Helga, j'peux pas être tranquille, c'est trop demander ?! La main toujours contre le mur, la Poufsouffle releva un peu la tête lorsqu'Alyssa lui proposa d'aller chercher de l'aide. Qui est-ce qu'elle voulait aller chercher encore ? Un prof ? Mister Kohler ? Non merci, juste toi part ça s'ra mieux... Le regard qu'Éli finit par poser sur son ex-amie traduisait assez bien toute la rancœur et l'agacement que la griffonne lui inspirait à cet instant.
Dans sa tête, elle était déterminée à la remballer sèchement, à deux doigts de lui lancer un " vas t'occuper des Sombrals chez ta mère espèce de face de harpie", mais en réalité, elle n'était plus vraiment là. Trop faible pour clacher sévère, mais pas encore assez pour se taire.

- j'tai rien d'mandé, mêle toi.... d'tes.... Vacillante, la jeune fille malgré elle, finit pas se laisser glisser de nouveau dos contre le mur. Même ses propres mots devenaient insupportables à entendre, camouflés par le bourdonnement qui rendait le couloir si assourdissant pour elle. ...affaires. Elle replia ses genoux et les entoura de ses bras avant d'y poser sa tête, fermant de nouveau les yeux. Elle se fichait pas mal de ce que penserait Alyssa finalement, elle voulait juste rester là sans bouger, le temps que son malaise passe.

Alyssa accueillit de mauvaise grâce le regard empli de rancœur et d'agacement de son ancienne amie. Quoi ? Tu veux que je te laisse t'écrouler seule ici ? Me tente pas, j'en serais capable..., telles étaient les pensées qu'elle mourrait d'envie de lui cracher au visage, et ce avant de tourner les talons et d'oublier cette scène pour de bon. Alors... Pourquoi la blondinette n'avait pas déjà mis ses menaces silencieuses à exécution ? Gardait-elle donc un semblant d'humanité envers cette personne qui lui flanquait la nausée dès qu'elle en apercevait ne serait-ce qu'une mèche brune de ses cheveux ?

Tel un film dramatique devant lequel elle n'avait de toute manière aucun impact, Alyssa, immobile, regarda alors Éli glisser au ralenti contre la paroi du mur, cette dernière ne terminant sa phrase qu'à mi-voix. La voyant maintenant replier ses genoux avant de les entourer de ses bras, un flashback des plus déplaisants arriva tout droit dans l'esprit de la jeune adolescente : sa propre image exactement dans la même position, perdue au milieu d'un couloir sombre au fin fond des souterrains. Alyssa se mordit la lèvre, elle avait eu ses raisons ce jour-là, mais ici et maintenant, il ne lui apparaissait aucune explication quand à l'état de la Poufsouffle.

Hésitant toujours, rechignant furieusement à s'approcher et à ne serait-ce qu'effleurer Éli, les yeux bleus d'Alyssa bifurquèrent une fois à droite, une fois à gauche. Mais ils sont où ces adultes quand on a besoin d'eux ?, songea-t-elle avec agacement, ses pensées en particulier dirigées vers le concierge. Il suffirait que l'un d'eux arrive et elle pourrait ainsi lui laisser Éli pour filer en vitesse sans demander son reste. L'idée de partir à la recherche d'un professeur passa bien dans l'esprit de la blondinette mais en fait, cette dernière ne se sentait pas vraiment à l'aise à laisser son ancienne amie seule ici dans une telle position de faiblesse.

Alyssa serra les dents et inspira un bon coup. Elle n'avait pas le choix. Essayant de se persuader que sa décision allait de toute manière à l'encontre de ce qu'Éli voulait, et donc par ses actes qu'elle embêterait tout de même son ancienne amie, la jeune fille se mit alors à genoux à côté de la brune avant de la secouer par les épaules en lui disant fort :

- Non, te replies pas comme ça, ça sert à rien ! Je vais t'aider à te relever et on va aller à l'infirmerie.

Puis tu resteras là-bas tout le reste de l'année s'il le faut, je t'ai assez vue comme ça, finit-elle silencieusement.

Le couloir tournait, et même les yeux fermés, la jeune fille pouvait sentir le malaise la gagner tel un tourbillon non-contrôlable. En un instant, elle sentit quelque chose la secouer avec une intensité et un rythme qui lui donnèrent envie de vomir. Alyssa venait de l'attraper pour la secouer... Non mais qu'est ce qu'elle fait sérieux la... STOP !!! C'est pire... Arrete espèce de .... Mais les mots que la gryfonne venait de prononcer la firent réagir encore plus vite.

- NON ! Levant ses bras pour forcer Alyssa à lâcher l'emprise qu'elle avait sur elle, Éli avait agit spontanément en entendant le mot "infirmerie". Étrangement, l'éventualité de se retrouver là-bas lui avait redonné subitement une force insoupçonnée, tournant son regard noir vers sa camarade. De façon plus tempérée cette fois, elle réitéra sa négation, accompagnant son "non" d'un mouvement de la tête allant de droite à gauche. Laisse-moi là sérieux ! C'est pas parc'que tu m'as défiguré l'autre jour que tu dois faire semblant de t'intéresser. J'suis pas ta cause perdue Aly.

Tout en se relevant pour éviter toute récidive de sauvetage agressif par sa camarade, Éli tenta de paraître détendue et stable quelques secondes. Il fallait qu'elle tienne les apparences juste le temps que la griffonne tourne les talons, après, elle aurait l'espace libre pour subir son malaise avant de reprendre la route du terrier un peu plus tard. ça va mieux tu vois ! Levant les mains comme pour présenter sa vérité à sa camarade, elle sentit immédiatement qu'elle n'aurait pas dû agir ainsi. Tout tourna bien plus fort, et cette fois elle ne put retenir la bourrasque interne qui la fit vaciller. La jeune fille par reflex, tenta de se raccrocher à Alyssa pour amortir sa chute.